Sujet : Ils veulent notre argent, mais pas notre langue  !
Date : 17/05/2007
De : Charles Durand   (courriel : charles.durand(chez)hotmail.fr)     Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez "chez" par "@"

 

 

 

À l'Institut Pasteur :

Je viens de recevoir directement de votre service de relations publiques une invitation à effectuer une donation à l’Institut Pasteur dans le cadre du programme « Pasteurdon » que vous avez récemment lancé.

Je viens de consulter votre site Internet pour constater que l’essentiel de l’information scientifique que vous produisez sous la forme de publications est presque exclusivement en anglais. En tant que contribuable français, il m’est impossible d’avoir accès aux résultats de travaux financés en grande partie par mes impôts dans la langue qui nous est pourtant commune !

Cependant, vous semblez encore vous souvenir que vous êtes français quand il s’agit d’aller chercher du financement.

J’espère que vous comprendrez qu’un quelconque don que je pourrais être en mesure de faire à l’Institut Pasteur ne serait considéré que comme une caution et un encouragement pour vous de continuer dans une voie que je réprouve, cela indépendamment de la valeur scientifique que vos travaux peuvent révéler.

Aussi, je vous conseillerais plutôt de rechercher des financements et autres dons et legs auprès de ceux à qui vous faites des courbettes au dépens de vos propres concitoyens, à savoir les nations authentiquement anglophones.

Meilleures salutations.

Charles Durand

 

 

Réactions prises sur le forum de discussions linguarum-democratia@googlegroups.com :

 

D'Anna-Maria Campogrande  :

Charles, je trouve que vous avez tout à fait raison et je ne doute pas quant au fait que, tôt ou tard, les Français et l´ensemble des citoyens européens commenceront à se révolter contre cette prostitution des milieux scientifiques et autres à l´anglais.

Le conformisme, qui a permis les pires dérives à d´autres époques de notre histoire, fait actuellement ravage sur nos langues et notre culture, au service de la puissance économique et militaire qui prétend gouverner le monde, mais, d´autres temps viendront où tout cela sera révisé et stigmatisé avec l´appellation qu´il mérite, celui de la « collaboration ». Ne nous décourageons pas et continuons à oeuvrer dans les files de la résistance.

 

D'Albert Salon :

Au nom des associations que je préside, et de celles dont je suis simple membre (comme M. Charles Durand, signataire du message reproduit ci-après) et qui travaillent en synergie avec les premières, j'appuie la démarche de M. Durand.

Tous, nous vous prions de bien vouloir redonner à la langue française, dans vos publications et colloques, à côté de la langue anglo-américaine et au moins à égalité avec elle, la place qui doit être la sienne.

Nous attendons tous de l'Institut Pasteur, joyau du patrimoine scientifique français, qu'il continue à servir la langue, la culture, le pays, les contribuables, qui l'ont porté et continuent à le faire.

Il y va à la fois du respect de la France, de la formation en français des étudiants français et des pays francophones, et du maintien de la créativité scientifique des savants et chercheurs des pays qui ont le français en partage.

 

Albert Salon, docteur d'État ès lettres, ancien Ambassadeur, Président du FFI-France et d' "Avenir de la langue française".

 

De François LO JACOMO :

Il paraît qu'au CNRS, on recommande aux chercheurs de publier en anglais. Et une amie Directrice de recherches a été quelque peu foudroyée du regard
lorsqu'elle s'est permis de demander si le CNRS était prêt à payer pour la traduction en anglais desdites publications

 

De skirlet :

Le "Journal of the American Medical Association" ("Jama") a lancé officiellement son édition française en ligne. "C'est la première édition en ligne d'un journal médical à comité de lecture de haute portée à être lancée dans une langue autre que l'anglais", se réjouit la publication. Le "Jama" français est mis en ligne en même temps que l'édition anglaise, soit quarante-huit fois par an. Outre la traduction intégrale de l'étude clinique principale (...), de la page du patient et des quiz de FMC, le "Jama" français fournit les résumés de tous les articles publiés dans le "Jama". Un moteur de recherche en français est disponible.
http://jamafr.ama-assn.org/
 

 

Réponse de M. Frédéric Théret de l'Institut Pasteur

 à MM. Durand et Riel (Ils ont reçu la même réponse) :


Institut Pasteur
25 rue du Docteur Roux
75724 Paris Cedex 15
tél. : +33 (0)1 40 61 39 44
fax : +33 (0)1 40 61 30 61
ftheret@pasteur.fr
 

Cher Monsieur,

 

Nous avons bien reçu votre message qui a retenu toute notre attention.

