Sujet :

L'anglais intensif au Primaire 

Date :

30/07/2003

De Jacques Poisson  (courriel : jjlp@sympatico.ca)

L'anglais intensif au Primaire : attention danger !

En 1976, apparaît enfin la Charte de la langue française du Québec. La même année, drôle de coïncidence, surgissent les classes d'anglais intensif au primaire. On décide d'amputer le français pendant la moitié de l'année et de le remplacer par l'immersion anglaise. Les familles des élèves sont encouragées à reproduire chez elles un milieu culturel anglophone comme le fait leur école francophone « bilingue ».

C'est à la commission scolaire des Mille-Îles que revient le douteux honneur d'inaugurer cette amputation du français qui fait maintenant fureur à travers le Québec. McGill University et Concordia University, amis reconnus du français, délèguent Patsy M. Lighborn, Leila Ranta, Randall Halter et compagnie pour superviser cette expérience culturelle singulière compte tenu de l'identité naturellement fragile des tout jeunes de 9,10 ou 11 ans.

Selon un bilan préparé par Wynanne Watts et Sandra Snow au nom de la Société pour la promotion de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, au Québec (SPEAQ), rien ne peut améliorer le français comme son amputation. Amputer le français pendant cinq mois en 4e, 5e et/ou 6e année du primaire «aouvre une fenêtre sur le monde » et produit de « meilleurs apprentissages en mathématiques et en français ». (D'après INTENSIG, page 12,1993, et L'enseignement intensif de l'anglais, page 47, 1991, par SPEAQ.) II y a de quoi être éberlué. Demander à l'industrie du tabac de faire une étude sur le tabagisme donnerait le même genre de conclusion.

Pendant ce temps, en Grande-Bretagne, en Suède, en Suisse, aux États-Unis et ailleurs, l'on analyse sérieusement les avantages et les inconvénients de l'enseignement précoce d'une langue seconde.

Voici les conclusions d'une étude suisse, très sérieuse celle-là, décrite par madame Marie-France Vouilloz Burnier, docteure ès Sciences de l'Éducation de l'Université de Genève. (Merkt, G., Immersion : une autre forme d'enseignement - apprentissage des langues vivantes. Neuchâtel, Documents de l'IRDP, l993.)

1. En contexte minoritaire, « vouloir développer chez les élèves des compétences linguistiques proches de celles des bilingues, sans pourtant entraîner de diminution de la maîtrise de la langue maternelle n'est-ce pas réelle utopie ou réelle hypocrisie ? »

2. En contexte minoritaire, « plus le locuteur est jeune et plus les facteurs socioculturels sont déterminants, plus la langue seconde a tendance à se substituer à la première ».

3. En contexte minoritaire, « seuls les individus disposant d'un réseau culturel et d'une conscience aiguë de l'enjeu que constitue la maîtrise des langues ont des chances de sortir gagnant ».

4. « II apparaît donc essentiel de mesurer le statut de la langue immergeante et celui de la langue immergée. »

5. II est « essentiel de maîtriser d'abord les structures de la langue maternelle pour réussir à bien saisir les structures de la langue seconde » et ne pas confondre les unes avec les autres.

6. « L'imposition de la langue seconde avant que les premières structures de la langue maternelle soient mises en place signifie souvent le début de problèmes scolaires difficilement surmontables. »

7. Pour que le bilinguisme ne devienne pas un « pot-pourri insipide », il faut «posséder en premier lieu sa culture et sa propre langue. Sans cela, nous ne serions que des apatrides culturels. »

Le Mouvement estrien pour le français réitère sa demande au ministre de l'Éducation du Québec pour qu'il décrète un moratoire sur cette amputation du français au primaire. S'inspirant des autres pays comme la Suisse et aussi la Grande-Bretagne (qui, pendant 10 ans, a mené, auprès de 18 000 élèves, une vaste étude sur l'apprentissage précoce de la langue seconde - le français - dans une contexte majoritaire en plus, et dont le rapport- choc produit  par la "National Foundation for Education Research in England and Wales", sous la responsabilité de Stern, Burstall et Harley, montre qu'il est inutile et contre-indiqué d'apprendre une langue seconde au primaire) qu'il commande une étude exhaustive et crédible sur l'enseignement de l'anglais au Québec, particulièrement dans nos écoles primaires. En raison de notre contexte minoritaire, il serait sans doute important d'en déterminer les impacts sur la qualité de la langue maternelle utilisée par les élèves et sur la perception générale qu'ils ont de leur langue.

 

Courriel du ministre de l'Éducation du Québec : ministre@meq.gouv.qc.ca

Voir aussi : Mouvement estrien pour le français  

 

 

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