Sujet :

Le déficit stratégique français en matière de brevets

Date :

14/01/2009

Envoi d'Aleks Kadar  (courriel : alekska(chez)gmail.com)     

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Pas mal cet article !  Il n'a pas l'air de soutenir le Protocole de Londres, ratifié par la France, alors que plusieurs pays européens importants ne l'ont pas fait.

La nomination d'un Français à la tête de l'OEB est-elle un signe positif pour la France et le français ou un artifice inutile, comme l'est la présence de Français à la tête de la BCE, de l'OMC et du FMI ?

AK

 

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Intelligence économique

Le déficit stratégique français en matière de brevets

 

Les étudiants de l'École de Guerre Économique ont réalisé récemment une étude sur les stratégies de puissance dans le domaine du dépôt de brevets industriels. Cette étude qui couvre l'ensemble des pays industrialisés ainsi que de nombreuses économies émergentes, démontre que la France perd du terrain par rapport aux pays les plus offensifs. Distancée de manière récurrente par les États-Unis, le Japon, l'Allemagne, elle est aussi rattrapée par des économies telles que la Corée du Sud et la Chine. C'est d'ailleurs ce que confirme le tableau de bord européen de l'innovation (TBEI[1])  paru en 2007 qui faisait état d'une perte de l'excellence française au niveau européen.

Dans le contexte économique actuel, le brevet n'est pas un simple moyen de protection juridique mais est utilisé par certains pays comme un levier destiné à accroître leur puissance économique dans un secteur déterminé. Il existe en effet différents types de stratégies dites offensives comme par exemple le dépôt massif de brevets visant à constituer un « maquis de brevets » qui bloque les concurrents et les empêche de développer leurs innovations. Rappelons à ce propos la réaction des entreprises américaines de la Silicon Valley qui, à la fin des années 70, se sont mises à breveter leurs inventions pour contrer la « pratique du jeu de go »  initiée par certaines entreprises japonaises dans la volonté d'occuper une position concurrentielle dominante dans les nouvelles technologies.

Conscient des risques de décrochage technologique, les autorités françaises ont entrepris des réformes dans l'organisation de la recherche (réforme du CNRS et des universités). La succession de lois d'organisation témoigne d'une volonté de modifier le système dans un souci d'efficience : loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche, loi de programme du 18 avril 2006 pour la recherche,  loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.

À ces textes de lois s'ajoute la mise en place de nouveaux organes décisionnels comme le Haut conseil de la science et de la technologie, la direction générale de la recherche et de l'innovation et la direction régionale de la recherche et de l'innovation). Mais cette multiplication de structures se révèle être plutôt un handicap en raison de l'absence de vision globale sur la stratégie à mettre en œuvre pour conforter la position de l'économie française sur la scène internationale.

Dans l'affrontement économique qui se joue de plus en plus entre Etats conquérants, la France n'a pas à proprement parler de stratégie de propriété intellectuelle. Un noyau de grands groupes industriels très performants est à l'origine de la majorité des dépôts de brevets. Ceux-ci font  usage d'une stratégie de brevets en ayant, non pas une vision globale des marchés, mais en se focalisant sur leurs propres besoins et secteurs d'activité.

La culture du brevet n'est pas développée dans la majorité des PME-PMI. Les mesures incitatives de l'Etat sont insuffisantes pour sensibiliser les entrepreneurs privés et créer un « réflexe-brevet ». Par ailleurs, un consensus national en matière de propriété industrielle apparaît comme une étape, au  combien nécessaire, au développement d'une politique industrielle permettant au pays de tenir son rang dans la compétition industrielle internationale. Dans un autre ordre d'idées, l'Etat ne dispose pas non plus de stratégie pour « cadrer » l'encouragement à l'innovation au niveau des salariés des PME.

Une absence d'incitation pour les inventeurs salariés
 

Si l'on se penche sur les réglementations de la rémunération des inventeurs salariés, celle-ci a été encadrée par un texte de loi (loi du 26 novembre 1990 - article L. 611-7 CPI) qui rend obligatoire le versement par l'entreprise d'une rétribution financière spécifique aux inventeurs salariés, seulement le montant de la rémunération n'a pas été fixé par le texte. En 2008, un tiers des répondants à une enquête de l'Observatoire de la Propriété Intellectuelle [3] ne disposent pas de système de rémunération des inventeurs salariés.

