FRATERNIPHONIE

LE JOURNAL DE L’ASSOCIATION FRANCOPHONIE AVENIR - A.FR.AV

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DEUXIÈME TRIMESTRE 1996

« La foi qui n'agit point, est-ce une foi sincère ? »   

 Numéro 04

              

Djibouti vue par un légionnaire.

 

Entre la Maison Carrée et les Arènes de Nîmes, à la terrasse d'un café, une chope de bière sur la table, notre légionnaire du 2ème REI* veut bien nous accorder une entrevue pour nous parler de Djibouti.

F.M : depuis l'indépendance de cet ex-territoire français des Afars et des Issas, la situation s'est-elle améliorée pour la population ?

 Le légionnaire : Bien sûr que non, c'est la misère la plus totale, on ne voit même pas l'ombre d'une amélioration possible, jamais ça n'a été aussi sale et délabré. Il y a dans ce pays deux ethnies rivales qui se font la guerre et cela n'est pas fait pour arranger les choses. De plus à cette misère originelle vient se greffer des tas de réfugiés d'Éthiopie et de Somalie.

F.M : Qui gouverne là-bas ?

Le légionnaire : (grand sourire ) C'est Hassan Gouled Aptidon dit petit-bidon.

F.M : Tiens, pourquoi petit-bidon ?

Le légionnaire : Parce qu'il est petit, gras et gros et ça choque par rapport à son peuple qui crève de faim. C'est un dictateur soutenu comme bien d'autre par la France. Il roule, quand il sort de son palais, en Mercédès blindée, la dernière sortie de chez Mercédès. Tout ça avec l'argent que la France donne pour aider Djibouti à se développer.

F.M : Mais y a-t-il un gouvernement, des ministres?

Le légionnaire : Vous rigolez ? le dictateur a nommé ses frères ,ses cousins, ses oncles à tous les postes clés du pays, comme ça il ne doit de compte à personne et comme il est soutenu par la France, il est tranquille, peinard, il n'a qu'à se laisser vivre et s'enrichir lui et sa famille.

F.M : Y a-t-il tout de même une opposition à ce régime ?

Le légionnaire : oui, le gars de l'autre ethnie ( il cherche le nom ) oui ça y est, Ahmed Dini. Il vit de l'autre coté, au Yémen. Il a dû s'exiler pour sauver sa peau. Là- bas à Djibouti quand tu es de l'opposition, vaut mieux le dire ailleurs, loin, très loin.

F.M : Y a-t-il une industrie dans ce pays qui permettrait à ces gens de s'en sortir ?

Le légionnaire : Non rien, le désert, rien que le désert. Faudrait investir comme les juifs ont investi dans leur désert en Israël, mais tant que l'aide au développement sera détournée pour enrichir les dictateurs, le pays restera toujours dans la misère. Le dictateur préfère investir dans son armée - plus de 15 000 hommes c'est énorme pour un si petit pays - que d'investir dans des écoles , l'agriculture ou l'industrie. Le seul truc qui marche c'est la prostitution. Les macs vont chercher leurs filles en Éthiopie, elles font deux ou trois ans, puis un coup de pied au cul, elles sont renvoyées sans un rond chez elles.

 

F.M : Et la police dans tout ça ?

Le Légionnaire : (grand sourire) ils sont corrompus jusqu'au bout des ongles.

F.M : Comme tu le sais peut-être Djibouti fait partie de l'Ensemble francophone comment se porte la langue française là-bas ?

Le légionnaire : Les pauvres, c'est-à-dire 80 % de la population, ne vont pas à l'école. Ils parlent français comme ils peuvent. Ils essayent surtout de connaître les mots clés pour mendier. Quant aux riches, ils vont dans des écoles privées. On a l'impression qu'il apprennent le français plus pour partir en Suisse ou en France en cas de coup dur que pour participer au développement de leur pays.

F.M : Que penses-tu de la politique de la France dans cette " République " ?

Le légionnaire : La France a donné l'indépendance à ces gens pour s'en débarrasser, pour leur laisser leur misère et leur en laisser surtout la responsabilité. Pour la France ce qui est important, c'est sa base militaire, le reste elle s'en fout, francophonie comme développement. Elle maintient en place Hassan Gouled pour être tranquille, elle le soudoie avec l'aide au développement qu'il utilise comme il veut, c'est-à-dire surtout pour son armée et pour remplir son compte en Suisse.

 

Propos recueillis par Jean-Pierre Martinez (13) Marseille. Le légionnaire, pour des raisons que l'on comprendra, a tenu à garder l'anonymat.

Nous aurons l'occasion de reparler de l'aide publique au développement, qui représente certainement un des plus grands scandales, si ce n'est le plus grand, de cette fin de siècle. Nous conseillons vivement à nos adhérents ou à nos lecteurs de lire le livre de François-Xavier Verschave et d'Anne-Sophie Boisgallais, livre qui en dit long sur l'aide publique française au développement. Toutes les personnes, militaires, coopérants, médecins, touristes, immigrés qui ont vu de près ou de loin la situation réelle en Afrique Noire Francophone peuvent nous apporter leurs témoignages, il est des situations dont il est un devoir d'en parler.

 

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