Il se joue actuellement, dans notre dos, le sort
de l'indépendance linguistique de la France et de l'Europe. En effet,
sans trop savoir qui en est à l'origine, mais certainement pas les
peuples d'Europe, il s'est lancé l'idée, qu'au niveau européen, il
fallait créer une sorte de marché commun avec les États-Unis d'Amérique
(Accord transatlantique UE-ÉUA).
Il va de soi que si l'Europe entrait dans un tel
marché, il en serait fini de son indépendance politique, économique,
culturelle et linguistique.
En ce qui concerne le volet linguistique, il ne faut pas
être sorti de l'école de Saint-Cyr pour comprendre que s'unir avec près
de 300 millions d'anglophones, c'est s'assurer pour demain que nos nuits
et nos jours se feront en anglais, puisque cette langue sera alors
largement majoritaire dans le nouvel ensemble et que, dans les faits,
elle deviendra OBLIGATOIRE pour tous, et partout. Comment en serait-il
d'ailleurs autrement, alors que c'est déjà plus ou moins le cas
actuellement dans l'UE, où pourtant, ce sont les langues allemande et
française qui sont majoritaires en terme de locuteurs, par rapport à
l'anglais ?
Dans la perspective d'un marché commun avec les
États-Unis d'Amérique, comment nos politiciens nous protégeraient-ils de
l'anglicisation, alors qu'aujourd'hui, au niveau européen, ils n'en sont
pas capables ?
Nos politiciens veulent faire passer la pilule de
notre future assimilation au monde anglo-américain, en nous disant
qu'ils mettront leur droit de veto à cet accord, si l'exception
culturelle n'est pas exclue des négociations.
Il est triste de le dire, mais une fois encore, nos
politiciens se trompent. Ils se trompent soit par bêtise, soit par
ignorance, soit par manipulation, soit par manque de vision politique,
soit qu'ils se sont fait acheter, consciemment ou non, par les maîtres
de Davos, de Bilderberg, de la Trilatérale, de la NSA ou d'un autre
machin de l'anglosphère, mais ils se trompent, car dans cet accord,
s'il fallait le négocier, c'est plus
le droit aux langues d'exister
par rapport à l'anglo-américain qu'il faudrait
défendre, que
l'exception culturelle elle même.
Oui, il faudrait soulever la question linguistique et
défendre, pour ce qui concerne la France, la langue française. Défendre
la langue française, pour nous Français, car pourquoi parler seulement
de l'exception culturelle, si rien n'est fait, par ailleurs, pour
permettre à nos artistes de vivre de leur art en français et non en
anglais ? Aujourd'hui, déjà, un bon nombre de jeunes chanteurs
français chantent en anglais et il n'est pas rare de voir certains de
nos comédiens tourner dans cette langue dans des séries télévisées
issues de coproductions européennes (voir actuellement, pour exemple,
Jean Reno, dans "Jo", une série européenne tournée en anglais à Paris !
Voir aussi, Marc Lavoine
speaker
l'anglais dans "Crossing Lines", une autre série européenne). Bref, si
l'exception culturelle, en France, devient synonyme d'artistes français
s'exprimant en anglo-américain, en singeant, qui plus est, ce qui se
fait à Hollywood, à quoi bon se battre alors pour le maintien d'une
telle exception ? À moins qu'il ne s'agisse là encore d'une stratégie,
une stratégie pour nous endormir, une stratégie qui consisterait à
laisser s'ouvrir grand les vannes de l'anglicisation, tout en nous
faisant croire que nous n'avons rien à craindre de l'américanisation
puisque la France a obtenu que l'on respecte la fameuse « exception
culturelle » !
Oui, il faudrait soulever le problème linguistique
et défendre la langue française, car c'est le droit à la diversité que
nous défendrions, c'est l'uniformisation et la standardisation que nous
refuserions et, par là même, c'est la dictature de la pensée unique que
nous combattrions.
Oui, il faudrait soulever le problème linguistique et
défendre la langue française, car, avec la langue française, notamment,
c'est aussi une conception de la société que l'on défendrait, une
société humaniste, démocratique et sociale issue des valeurs
gréco-latines et du droit romain, et non, avec le seul anglais, une
société à caractère anglo-saxon où la violence de l'ultralibéralisme
économique règne en maître absolu et où le droit est façonné à grands
coups de jurisprudences que de grands cabinets d'avocats à la solde
des multinationales sont chargés de gagner pour elles.