Tout comme vous, nous ne pouvons que regretter que la langue française ne soit pas la langue utilisée dans les publications scientifiques de renommée internationale.

Mais comme vous le savez certainement, 2 600 personnes de 60 nationalités différentes travaillent à l'Institut Pasteur, à Paris. De plus, l'Institut Pasteur c'est également un réseau international qui regroupe 31 Instituts implantés sur les cinq continents. Bon nombre de nos chercheurs ne parlant qu'espagnol, japonais ou anglais, la seule langue pouvant être comprise et parlée par tous, pour des échanges scientifiques fructueux, ne peut être que l'anglais, langue la plus utilisée pour les publications scientifiques reconnues mondialement, même si nous ne pouvons que déplorer cet état de fait.

Mais, comme vous avez pu le constater, notre site <www.pasteur.fr> est bien en langue française.

Sincères salutations,

 

Frédéric Théret, Responsable Dons et Partenariats. Institut Pasteur -
 

Réponse de M. Charles Durand :

Monsieur,

 

Votre réponse est tout à fait conforme à ce que j’attendais et, de toute évidence, ce sujet n’a jamais fait l’objet d’une réflexion sérieuse à l’Institut Pasteur.

J’ai pu lire ou entendre votre argumentation des dizaines de fois et vous ne semblez même pas soupçonner l’existence de démarches intellectuelles remettant totalement en question votre point de vue. Il serait souhaitable que vous en preniez connaissance. Toutefois, je me demande si vous croyez  réellement vous-même au caractère prétendument inévitable de la situation que j’ai dénoncée alors qu’il ne s’agit que d’une conséquence de consignes
strictes émanant des hauts responsables de l’institut avec l’aval des organismes gouvernementaux auxquels vous êtes lié.

Le but de mon précédent message était moins d’obtenir de l’Institut Pasteur un changement de politique linguistique dans ses publications que de
dénoncer le scandale actuel sous la forme d’une lettre ouverte qui est lue et relayée à des dizaines de personnes qui, à leur tour, ne manqueront pas d’éveiller les consciences autour d’elles et de faire pression sur leurs élus afin de changer les choses.

 

Charles Durand
 

Note : J’ai fait un passage de 6 ans dans l’enseignement supérieur français (université de technologie) et un passage de 27 mois à l’Agence universitaire de la francophonie, le bras universitaire du dispositif francophone d’exportation linguistique et culturelle.

Durant ces deux périodes, je n’ai jamais entendu qui que ce soit dire qu’il était interdit de publier en français. Toutefois, des signaux discrets mais puissants sont envoyés à tous les profs et chercheurs qui savent que les seules publications qui comptent doivent être rédigées en anglais, même si personne ne les lira !

On est très loin de l’époque où la valeur d’un article était jugée par son seul contenu ! Très loin du temps où Henri Poincaré publia sa « Dynamique de l’électron » dans l’obscure revue du cercle des mathématiciens de Palerme !

Je pense que la logique qui justifie de publier des articles scientifiques en anglais est aussi fallacieuse, aussi mensongère que celle qui édicte de ratifier le protocole de Londres vis-à-vis des brevets. Dans « La conquête des esprits », Yves Eudes écrit : « Aujourd’hui, ils (les États-Unis) ont atteint un niveau de maîtrise des divers flux d’information et d’idées, qui leur donnent effectivement les moyens concrets d’asseoir leur hégémonie idéologique sur l’ensemble des couches aisées de nombreuses nations, d’y prendre en main l’éducation des nouvelles générations, de s’ingérer dans toutes leurs relations électroniques avec le monde extérieur, de contrôler leur développement scientifique, D’INFLÉCHIR LEUR PRODUCTION INTELLECTUELLE GÉNÉRALE ! »

Surinformation, brouillage de l’essentiel au milieu du babillage pseudo-scientifique généralisé, perte des repères de qualité... Je ne vais pas commettre l’erreur d’accuser les États-Unis de cet état de fait mais il est clair que ces derniers ont créé des conditions favorables à l’émergence d’une telle situation qui désormais s’entretient et se renforce par elle-même.

Et l’Agence universitaire de la francophonie, dans tout ça ? Eh, bien, on y trouve guère mieux car ce département est forcément dominé par des universitaires. On a même eu l’exemple à l’institut que j’ai dirigé pendant 27 mois un directeur qui voulait instituer l’anglais comme langue d’enseignement !

