Sujet :

Les Français masochistes par rapport à l'anglais

Date :

03/09/2009

Envoi d'Aleks Kadar  (courriel : alekska(chez)gmail.com)  

Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez « chez » par « @ ».

 

Toujours sur le même thème « nuls en anglais », un article et des commentaires particulièrement affligeants, qui nous déçoivent venant d'un quotidien économique comme Les Échos.

J'ai envoyé un commentaire, en plusieurs parties, car la limite est de 1000 caractères par commentaire.
AK
 

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Analphabètes en anglais

 

Chacun sait que les étudiants du monde entier qui souhaitent s'inscrire dans une université anglo-saxonne doivent subir le test TOEFL, qui mesure leur niveau en anglais. On vient de connaître les résultats globaux pour 2008. Les étudiants de 109 pays ont concouru et les Français atteignent, en moyenne, la 69  place, au même niveau que les étudiants bulgares. À quoi est dû ce résultat calamiteux ? L'Éducation nationale se terrant dans un silence gêné, risquons trois explications après avoir éliminé la pétition ridicule selon laquelle les Français ne seraient pas doués pour les langues.

Première idée : les Français se croient encore au XVIII siècle, lorsque Voltaire parlait sa langue natale à la cour de Suède ou de Pologne. Deuxième idée, proche de la première : certains défenseurs de la francophonie pensent que le meilleur moyen de défendre notre langue, c'est d'ignorer l'anglais. Suggérons-leur de réfléchir à la dégradation simultanée de l'usage de leur langue natale par les Français et de l'usage de l'anglais. Troisième idée, sans doute la plus solide : l'anglais est enseigné trop tard dans le cursus scolaire. L'expérience prouve que la capacité d'assimilation d'une deuxième langue par les enfants est beaucoup plus grande à l'école primaire, voire dès la maternelle. C'est d'ailleurs ainsi que pratiquent tous les pays, par exemple en Scandinavie, qui ont compris que le bilinguisme est une condition absolue de réussite dans le monde actuel. Mais, pour suivre leur exemple, encore faudrait-il convaincre l'appareil éducatif, à commencer par les syndicats d'enseignants, de la faillite à peu près complète du système de grand-papa et leur ordonner gentiment d'exercer en CP et non quand c'est devenu trop tard.

On objectera que ces chères petites têtes blondes ne parviennent déjà pas à bien parler le français ; alors l'anglais, vous rêvez ! Non, on ne rêve pas. Il est aberrant que la France, 5 ou 6 puissance économique traîne à la 69 place, à l'aune de l'un des critères les plus décisifs pour tenir son rang dans la compétition future. Que dirait-on si nous étions 69 en maths ? Ce serait une honte nationale et l'on exigerait une réforme radicale. Il est grand temps de réagir de même vis-à-vis de la langue des échanges internationaux et de comprendre qu'être analphabète dans le monde actuel, ce n'est pas seulement ne savoir ni lire ni écrire sa langue maternelle, c'est aussi être nul en anglais.

Favilla

 

 

Source : lesechos.fr, le 1er septembre 2009

http://www.lesechos.fr/journal20090901/lec1_idees/020118822314.htm

Possibilité de réagir à cet article après inscription au : http://commentaires.lesechos.fr/commenter.php?id=020118822314

 

 

Réactions et commentaires d'Aleks :

 

Ignorants en économie et en géopolitique des langues
 

Chacun devrait savoir, à la lecture de ce billet et des commentaires, que les Français font partie des peuples les plus masochistes en ce qui concerne leur niveau en langue (au singulier). Leur niveau dans ce qu'ils pensent être LA langue mondiale.

Plusieurs remarques s'imposent :

* Il est totalement faux de pointer le prétendu raisonnement des défenseurs du français.

Ceux qui élaborent la politique linguistique à l'Éducation nationale ne sont pas membres de DLF ! D'ailleurs, même les dirigeants de DLF sont d'accord avec l'objectif européen hypocrite d'apprendre 2 langues étrangères.

* L'anglais enseigné trop tard ?

Commencer à 6 ans ou 7 ans, c'est trop tard pour vous ? Allez, imposez des stages d'anglais aux fœtus, je ne vois que ça comme solution pour vous satisfaire !

* Objectif bilingue ?

Vous oubliez que l'objectif de l'Éducation nationale n'est en aucun cas de produire des petits bilingues ! C'est hors de portée de l'école. On ne devient bilingue que si on a des parents de langues étrangères différentes, ou si on baigne dans un environnement totalement allophone à longueur de journée, ou si on est exposé à haute dose à l'anglais, comme dans les pays nordiques. Et tout ça,
pour quel résultat ?

* L'anglais n'est qu'une des 6 000 langues du monde.

Si vous voulez vendre dans un pays non- anglo-saxon où vos interlocuteurs baragouinent aussi mal que vous le broken English,
mieux vaut encore apprendre la langue du pays. Pensez un peu géopolitique des langues : dans quelques années, le PIB
de la Chine rattrapera celui des États-Unis. Apprendre le mandarin, l'espagnol, le portugais (Brésil), le russe, l'allemand : autant d'investissements qui pourront s'avérer plus rentables que d'enrichir le Wall Street Institute, Telelangue, l'entreprise anglo-saxonne privée qui organise les TOEFL, TOEIC, etc.

* Économie des langues

Incroyable que dans un quotidien économique, on ne parle pas un mot d'économie des langues. Pourquoi accepter sans mot dire de financer directement les économies britanniques et étatsuniennes, de leur accorder un tel avantage concurrentiel en acceptant sans condition que leur langue soit LA langue internationale, que les anglophones natifs n'ont pas d'efforts à faire en apprentissage de langues, que toute la charge d'apprentissage doive reposer sur les 92 % de la population mondiale pas née dans un pays anglophone ?

Pourquoi faire ce cadeau à Gordon Brown, au Royaume-Uni, qui reçoit déjà 17 milliards d'euros par an grâce à l'hégémonie de l'anglais en Europea?

* Lien imaginaire réussite économique-anglais

Toute cette histoire d'handicap repose sur l'axiome totalement dépourvu de fondement que la réussite économique dépend de la compétence en anglais. Comment alors expliquer la croissance exponentielle de la Chine ? La place de l'Italie, de l'Allemagne dans les 7 puissances commerciales du monde ? Enviez-vous l'Inde, qui a été pendant des décennies une colonie britannique ? Est-ce votre ambition : devenir une néo-colonie ?

Comment expliquer cet aveuglement national en ce qui concerne l'anglais ? Mieux que les religions, il semble que l'on se soit trouvé en l'anglais un nouvel opium, un Graal absolu secret de la réussite. Mais au fait, pourquoi le Royaume-Uni n'est-il pas la première puissance commerciale en Europe, si le secret de la réussite est l'anglais ? Pourquoi la France est-elle l'une des premières puissances commerciales du monde, malgré cette place reculée dans le classement de ce test, qui quoi qu'on en dise reste le produit d'une entreprise privée ! N'y a-t-il pas contradiction ?

L'anglais n'est pas une discipline olympique ! Pensez-vous aussi que nos mauvais résultats aux JO soient liés à un faible niveau d'anglais ?

Va-t-on bientôt se vanter d'être dans les premiers consommateurs de Coca-Cola, de McDonald's ?

Halte à l'auto-colonisation des esprits !
 

 

 

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