QUATRIÈME TRIMESTRE 1998 « La foi qui n'agit point, est-ce une foi sincère ?»   

 Numéro 14

              

Langues régionales et idéologie ethnique.

 

Dans l'affaire de la Charte des langues régionales ou minoritaires, une chose nous a toujours étonnés : pourquoi tout ce tohu-bohu, alors que l'écrasante majorité de la population n'a rien demandé et ne demande rien à ce sujet ?
Dans la région de Nîmes, d'Alès, de Montpellier, d'Avignon, nous ne percevons pas de volonté populaire quant à faire émerger à tout prix les dialectes locaux.

S'il n'y a pas de volonté populaire, il y a donc une volonté politique, mais comment y aurait-il une volonté politique digne de ce nom si la majorité de la population, elle-même, n'a rien demandé à ses élus ?
La question est donc de savoir si cette volonté politique ne vient pas de l'extérieur.

En cette interrogation, nous avons été éclairés par l'association Avenir de la Langue Française (1) qui a eu l'extrême amabilité de nous envoyer un rapport sur une organisation appelée F.U.E.V. Cette organisation, en partie financée par le Ministère allemand de l'Intérieur, prône un noyautage des États-Nations européens en relançant la vieille idée d'une Europe fédérale et ethnique.

Ce rapport signé de M. Lionel Boissou nous a tous laissés cois, tant il nous a appris des choses que nous ne soupçonnions même pas, tant il est documenté, précis et implacable.

Quel est le député, qui après sa lecture, oserait voter pour la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires ?

Quoi qu'il en soit, nous noterons les noms de ceux qui auront voté pour, et nous les tiendrons pour responsables devant l'HISTOIRE.
Nous vous livrons, ici, les deux premiers paragraphes de ce rapport, la suite paraîtra dans nos prochains numéros.  
(1) Avenir de la Langue Française : 98, rue de Sèvres - 75006 Paris.

La F.U.E.V. et la charte européenne des langues régionales ou minoritaires

I) Le passé-présent ou la continuité.

« Nous sommes particulièrement tenaces. Partout où il est question des droits des minorités ethniques (“volksgruppen”) et peut-être même où se prennent les décisions, nous nous incrustons, on ne peut plus se débarrasser de nous et nous essayons de peser sur les choix. »
L'auteur de ces propos n'est autre que Christoph PAN, ancien professeur de droit à l'université d'Innsbruck (Autriche) et précédent président de la F.U.E.V. (Föderalistische Union Euro-païscher Volksgruppen : Union Fédéraliste des Communautés Ethniques Européennes / U.F.C.E.).

Cette organisation revendique clairement et fièrement sa filiation avec le « congrès des nationalités » d'avant-guerre (1925-1938) qui se tenait à Genève dans le cadre de la S.D.N. (Société Des Nations). À cette époque déjà, les associations qui participaient à ces « congrès » défendaient une conception ethnique de la nation fondée sur le racisme biologique.

 

L'objectif pour le congrès consistait essentiellement à regrouper dans un Reich grand-allemand les minorités allemandes que les Traités de Versailles, Saint-Germain et Trianon avaient enlevées au IIe Reich et à l'Autriche-Hongrie en 1918-1920. En d'autres termes, il s'agissait de réviser les frontières des états européens au seul profit de l'Allemagne. Pour autant les « minorités nationales » de France n'étaient pas oubliées : Alsaciens, Basques, Bretons, Corses et Flamands faisaient l'objet d'une extrême sollicitude de la part de ces « congrès ». Aussi n'est-il guère étonnant de constater que les militants des “Nationalitäten-Kongresse”, regroupés autour de leur organe mensuel officiel “Nation und Staat” (Nation et État), ont fait cause commune avec le régime nazi.

Pour bien marquer la continuité idéologique avec le passé, la F.U.E.V., elle-même portée sur les fonds baptismaux à Versailles (!) en 1949, a décidé symboliquement de poursuivre pour sa nouvelle revue officielle “Europa Ethnica” (tout un programme !) la numérotation de sa devancière “Nation und Staat” qui avait dû interrompre sa parution en 1944 pour des raisons que l'on devine aisément, les deux publications ayant le même éditeur : les Éditions Braunmüller, à Vienne (Autriche). 

 II) Objectifs et stratégie de la F.U.E.V.

La F.U.E.V. qui revendique aujourd'hui 100 associations-membres issues de 28 états a réussi à obtenir, grâce à une pression forcenée de tous les instants, le statut consultatif aux Nations Unies et au Conseil de l'Europe. Grâce à ce statut d'O.N.G. (Organisation Non Gouverne-mentale), la F.U.E.V. participe à toutes les sessions du Conseil de l'Europe et du Parlement européen, aussi bien à Bruxelles qu'à Strasbourg. Mais la F.U.E.V., consciente du poids qu'elle prend progressivement dans les institutions européennes et de l'influence croissante qu'elle exerce, n'entend pas se contenter de ce statut, elle revendique désormais un droit de regard direct.

Prétextant faire progresser la question des droits de l'homme et sous couvert de construction européenne, la F.U.E.V. cherche à promouvoir au Conseil de l'Europe, avec le concours du Parlement européen, un « droit européen des minorités ethniquesa» qui, « élaboré » et « voté » par les institutions européennes s'imposerait automatiquement aux états nationaux. Ce droit consacrerait de facto l'idéologie propagée par la F.U.E.V. d'une Europe fédérale et ethnique.


M. Lionel Boissou
(75) Paris

 

(suite au n° 16)

  

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