Sujet : L'anglomanie du Conseil général de l'Aisne
Date : 06/10/2005
De :   Marceau Déchamps (marceau.dechamps@laposte.net)

                   

COMMUNIQUÉ

 

                                                                                            

Un article intitulé « Welcome to Aisne » a paru dans Le Point du 22 septembre 2005. On y apprend que le Conseil général de l´Aisne va dépenser 80 000 euros pour faire parvenir aux 235 000 foyers du département un cédérom d´apprentissage de la langue anglaise. Cela est fait dans l´intention de « prouver que les habitants du département sont accueillants » pour « les nombreux touristes d´Europe du Nord qui traversent le département et pour les Anglais de plus en plus nombreux à y acheter des résidences secondaires ».

 

- S´il s´agit d´accueillir les touristes de l´Europe du Nord, ne faudrait-il pas également promouvoir la pratique élémentaire de l´allemand et du néerlandais dont les locuteurs forment les gros bataillons de touristes en France ?

- Les résidences secondaires sont-elles réservées aux seuls anglophones ? Les résidents étrangers ne doivent-ils pas faire l´effort, eux aussi, d´apprendre la langue française ?

- l'Aisne est-elle devenue une réserve d'indiens, pratiquant un idiome folklorique, à qui il faut apprendre la politesse dans la langue des maîtres ?

Il faut certes que nous disposions en France de compétences linguistiques diverses. Nous devons nous efforcer d'acquérir la maîtrise de langues étrangères dans tous les domaines de notre activité économique. Nous devons le faire en diversifiant nos compétences. Apprenons  l'allemand, l'anglais, le chinois, l'espagnol, le néerlandais, le russe, ...

 

Nous dénonçons cette opération qui fait de l'anglais la lingua franca de l'Europe et du monde en attendant d'en faire la langue unique.

 

Nous dénonçons cette attitude d'asservissement qui bafoue notre identité et la diversité culturelle au nom de considérations mercantiles.

 

Nous observons enfin que l'on peut dépenser régionalement 80 000 euros pour une opération de promotion de l'anglais alors que nos associations obtiennent difficilement, au niveau national,  des sommes largement inférieures pour défendre et promouvoir notre langue en France et à l'étranger.

 

Une lettre reprenant ces arguments a été envoyée par Défense de la langue française  à M. Yves Daudigny, président du conseil général de l'Aisne.

Vous pouvez appuyer cette démarche en envoyant un message à  contact@cg02.fr . Nous vous invitons, bien entendu, à rester courtois dans la fermeté.

 

 

Marceau Déchamps

Vice-président de "Défense de la Langue Française" (DLF)

www.langue-francaise.org

 

 

À partir du 15 octobre, l’Aisne invente l’Aisneglish !

1ère phase : tous les habitants de l’Aisne reçoivent, inséré dans le magazine L’Aisne, un CD d’apprentissage de ces petites phrases de base. Ceux qui souhaitent afficher leur participation à cette grande opération, ont également à leur disposition 4 autocollants estampillés " L’Aisne, it’s open " à coller sur leur fenêtre, leurs vitrines, leur pare-brise… 

 

 

Courriel envoyé par l'A.FRAV :

(Le 06/10/2005)

 

À l'attention de M. le président du Conseil général de l'Aisne, M. Yves Daudigny

 

Monsieur le Président,

 

Nous venons d'apprendre que le Conseil général de l'Aisne vient de lancer une opération intitulée 'Welcome to Aisne".

Nous voudrions vous signaler que cette campagne est avant tout une publicité à l'anglais et qu'elle est assassine pour notre langue, pour la francophonie, pour le respect du plurilinguisme.

À l'heure où l'on parle tant de l'intérêt de préserver la bio-diversité, votre attitude envers l'anglais est une exécution pure et simple de la bio-diversité linguistique.

Elle relève d'un profond irrespect à l'égard des langues de nos voisins européens qui ne sont pas anglophones, elle représente même une discrimination à leur égard.

De plus, jamais dans un pays libre et indépendant, on ne sait permis de mettre en exergue une langue autre que la langue nationale.

Votre campagne pro-anglais est purement scandaleuse et montre combien notre pays est tombé bien bas, comme s'il était sous tutelle angloaméricaine.

Vous devriez avoir honte de Kollaborer à ce tutorat.

