Voici deux textes édifiants et émouvants qui nous ont été transmis par notre camarade, Marie-Mance Vallée, et qui portent la signature d'un Patriote, Chevalier de Lorimier, exécuté en février 1839 pour avoir défendu notre liberté et notre dignité. Où en sommes-nous de nos jours ? Sommes-nous dignes, ou indignes, de ce grand patriote? Que chacun réponde pour lui-même ! Salve ! Gaston Laurion
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Prison de Montréal
« Le crime fait la honte et non pas l’échafaud.
»
Des hommes d’un mérite supérieur au mien m’ont déjà
battu la triste carrière qui me reste à courir de la prison
obscure au gibet. Pauvres enfants ! Vous n’aurez plus
qu’une mère tendre et désolée pour soutien (et) si ma
mort et mes sacrifices vous réduisent à l’indigence,
demandez quelques fois en mon nom, je ne fus pas insensible
aux malheurs de l’infortune.
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Lettre
à une amie Lettre écrite par de Lorimier, le jour de son exécution,
à une dame qui lui avait demandé d’écrire dans son album
quelques lignes qu’elle garderait comme souvenir.
Vous
voulez, madame, que j’écrive un mot dans votre album. Que
puis-je écrire, je vous le demande ? Vais-je abandonner
mon âme à des sentiments de regret, à de tristes pensées ?
Vous diriez que ces sentiments ne sont pas dignes d’un homme
qui meurt pour la liberté de son pays. Vous dirai-je, pour
vous attendrir, tout ce que j’ai souffert dans mon cachot
depuis que je suis tombé dans les mains de mes cruels ennemis ?
Ce
serait, comme je viens de le dire, peu digne de la position
que j’occupe devant le monde. Vous m’avez visité dans ces
noirs cachots où les rayons du soleil sont inconnus aux
pauvres victimes de la tyrannie anglaise. Il n’est pas nécessaire
de parler ni d’écrire, pour faire comprendre l’état le
plus misérable auquel la nature humaine puisse être réduite.
Vous
dirai-je tout le respect que j’ai pour vous, quand vous en
avez
Dans
quatre heures,
je
mourrai sur l’échafaud érigé par les ennemis de notre chère
patrie.
Oh ! quels mots enchanteurs je viens de prononcer !
— «aMa patrie !
», ma patrie ! À toi,
j’offre mon sang comme le plus grand et le dernier des
sacrifices que je puisse faire pour te délivrer du joug
odieux de tes traîtres ennemis. Puisse le Tout-Puissant agréer
mon sanglant sacrifice ! Vous verrez des jours meilleurs.
Cette
conviction intime et l’espoir que vous, madame, votre mari
et tous mes amis, penserez quelquefois à moi, quand je ne
serai plus, seront pour moi une source de consolation et de
force dans les dernières tortures de l’agonie.
La
grande cause pour laquelle je suis à la veille de souffrir,
triomphera.
Adieu,
madame ! Soyez heureuse, ainsi que votre mari, vous le méritez
tous deux. C’est le vœu d’un homme qui dans quelques
heures aura sacrifié sa vie
Votre
malheureux, mais sincère ami,
CHEVALIER
DE LORIMIER.
Source :
Les Patriotes 1837-1838 de Laurent Oliver David, P 284, 285, J
Frenette Éditeur Inc. 1981. |
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