La signature par la France du Protocole de Londres reste aussi un élément de polémique sur la question de l'usage linguistique en termes de préservation de puissance. Le Protocole de Londres prévoit la simplification du régime linguistique des brevets en Europe. Cela signifie que la France renonce à l'exigence de traduction intégrale en français des brevets européens rédigés en anglais ou en allemand. Les pays signataires du Protocole qui ont prescrit une langue ont tous choisi l'anglais. Ce protocole marque le recul de la pratique du français comme langue utilisée par les déposants de brevets européens, seuls les pays francophones continueront à déposer des brevets en français.

Selon Jacques Legendre, ex-rapporteur au Sénat de la loi Toubon de 1994, ce protocole « scelle de facto l'hégémonie de la langue anglaise dans le domaine de l'innovation technologique et de la recherche au sein de l'Union européenne » . Plusieurs pays européens ont compris la menace que représentait le protocole de Londres et ont refusé de le ratifier. Ils continueront d'exiger une traduction obligatoire des brevets européens dans leur langue nationale. C'est le cas de l'Autriche, l'Espagne, l'Italie, la Finlande, le Portugal, la Pologne, l'Irlande, la Belgique ou encore la Grèce.

L'objectif de départ du Protocole de Londres, réduire les frais de traduction, ne sera donc même pas atteint car il faudra toujours traduire dans les langues de ces États qui n'ont pas ratifié l'accord. Toutefois, la désignation de Benoît Battistelli, directeur général de l'INPI, pour présider le conseil d'administration de l'OEB jusqu'en 2012 est présenté comme un signe fort pour la France. Son mandat couvrira une période charnière car il devra se charger de l'entrée en vigueur dès 2013 de systèmes de protection de la propriété intellectuelle harmonisés prévus par les accords signés dans le cadre de l'OMC et reprendre le chantier du brevet communautaire. Notons à ce propos que la présence de Français à des postes importants d'organisations  internationales tels que Pascal Lamy à la tête de l'OMC ou Dominique Strauss-Kahn à la direction du Fonds Monétaire International, ne bouleverse guère les stratégies des pays conquérants.

Il semble aussi évident que la recherche scientifique publique française ne joue pas suffisamment un rôle moteur dans la définition d'une politique de puissance dans ce domaine. La passivité des chercheurs du CNRS a déjà abouti à un résultat négatif. Avant la seconde guerre mondiale, la France était en pointe à un niveau mondial dans le processus de valorisation de la recherche scientifique. Ce n'est plus le cas car ce processus est désormais dominé par les États-Unis et le monde anglo-saxon (articles en anglais, contrôle des revues scientifiques les plus cotées, valorisation de la réputation des carrières universitaires). À partir du moment où des pays industrialisés utilisent la recherche comme un instrument de pilotage de leur accroissement de puissance, il est difficile de faire l'impasse sur cette réalité en se réfugiant derrière des critères  idéologiques ou en refusant d'émettre un avis d'une finalité humaniste de la science.

@ Rédaction L'Usine Nouvelle

Christian Harbulot
Directeur de l'École de Guerre
Économique (ESLSCA Paris)
Directeur du cabinet Spin Partners





[1] Source : http://www.proinno-europe.eu/index.cfm?fuseaction=page.display&topicID=275&parentID=51
[2] Source : Observatoire de la Propriété Intellectuelle - INPI, Enquête sur la rémunération des inventeurs salariés, 2008
[3] http://www.euractiv.fr/la-france-et-lue/article/recul-pratique-langue-francaise-grand-sujet-inquietude-francophonie-000834

 

 

 Source : usinenouvelle.com, le 13 janvier 2009

http://www.usinenouvelle.com/article/le-deficit-strategique-francais-en-matiere-de-brevets.155673

 

 

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Pour mémoire, qui donc poussait à la roue pour l'adoption du Protocole de Londres ? ...


- Le MEDEF, Vice-président : Guillaume Sarkozy


- Une poignée de sociétés françaises spécialisées dans le génie génétique, ayant tiré un trait sur le français, et délocalisant leurs laboratoires et leurs intérêts aux États-Unis. Représentant : le Dr François Sarkozy


- Derrière tout cela, quelques fonds d'investissements américains spécialisés, représentés par ... Olivier (pardon, Oliver) ... Sarkozy...


Fermez le ban !

 

Denis Griesmar

 

 

 

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