Reprenez-vous, nous vous en prions.

 

Colinaro

Pour l'A.FR.AV (www.francophonie-av.com)

 

 

Réponse du Conseil générale de l'Aisne, Mme Pascale Cartegnie

(Le 07/10/2005)

 

Monsieur,

En réponse à votre courrier électronique, nous aimerions vous apporter quelques précisions :

l'idée de faciliter l¹apprentissage de quelques phrases d'anglais pour accueillir le monde entre dans le cadre d¹une campagne de notoriété pour le
département de l'Aisne. C¹est la première fois que l'Aisne communiquera dans la presse nationale et dans le métro parisien.

Lors d'un sondage réalisé auprès des Axonais, 51% d¹entre eux, estimaient que la notoriété de l¹Aisne devait être l¹une des priorités de l'action du
département pour les années à venir. Cette campagne répond à une attente forte des habitants de l'Aisne qui regrettent que leur territoire ne soit
pas mieux connu en France et dans le monde.

Le choix de communiquer différemment s'est imposé. Dans le brouhaha publicitaire ambiant, il n¹existe que deux méthodes pour se faire entendre :
utiliser le matraquage publicitaire, une méthode certes efficace, mais coûteuse, ou bien parler différemment, créer la surprise et obtenir un effet optimal avec un budget raisonnable.

Pourquoi avons-nous fait le choix de communiquer sur l'Aisneglish ? Lorsque un touriste visite un pays, il emporte avec lui un lexique ou dictionnaire
pour être en mesure de trouver son chemin, demander des explications sur tel ou tel site, réserver une table de restaurant. L'idée est de posséder nous
mêmes, habitants de l'Aisne, ce petit lexique pour aller à la rencontre de
l'autre et démontrer notre sens de l'accueil.

Alors, oui, l'anglais. Parce que l¹on peut être défenseur de notre langue française - soyez certains que, sur les différents supports de communication
émis par le Conseil général de l'Aisne nous mettons un point d'honneur à en maîtriser tous les aspects - et admettre que l'anglais est un vecteur de
communication utile lorsque l'on veut s'adresser à un Hollandais, un Italien, un Japonais.

Le premier objectif d'une campagne de notoriété, c'est évidemment qu'elle soit remarquée, et cela semble bien être le cas, puisque, si les choix
créatifs ne font pas l'unanimité, ils ne laissent pas indifférents.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de notre considération distinguée.




Pascale Cartegnie
chargée de communication institutionnelle
pcartegnie@cg02.fr

L'Aisne tout de suite est sur
www.aisne.com


 

 

Réponse de l'A.FRAV :

(Le 11/10/2005)

               

Madame,

 

Vous parlez beaucoup de notoriété dans votre discours, mais qu'est-ce que la notoriété quand on s'abaisse, lorsqu'on est Français,  à parler anglais à un Allemand, un Hollandais, un Italien, un Japonais ?

La particularité de l'Aisne, et plus généralement celle de la France, c'est d'être francophone. Un touriste qui vient chez nous, c'est pour goûter à notre culture, connaître nos particularismes, sentir notre sensibilité. Si vous lui proposez l'anglais au menu , il ira en pays anglophone, aux États-Unis d'Amérique ou en Angleterre, préférant l'original à la copie.

Il faut être polis en essayant de parler la langue de nos hôtes, soit. Mais parler anglais à un Italien qui vient peut-être chez nous apprendre notre langue, ce n'est pas de la politesse, c'est du mépris et du suicide.

Les Français ne veulent pas de l'Europe américaine, alors évitez de contribuer à faire de l'anglo-américain la langue de l'Europe, et, ce faisant, respectez la loi sur le français en France (Loi Toubon), faites vos annonces en aux moins deux langues étrangères. Le mieux serait de les faire en trois langues : allemand, anglais et espagnol.

Cette affaire est bien triste, elle nous montre que nous sommes tombés bien bas.

 

M. J.-P. Colinaro

Pour l'A.FR.AV (www.francophonie-av.com)

   

 

 

 

Réaction de M. Daniel De Poli  :

 

Madame, Monsieur,

 

Je me permets de vous écrire, car j'ai été scandalisé d'apprendre que le Conseil général allait dépenser 80 000 euros pour envoyer un cédérom d'apprentissage de l'anglais à tous les foyers du département. En effet, quand les Français vont-ils enfin sortir de leur torpeur et comprendre les effets néfastes de l'anglais pour notre pays ?

