M. Valéry Giscard
d'Estaing a été élu à l'Académie française. Ainsi a-t-il pris le
fauteuil n°16 d’un des pères de la Francophonie, M. Léopold Sédar Senghor, décédé en
2001. Face à cette élection, comment ne pas être étonné, voire
écœuré, quand on sait que ce monsieur n'est ni un amoureux ni un
défenseur de la langue française? En effet, comment ne pas se
rappeler qu'au soir de son élection à la présidence de la
République, il y a de cela plus de trente ans, il n'avait pas
trouvé mieux que de s'exprimer en anglais devant la presse
étrangère ? Comment ne pas se rappeler qu'au pouvoir, il ne
cessa de faire la promotion de cette langue en se faisant le
chantre, notamment, du bilinguisme français/anglais ? Cette
politique, consistant à favoriser l'anglais par rapport aux
autres langues étrangères, eut pour conséquence désastreuse que
l'Espagne et l'Italie firent de même, et cela entraîna que notre
langue, jusqu'alors première langue étrangère enseignée dans ces
pays, céda la place à l'anglais. Comment ne pas se rappeler son
voyage officiel en Louisiane en tant que Président de la
République française, où il montra une fois de plus combien il
n'est nullement préoccupé par les questions linguistiques et
encore moins par la langue française ? En effet, alors que la
Louisiane est le seul État des États-Unis d'Amérique où la
langue française a un statut de langue officielle, il fit son
discours en anglais. Les Louisianais francophones, qui se
battent depuis plus de cinquante ans pour la survie et la
reconnaissance du français dans cet État, en furent tout
retournés et dépités. Comment ne pas se rappeler aussi que dans
un des rares livres qu'il a écrits «
Les Français-Réflexions sur le destin d'un peuple »
(Plon, 2000), il décrit aux pages 65-66 le pouvoir hégémonique
de l’anglais , sans s'en offusquer pour autant et sans proposer
de solutions pour lutter contre cette domination :
«
L'anglais est devenu la langue commerciale internationale... La
tendance a été accentuée par le développement des
technologies nouvelles de la communication et de l'information,
dont la langue d'usage est l'anglais. Lorsque le président de
l'Assemblée nationale a pris l'heureuse initiative de mettre un
moniteur d'information à la disposition des députés pour les
initier à l'accès à Internet, des indications portées à
l'écran de mon ordinateur étaient exprimées en anglais. Nos
chercheurs scientifiques savent qu'il leur faut désormais, pour
communiquer les
résultats de leurs travaux, rédiger leurs mémoires en anglais,
...(sic) »
.
Enfin,
dernièrement, nommé président de la Convention pour élaborer
une Constitution à l'Europe, comment ne pas se rappeler qu'il
se montra sourd aux appels des associations de défense de la
langue française qui demandaient toutes que soit prévu dans
les textes un article garantissant la vie et la survie des
langues nationales européennes face à la pieuvre du tout
anglais ?
À
n’en pas douter, fort de tous ces services rendus à la langue
anglaise, M. Valéry Giscard d'Estaing méritait plus d'obtenir
le titre anglais de "Sir", que de recevoir l'Épée et
l'Habit Vert des Académiciens, symboles, comme l'on sait, des
Chevaliers d'honneur et des Chevaliers servants de notre belle
langue française.
Que
penser alors de nos Académiciens qui ont élu dès le premier
tour et lors d'une séance d'à peine trente minutes, cet
anglomaqué parmi eux ? Sur les 34 participants, 19 ont voté
pour lui, 12 ont voté blanc et 3 ont préféré un autre
candidat. M. Druon a été le plus véhément à s'insurger
contre la venue de VGE à l'Académie, mais a-t-il pour autant
profité du forum national, voire international, qui lui était
offert pour dénoncer à travers VGE la politique du tout
anglais de la France, de l'Europe et du Monde ? A-t-il eu
l'idée, ne serait-ce qu'une minute, de mener le combat contre
Giscard sur le terrain de l'anglomanie ? Non ! Car à lire et à
écouter les médias, M. Druon et ses alliés en voulaient à
Giscard parce qu'ils avaient un vieux compte à régler avec lui
au sujet d'une histoire politico-politicienne, une histoire de
clans entre gaullistes et giscardiens, une histoire qui
remonterait à l'année 69. Bref, ils se sont opposés à
Giscard à l'Académie non pas sur le plan de la langue, le seul
plan qui devrait prévaloir en cette enceinte, mais sur une
sombre affaire de politicards.
Force
est de constater alors, qu’à l'Académie française, comme
c'est le cas désormais partout en France, la langue française
n'est pas la priorité, la langue française n’est pas au
centre du débat, et qu’on s'en fout, en somme, comme de l'an
quarante.
Le Président de l’A.FR.AV