Hélas, nos politiciens n'aborderont pas ce sujet, ils
préféreront parler d'exception culturelle, c'est plus simple, c'est
moins polémique, ça passe mieux dans les médias, mais ne parleront pas
du volet linguistique de l'Union UE-ÉUA, ni surtout pas de la langue
française. Comment d'ailleurs défendraient-ils le plurilinguisme et
la langue française dans ces négociations, alors qu'ils ont tous été
d'accord, ou presque, pour mettre l'anglais obligatoire dans nos écoles
dès le CP, c'est-à-dire dès l'âge de 7 ans pour nos enfants et qu'ils
ont voté à une très large majorité l'article II du projet de loi sur
l'enseignement Supérieur de la ministre Fioraso, consistant à légaliser
l'enseignement EN anglais dans nos universités et grandes écoles ?
En vérité, ils nous préparent depuis des années à cette
union avec les États-Unis d'Amérique. En effet, Nicolas Sarkozy ne
voulait-il pas déjà en 2007, faire de la France un pays bilingue
français-anglais, et ses ministres Darcos, Chatel et Pécresse
n'ont-ils pas préparé le terrain aux ministres socialistes Peillon et
Fioraso pour qu'ils puissent, comme une lettre à la poste, implanter
l'anglais obligatoire partout dans nos écoles ?
Comme on peut le constater, nos politiciens se servent
du concept de l' « exception culturelle » comme d'un paravent, un
paravent pour que les angliciseurs puissent angliciser sans être gênés,
pour que les « Collabos de la pub et du fric1
»
puissent assassiner la langue française en toute
impunité. Ce que nos politiciens n'ont pas compris, ou font semblant
de ne pas comprendre, c'est qu'il ne peut pas y avoir d'exception
culturelle, ni même de France, sur le cadavre même de la langue
française.
Pour conclure, et pour proposer quelque chose de positif
à nos pauvres politiciens sans idées pour la France et pour le monde,
permettons-nous de leur dire qu'au lieu de se perdre, et de nous perdre,
dans une hypothétique union transatlantique, ils feraient mieux de
s'intéresser à une union avec les pays francophones. Mais la
Francophonie est ignorée, pourquoi ? Pourquoi, alors qu'elle pourrait
être pour nous une extraordinaire ouverture au monde et l'occasion, ce
faisant, de lui délivrer un bien meilleur message de paix, que notre
enfermement dans l' « axe du bien », si cher à Georges Doublevé Bush, un
ex-président des États-Unis d'Amérique, guerrier sanguinaire de son
état, qui sous un faux prétexte a réduit à feu et à sang un grand pays
comme l'Irak ?
Une union avec les pays francophones donc, qui nous
permettrait d'envisager l'avenir, pour nous et pour nos enfants, en
français et non en anglais, car d'ici 2050, selon un sondage de
l'UNESCO, les francophones du monde devraient représenter plus de 750
millions de locuteurs, c'est-à-dire près de 10% de la population
mondiale. Ce n'est pas rien. La langue française sera alors une langue
africaine, majoritairement parlée par des Noirs. Serait-ce alors pour
cela que nos zélites,
nos intellectuels, nos artistes, nos politiciens sont nombreux à
préférer, à cette langue en devenir, la langue des WASP2,
adeptes du "Speak White", notamment ?
Osons penser que non, et ayons la force de les
convaincre que cultiver le jardin de la Francophonie est bien mieux pour
nous et pour nos intérêts que d'aller se perdre dans les étoiles jaunes
et blanches de l'Europaméricanie où la finalité programmée pour nous est
de disparaître, absorbés par le trou noir de l'anglosphère.
Ensemble, protestons auprès de nos élus contre l'anglo-anglicisation
de la France et de l'Europe et n’ayons de cesse de leur rappeler le bon
souvenir du monde francophone.
Régis
Ravat, Président de l’A.FR.AV
1
selon un article de Michel SERRES, philosophe, universitaire
et académicien.
2 acronyme
pour White Anglo-Saxon Protestant (racistes et extrémistes).