En cela, il suivait la logique qui préside au choix de l’anglais pour les publications, à savoir que, pour être lu, il faut, d’après la doxa du moment, écrire dans « la langue internationale » et, pour avoir davantage d’étudiants à l’institut de la Francophonie pour l’informatique de Hanoï (IFI), il fallait donc faire de l’anglais la langue de travail. Ce directeur, qui m’a immédiatement précédé, a été quand même contraint par l’AUF à la démission au bout de six mois mais il ne faut pas pour cela en conclure que les étudiants de l’IFI travaillent exclusivement en français. Ils travaillent en français à Hanoï mais souvent en anglais
dans les divers « pays francophones » où ils font leur stage, à l’IDIAP de Martigny, en Suisse romande, à l’EPFL de Lausanne, à l’université catholique de Louvain, à Louvain-la-Neuve en Belgique, à l’ESTI ou à l’Eurécom de Sophia-Antipolis, tout près de Nice, à Eurocontrol de Brétigny-sur-Orge, près de Paris... L’AUF me paraît à ce titre un peu similaire à une pièce qu’on viendrait de balayer et où l’on aurait mis toutes les saletés sous les tapis ! Il ne faut pas chercher bien loin pour découvrir les incohérences et les idioties propres à cette agence.

Charles Durand



Réponse de M. Louis Riel :

 

Chère Monsieur,

 

Il est lamentable qu'un francophone, quel qu'il soit, trouve des arguments pour ne pas parler sa langue et il est lamentable de travailler en anglais à Paris, berceau de la langue française et capitale de la Francophonie. 

La position hégémonique de l'anglais est due à la volonté des Anglo-saxons d'imposer partout leur langue, leur culture, leur façon de voir. C'est à nous de résister et de ne pas nous laisser faire.

Refuser ce diktat, c'est se libérer et c'est libérer la Science.

Tout le monde sait que la langue unique, c'est la porte ouverte à la pensée unique et, n'avoir qu'une pensée "unique" lorsqu'on fait de la recherche, je ne pense pas que cela soit la meilleure façon d'accéder aux découvertes.

De plus, à l'heure où l'on parle tant de préserver la diversité biologique pour la survie de la terre, l'on ferait bien aussi de parler de préserver la diversité linguistique du monde pour la survie de la diversité de la pensée humaine. Cela semble pourtant évident, plus il y aura de la diversité dans la pensée humaine, plus nous aurons des chances de trouver des solutions à des problèmes. Car ne l'oublions pas, la pensée est étroitement liée à la langue.

Non à la dictature de l'anglais, vive la langue française.

 

Louis Riel

 

Réponse de M. Vincent Charpentier de l'Institut Pasteur,

à M. Riel :

 

Service de Transfert de Technologie 25 rue du Dr Roux

75 724 Paris Cedex 15 - FRANCE

Tél. : 33 (0)1 45 68 81 87

Fax: 33 (0)1 40 61 37 32

Email (sic) : vcharpen@pasteur.f

 www.pasteur.fr

 

 Cher Monsieur,

J'ai transmis votre mail à notre service communication qui gère cette campagne d'appel aux dons. La recherche est une compétition internationale, et la langue des sciences est l'anglais. L'Institut Pasteur est il responsable de la disparition de la langue française en sciences?

Très Cordialement,

 

Vincent Charpentier Vincent CHARPENTIER, Chargé d'Affaires. Institut Pasteur -
 

 

Réponse de M. Louis Riel :

 

Cher Monsieur,

 

Pour votre information, "Mail" se dit en français "COURRIEL", Journal Officiel du 23 juin 2003. Vous n'êtes pas au courant, je suppose, de cet équivalent.  Cela prouve, s'il le fallait, que la langue française n'est pas la première de vos préoccupations. Pas étonnant alors qu'avec de tels comportements, notre pauvre langue se fasse damer le pion par l'anglais impérial.

Quoi qu'il en soit, l'anglais de partout, c'est le triomphe de la langue unique, et avec elle, bien sûr, de la pensée unique.

Pensée unique lorsque l'on se dit "chercheur", c'est se tirer une balle dans le pied.

Mais votre but n'est-il pas plus d'avoir des subventions que d'avoir du génie dans le génie de votre langue ?

Salutations

Louis Riel

 

 

Ensemble, protestons !

 

 

Boîte à courriels :

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