 

Ces effets ne sont malheureusement plus à prouver et ont été mis en évidence même par des auteurs anglo-saxons : pillage de la recherche française par les Américains, dû à l'anglomanie de nos chercheurs, discriminations des institutions européennes qui recherchent des collaborateurs « anglais langue maternelle », excluant de fait les Français, affaiblissement de la francophonie par l'emploi de l'anglais de la part de certaines « élites » françaises, etc.

 

Je vous communique ci-après deux textes qui montrent les dangers de l'anglais pour nos intérêts nationaux :

 

« Le français, une langue pour la science » (texte excellent à imprimer et à lire afin de comprendre comment notre recherche est pillée par les Américains du fait de l'emploi de l'anglais par nos chercheurs) :
http://www.imperatif-francais.org/articles/argumentaire.html

 

« English mother tongue » (ou comment utiliser l'anglais comme outil de discrimination ethnique à l'embauche dans les institutions européennes) :

 

Enfin, le texte suivant montre que l'enseignement généralisé de l'anglais dans un pays s'apparente à une mainmise néo-coloniale :

 

Je trouve donc scandaleux qu'un organisme public français fasse la promotion de cette langue néo-coloniale, alors que, dans le même temps, les associations de défense du français en France doivent constamment se battre pour obtenir de maigres crédits. De plus, il est très douteux que l'apprentissage de quelques bribes d'anglais par les habitants de l'Aisne aient un quelconque effet sur le tourisme.

 

Pour conclure, je pense que cette opération est vraiment malvenue et est clairement contraire aux intérêts de la France. Comment les touristes visitant l'Aisne auraient-ils envie d'y revenir ou d'apprendre le français si on leur parle anglais ? On préfère toujours l'original à la copie et autant aller visiter des pays anglophones. Ce genre d'opération fait partie des innombrables renoncements des Français face à l'anglais, renoncements qui sont d'ailleurs très mal vus au Québec, où le français est fortement défendu, ce qui n'est vraiment pas le cas en France, où les Français adoptent de véritables attitudes de colonisés.

 

 

M. Daniel De Poli

 

 

 

Réaction de Mme Brigitte Laval  :

(Le 21/10/2005)

 Madame,

Je lis votre courriel adressé à l'A.FR.AV., et je suis attristée de voir votre comportement de soumission envers la langue de la première puissance mondiale.

Accueillir les touristes étrangers dans leur langue natale est une bonne chose, un signe évident de convivialité.

Oui, mais dans leur langue, c'est à dire en allemand pour l'Allemand, en néerlandais pour le Hollandais, en espagnol pour l'Espagnol, etc.

De plus, vous prenez comme exemple un touriste italien. Avez vous déjà eu la curiosité de parcourir un texte en italien ? Même si vous ne l'avez jamais appris, vous en comprendrez environ 50 % et souvent le sens général.

Cela est dû à l'intercompréhension entre langues latines. C'est valable dans l'autre sens.

Alors, quelle bêtise d'accueillir nos amis transalpins en anglais, langue germanique. Alors qu'en s'adressant à lui en français parlé lentement, il vous comprendrait assez bien et ferait ainsi de considérables acquisitions dans notre langue (et nous dans la nôtre).

Si vous me répondez (j'en doute, hélas), vous me direz que ce touriste a sûrement des connaissances en anglais. Bien sûr, tout comme nous, un citoyen scolarisé a le droit un jour ou l'autre à des cours d'anglais obligatoires !

Moi, Madame, je défends la diversité culturelle et l'égalité de toutes nos langues européennes. Alors, un CD m'apprenant des phrases utiles dans toutes nos langues voisines, oui !

Un CD outil de "colonisation", NON !

Je suis Francilienne, mais si j'étais habitante de l'Aisne, je me serais rendue à ma mairie rendre immédiatement ce support.

De plus, 80 000 euros, c'est une énorme somme, qui n'est hélas pas à la disposition des défenseurs du plurilinguisme et encore moins à celle de la vraie langue internationale, langue d'union idéale pourtant pour les peuples européens, l'espéranto !

 

Sincères salutations

 

Mme Brigitte Laval (Val de Marne)