QUATRIÈME TRIMESTRE 2000 « La foi qui n'agit point, est-ce une foi sincère ?»   

 Numéro 22

              

Rencontres Européennes de la Culture

à Avignon 2000 

  A.FR.AV.
                                   

 Ministère de la Culture
                                    Madame Anita Weber
                                    3, rue de Valois
                                    75001 Paris

                                 

Manduel, le 13 septembre 2000

 

Madame,

Le 26 juillet 2000, vous étiez à Avignon aux Rencontres Européennes de la Culture.

J'ai pris la parole à 11h45 : hélas vous étiez déjà partie. Permettez, alors que je vous fasse part d'un résumé de ce que j'ai dit ce jour-là, car le sujet dont j'avais choisi de parler :

« La langue des Américains doit-elle devenir la langue de l'Europe ?  », n'est jamais abordé lors de réunions culturelles ou de réunions sur l'Europe.

Vous serez bien aimable de parler de cette intervention à Madame le ministre, Madame Catherine Tasca, qui, si je ne me trompe, a été en son temps l'instigatrice de la loi Toubon.

Cette fameuse loi Toubon qui mériterait d'être refaite tant elle est bafouée, contournée, méprisée et surtout non appliquée.

En vous remerciant de votre attention, je vous prie, Madame la conseillère, d'agréer l'expression de toute ma considération.
                                      

                                       

 Régis Ravat
                                        Président de l'A.FR.AV
.

- Rappelons que, dans toutes les instances européennes, que ce soit à Bruxelles, à Strasbourg ou à Luxembourg, l'anglais a une place de choix : les documents sont faits d'abord dans cette langue, puis après, si on y pense, dans les autres langues officielles ; les sigles et autres acronymes sont issus, dans la plupart des cas, de noms anglais. Qui s'offusque de tout cela ?

- L'Eurocorps, l'armée européenne, composée de Belges, de Luxembourgeois, d'Espagnols, d'Allemands et de Français, autrement dit d'aucun anglophone, a adopté l'anglais comme langue opérationnelle. Est-ce normal ? 

Où est l'indépendance militaire de l'Europe, si on ne peut pas se passer de la langue des Américains pour être opérationnels ?

- Madame Nicole Fontaine, présidente du Parlement européen, envoie une invitation tout en anglais et uniquement en anglais aux députés européens pour célébrer la Monnet and Schuman's Way of Life (sic). Qui a protesté contre ce favoritisme proanglophone ?

- Bruxelles met la pression pour que les normes ISO de dépôts de Brevets ne se fassent plus qu'en anglais. Tout comme l'Institut Pasteur qui exige que les travaux qui lui sont remis soient rédigés en anglais. A-t-on vu nos députés européens ou nos savants s'insurger contre cet apartheid linguistique ?

- Récemment, l'Eurovision a montré que la plupart des pays européens acceptaient de se faire représenter par des “artistes” chantant en anglais. 

Devra-t-on chanter en anglais les hymnes nationaux de nos pays pour passer à la télévision ?

- Enfin, j'ai entendu tout à l'heure dans cette salle, s'exprimer en anglais deux Polonais du syndicat « Solidarité ». L'un d'eux dénonçait la mondialisation de la culture, l'homogénéisation des goûts et des couleurs, la mainmise de la culture américaine sur notre Europe, sur notre monde. - Mais, Messieurs les Polonais, peut-être que la première chose à faire pour dénoncer la mondialisation à l'anglo-saxonne, c'est de ne pas parler américain, tout simplement. Cela d'autant plus que votre pays, la Pologne, veut faire partie des pays composant la Francophonie.

N'aurait-il pas été judicieux et logique dans ces conditions, quitte à parler une langue étrangère internationale, de parler plutôt le français ?

- Pour terminer, je voudrais dire combien je trouve inquiétante et préoccupante l'avancée de la langue des Américains dans nos entreprises françaises et européennes.

