À la fin du mois de novembre, la France est
intervenue militairement en Centrafrique, pays d’Afrique noire
francophone, où règne le chaos, où le Président est un
dictateur autoproclamé et où la population est en proie à la
guerre civile, divisée qu’elle est entre ethnies, chrétiens et
musulmans. Triste réalité que de voir ce pays, parmi les plus pauvres du
monde, se déchirer, s’autodétruire, un pays parmi les plus pauvres du
monde, alors que pourtant jadis, il faisait partie de la prospère
Afrique équatoriale française (AEF).
La question que l’on pourrait se poser alors et que,
bien sûr, personne parmi les médias ou la classe politique ne se
posera, sujet tabou oblige, serait de savoir pourquoi les peuples
africains ont été soi-disant demandeurs d’indépendance dans les années
60, pour finir si miséreux et si proches du néant, aujourd’hui.
En effet, plus de 50 ans après les indépendances, ne
serait-il pas intéressant de demander aux libérateurs, aux
indépendantistes, aux décolonisateurs, aux porteurs de valises, aux
bien-pensants de l’époque, comment ils pourraient nous expliquer l’état
du délabrement actuel de l’Afrique francophone ?
Si l’inspecteur de police, lorsqu’il fait une enquête
sur un meurtre, se demande à qui a profité le crime pour trouver le
coupable, il serait intéressant alors, d’enquêter sur le même
principe, pour savoir à qui ont profité les indépendances en Afrique.
Apparemment, elles n’ont pas profité aux Africains qui,
dans leur immense majorité, vivent sous le seuil de pauvreté et
n’aspirent, pour un grand nombre d’entre eux, qu’à obtenir un visa pour
quitter leur pays indépendant afin d’aller travailler dans
l’ex-métropole coloniale.
Apparemment, non plus, elles n’ont pas profité à la
démocratie, puisque, à chaque élection, on y frôle la guerre civile et
que ce n’est qu’à grands coups de renforts de Casques bleus qu’elles
peuvent y avoir lieu.
Mais la démocratie avait-elle des chances de
s’épanouir dans des pays dessinés arbitrairement par des géographes
français qui ont tracé leurs frontières non pas à partir des peuples qui
les habitaient, mais à partir des caractéristiques géographiques des
lieux.
Ainsi, pour l’administration coloniale française, les
Africains établis près du fleuve Sénégal s’appelleraient les
Sénégalais, ceux installés près du fleuve Congo, les Congolais, ceux
qui vivaient près du fleuve Niger, les Nigériens, ceux qui habitaient
dans le centre de l’Afrique, les Centrafricains, etc. et tant pis pour
les Bambara, les Peuls, les Wolofs, les Haoussa, les Touaregs, autant
d’ethnies qui auraient pu faire, elles, de vrais pays, forts, cohérents
et homogènes.
Soit, la France coloniale de l’époque voulait traiter
« ses » Africains sur le même pied d’égalité et non selon l’importance
de leurs ethnies, tout comme, cette même France traitait et traite
encore aujourd’hui, les Français sur un même pied d’égalité, qu’ils
soient Bretons, Basques, Alsaciens, Corses ou Occitans.
Mais, s’il a fallu plus de mille ans pour construire
l’unité de la France, pouvait-on sérieusement penser qu’au soir des
indépendances en 1960, les pays africains artificiellement construits
auraient devant eux un avenir radieux fait de démocratie, de paix
sociale et de développement ?
Non, bien évidemment, car tout était en place, par la
construction multi-ethnique des pays nouvellement indépendants, pour
qu’ils soient ingérables et qu’il faille pour les diriger un dictateur
en guise de pouvoir démocratique. Un dictateur, bien évidemment,
mis en place par les bons soins de l’ancienne puissance coloniale qui du
coup gardait la main sur ses ex-colonies tout en se dégageant du devoir
de les développer.
Pour s’assurer les bonnes grâces des dictateurs en
place, pour que notamment ceux-ci laissent le complexe pétro-industriel
français continuer à exploiter les richesses des territoires
« libérés », la France des Droits de l’Homme et du Citoyens, la France
magnanime qui donne son indépendance aux pays colonisés, a mis en place
l’aide publique au développement. Cette aide publique au développement
est certainement la plus grosse escroquerie d’état qu’a connue notre
pays entre les années 60 et 80. Cette aide consistait, tout simplement,
à donner des centaines de millions de francs chaque année aux pays
africains pour les aider à se développer, mais en réalité, 20% de la
somme allait aux dictateurs en place et 80% revenaient en France via la
valise diplomatique alimenter les caisses des divers partis politiques
français. Comme tous les partis politiques de l’époque ont trempé dans
la combine, on comprend qu’aujourd’hui aucun politicien français n’ait
demandé l’ouverture d’une enquête parlementaire pour savoir ce qu’on a
fait des milliards de francs donnés à l’Afrique francophone afin de
l’aider à se développer. Et il est bien évident que si ces sommes
colossales d’aides publiques avaient été gérées par une administration
coloniale sur place et non par des dictateurs stipendiés, les
Africains, aujourd’hui, auraient le même niveau de vie et de
développement que les Français eux-mêmes.
Ainsi donc, la France joue une nouvelle fois, en
Centrafrique, les gendarmes en Afrique pour tenter d’arrêter les
massacres inter-ethniques qu’elle a largement contribué à mettre en
place de par le découpage en pays qu’elle a fait de ses ex-colonies.
Mais, avant que la France n’ait plus les moyens de
financer son armée, puisque le budget de l’État est désormais soumis aux
desiderata de la finance internationale, qui, elle-même, travaille pour
qu’il n’y ait plus d’État du tout, et avant que la France ne disparaisse
dans le Grand marché transatlantique en préparation, nos dirigeants ne
seraient-ils pas bien inspirés de conseiller à nos amis africains, afin
qu’ils parviennent à transcender leurs divisions ethniques et
religieuses, d’unir leurs pays pour faire l’Union de l’Afrique de
l’Ouest ? Une Union qui, pour faire fi du découpage colonial du
territoire, donnerait le pouvoir aux régions, et à des régions
transfrontalières s’il le faut.
Bref, si, comme nous le savons, les euro-régions
sonneraient la fin des nations européennes, et donc la fin de la France,
qui se plaindrait, par contre, que les africa-régions, construites sur
le même modèle que les euro-régions, sonnent le glas des républiques
bananières africaines ?
Ainsi donc, ce qui serait un mal ici, en France et en
Europe, serait peut-être la solution pour sauver l’Afrique de ses
guerres inter-ethniques, une solution qui la sortirait, une bonne fois
pour toute, des magouilles assassines de la Françafrique.
Le Président de l’A.FR.AV