Faire payer les anglophones
Dans une allocution prononcée le 27 mars à Boulogne-sur-Mer lors des cérémonies
qui ont marqué le centenaire du premier congrès mondial d’espéranto,
tenu en 1905 dans cette ville, M. Claude Piron, ancien traducteur à
l’ONU et à l’OMS, ancien professeur à l’Université de Genève
et auteur de l’ouvrage "Le défi des langues – Du gâchis au
bon sens" (L’Harmattan, 1994), a fait une proposition qui n’est
pas passée inaperçue. Soulignant les avantages considérables que les
anglophones tirent de la position de leur langue dans le monde et l’énorme
charge financière que l’enseignement de l’anglais fait peser sur
les contribuables de plus de 200 pays, il a proposé que les États de
langue anglaise financent, fût-ce en partie, l’enseignement de leur
langue dans le reste du monde. Les heures que, dans les pays non
anglophones, des millions de jeunes consacrent à l’apprentissage de
l’anglais sont disponibles à leurs homologues anglo-saxons pour se
perfectionner en science et en technique : il y a là un manquement aux
règles de la concurrence et au principe de l'égalité des chances. En
outre, les moyens financiers investis dans la formation linguistique ne
débouchent, pour le reste du monde, que sur une position d’infériorité
dans tout échange et toute négociation avec des personnes de langue
anglaise.
Dans la société néolibérale où nous vivons, un avantage se paie. La
Grande-Bretagne encaisse chaque année 700 millions de livres sterling
du fait des séjours linguistiques et le président du British Council
n'a pas hésité à déclarer : « Notre langue nous rapporte plus que
le pétrole de la Mer du Nord ». Il serait juste que les contribuables
de langue anglaise, dispensés par leur seule naissance des
investissements intellectuels et financiers qu’ils imposent au reste
du monde, contribuent au financement de l’effort déployé par tous
les autres peuples pour les rejoindre sur le terrain linguistique. Ne
serait-ce pas une transposition bienvenue du principe du pollueur payeur
?
Cette proposition provocante n’empêche pas son auteur de préconiser
une alternative autrement plus équitable, plus économique et plus
rapide à mettre en oeuvre, qu’il a pu tester et comparer avec
d’autres solutions palliatives durant sa carrière de fonctionnaire
international plurilingue : la langue internationale espéranto.
Cette conférence en espéranto de Claude Piron peut
maintenant être lue sur :
http://satamikarohm.free.fr/article.php3?id_article=637