Je travaille à Carrefour qui est le numéro 1 européen dans la grande distribution. C'est un groupe français et pourtant ses produits de marque s'appellent First Line, Blue Sky, Blue Wind, Top Bike, Green Cut ; vous l'aurez compris, rien que des noms anglais. Est-ce normal de la part d'une entreprise française ? De plus, avec des programmes informatiques tout en anglais, Carrefour oblige son personnel, au mépris de la loi, à travailler en anglais, autrement dit à s'angliciser. Qu'en est-il alors de la fameuse loi Toubon, si décriée lorsqu'elle a été promulguée et si contournée qu'elle n'est plus appliquée ?

Je profite donc de la présence de Madame Anita Weber, représentant Madame le ministre de la culture, Madame Catherine Tasca, pour demander instamment à l'autorité publique que le nécessaire soit fait pour que la langue des Américains ne devienne jamais la deuxième langue de France, n'y devienne jamais la langue de l'enseignement, du savoir et de la recherche, n'y devienne jamais la langue du travail, des loisirs et des sports, cela au nom de la Liberté, la liberté de pouvoir vivre, travailler et prospérer chez nous dans la langue de nos pères, la langue qui a fait et qui fait notre République.

Je sais que Madame Tasca a été l'instigatrice de la loi Toubon, je demande donc qu'elle veuille bien reprendre cette loi pour la rendre cette fois-ci efficace et non contournable par la multitude d'anglomaniaques qui hantent ce pays.

Je demande également que puissent se porter partie civile dans son application tout syndicat ouvrier et toute association de défense de la langue française légalement déclarés.

Permettez pour conclure que j'émette une proposition :
Puissent les instances politiques de chaque nation européenne, et à leur tête les chefs d'État, s'engager solennellement à ce que la langue des Américains ne soit jamais la langue de l'Europe.

                     

                             

Avignon le 26 juillet 2000
                             Centre des Congrès
                              Palais des Papes.

 

Mesdames et Messieurs,

 

Je vais vous parler d'un problème qui n'est jamais ou presque abordé lors des réunions culturelles ou des réunions politiques sur l'Europe, à savoir le problème des langues.

Pourtant, il faudrait être sourd et aveugle pour ne pas se rendre compte qu'une langue est en train d'évincer toutes les autres en Europe , et que cette langue, c'est la langue des Américains. Cela dit, ne serait-il pas utile de poser comme question préalable avant toute discussion sur la culture en Europe, s'il est normal que la langue des Américains devienne la langue de l'Europe ?

- Dans notre région Provence-Languedoc-Roussillon plus de 95% des élèves qui entrent en 6e prennent l'anglais comme première langue étrangère, est-ce normal ? Est-ce normal, d'autant plus que nous sommes balayés par les vents d'Espagne et d'Italie et que tout naturellement nos enfants devraient apprendre en priorité ces langues étrangères-là. En fait, il n'en est rien, tout est fait au contraire pour qu'ils apprennent l'anglais. Ma fille, en classe de CE2, a eu l'anglais en initiation, j'ai demandé qu'elle ait plutôt l'espagnol, le directeur m'a ri au nez. 

Où est là-dedans le fameux enseignement plurilingue prôné par le gouvernement ? M. Jack Lang veut instaurer l'enseignement des langues étrangères dès la maternelle, mais dans ces conditions, tout le monde aura compris que dans langues étrangères, c'était l'anglais qui allait s'instaurer dès la maternelle. La politique plurilinguiste du gouvernement, et de ceux qui l'ont précédé d'ailleurs, est en fait une politique trompe-l'œil qui introduit l'anglais massivement dans notre système éducatif ; dans quel but ? Après la monnaie unique, serait-on en train avec l'anglais de nous cloner à la langue unique, question de nous uniformiser, nous standardiser, nous normaliser, nous fondre dans le moule de l'American Way of living and thinking.

Est-ce cette Europe-là anglophone, donc américanisée, que l'on veut faire pour nos enfants ?


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