Sujet :

Contre la Charte des langues régionales

Date :

20/01/2014

Du M'PEP - Mouvement Politique d'Émancipation Populaire (courriel : contact(chez)m-pep.org )  

Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez « chez » par « @ ».

Contre la Charte des langues régionales.

Par Françoise Morvan, écrivaine et chercheuse, texte publié par la fédération de Paris du Mouvement politique d’émancipation populaire (M’PEP).

Le 19 janvier 2014.

 

 

Europe des ethno-régions Dans la foulée du « Pacte d’avenir pour la Bretagne », le gouvernement Ayrault s’apprête, pour satisfaire aux revendications des autonomistes qui se sont engouffrés dans le mouvement des Bonnets rouges, à faire ratifier la charte européenne des langues régionales et minoritaires. Pourtant François Hollande avait renoncé à le faire en mars 2013. Cette volte-face avait été jugée salutaire par l’écrivaine, traductrice et chercheuse Françoise Morvan, pour qui cette charte « ne vise pas à défendre des langues minoritaires, mais les langues de groupes ethniques, sur une base foncièrement raciste ». Démonstration.

Comme le serpent de mer, la Charte, la fameuse « charte européenne des langues régionales ou minoritaires », émerge et crie pour qu’on la ratifie. Hélas, nouveau coup sur la tête, le président Hollande, faisant fi de ses engagements de campagne, remet aux calendes grecques la ratification. Le fait-il parce que la charte est un monstre en regard des valeurs républicaines qu’il est supposé défendre et s’en explique-t-il ? Non, il se défausse sur un avis négatif du Conseil d’État. Quel avis ? À quoi bon le savoir ? Enfin des explications claires sur la charte ? Jamais !

Et voilà les autonomistes associés aux militants d’Europe-Écologie-les-Verts et relayés par des élus socialistes en quête de voix identitaires, repartis à protester : ne pas ratifier la charte, c’est s’acharner contre les pauvres « langues régionales minorisées », poursuivre le « génocide linguistique commis par l’État jacobin » et trahir les valeurs promues par l’Europe si soucieuse du bien-être de ses populations, comme on peut le constater chaque jour…

Face au fatras propagandistique, les informations objectives sur cette charte sont systématiquement étouffées. Il y a pourtant eu des travaux sur ses origines, sur ses enjeux véritables et ses conséquences, mais tous se perdent dans le confusionnisme irénique entretenu à son sujet. Qu’on interroge le premier venu, il vous dira que la charte doit être ratifiée car le breton, le basque et le corse sont des langues qu’il faut défendre : elles font la richesse du patrimoine français symbole de la diversité culturelle. Répondez que la charte ne vise pas à défendre des langues minoritaires mais les langues de groupes ethniques, sur une base foncièrement raciste, l’interlocuteur ouvre de grands yeux. Mais voit-il pour autant ? Non, puisque tout l’incite à croire aveuglément. Et néanmoins… (retour)

 

L’origine de la charte : le groupe des ethnicistes européens

Le germaniste Lionel Boissou s’est donné beaucoup de mal pour exposer l’histoire de la FUEV (Föderalistische Union Europäischer Volksgruppen), encore dite UFCE (Union Fédéraliste des Communautés Ethniques Européennes), qui a concocté la charte. Il a montré que ce puissant groupe de pression s’inscrivait directement dans la suite des « Congrès des nationalités » mis en place par les réseaux pangermanistes allemands et que leur organe, Nation und Staat, suspendu en 1944 pour cause de nazisme, avait donné lieu à Europa ethnica, la revue de la FUEV reprenant la même numérotation.

La FUEV, fondée en 1949 et présidée par l’autonomiste Joseph Martray, puis par le séparatiste breton Pierre Lemoine, a été réactivée dans les années 90 par le gouvernement allemand, renouant avec le pangermanisme, et reçoit aussi des subsides de la fondation Niermann, créée en 1977 à Düsseldorf dans le but « d’aider les minorités ethniques à préserver leur existence biologique et culturelle, en particulier le Volkstum allemand » (le « Volkstum », autrement dit « l’esprit de la race »). Or, la FUEV, ayant obtenu statut consultatif aux Nations Unies et au Conseil de l’Europe, a fondé un « groupe de travail » qui a pour objectif la « protection des groupes ethniques ». C’est ce groupe qui a rédigé la charte européenne des langues régionales et minoritaires, le Conseil de l’Europe se chargeant de la promouvoir. (retour)

 

Les enjeux de la charte

Une autre germaniste, Yvonne Bollmann [1], s’est, elle aussi, donné beaucoup de mal pour analyser les véritables enjeux de la charte.
Elle a mis en lumière le fait, constamment passé sous silence, que la FUEV n’entend nullement défendre des langues minoritaires mais des langues de minorités ethniques rattachables au sol du pays signataire : l’article 1 le précise bien, la Charte « n’inclut ni les dialectes de la (des) langue(s) officielle(s) de l’État ni les langues des migrants » [le texte de la charte est ici. Sur cette base, l’arabe n’est pas une langue minoritaire ; le breton, langue d’une ethnie celte, ou supposée telle, est défendable mais non le gallo, dialecte français parlé en Haute-Bretagne…

Elle a également démontré que la charte fait partie de tout un dispositif pensé dès l’origine comme une arme de guerre contre les États-nations (et en premier lieu la France) par les partisans d’une Europe des ethnies. Le complément de la Charte, la Convention-cadre pour la protection des minorités, a été adoptée de la même manière et est entrée en vigueur en 1998. Cette convention s’accompagne elle-même de chartes et conventions diverses visant à « dégager le substrat ethnique de sa gangue étatique [2]. » (retour)

 

Un dispositif verrouillé

En revanche, le juriste mandaté par Lionel Jospin pour examiner si la charte était ratifiable n’a pas dû passer bien longtemps à la scruter : d’après lui, pas de problème ; la charte est non seulement ratifiable, mais modulable à souhait ; il suffit d’y joindre une déclaration interprétative et de faire la liste des articles qui plaisent. Le texte contraint le signataire à choisir au moins 35 de ses 98 articles : la France en retient 39 et, la liste faite, signée.

Cette liste n’est qu’une plaisanterie. La charte est hermétiquement verrouillée. En effet, l’article 21 précise qu’elle « interdit toute réserve, sauf pour les paragraphes 2 à 5 de l’article 7 » (paragraphes qui ne portent que sur des points de détail).

Lorsque Bernard Poignant (Le Télégramme, 18 septembre 2007) rappelle que la France a assorti la signature le 7 mai 1999 de deux déclarations (pas de droits particuliers à un groupe ; pas d’usage dans la vie publique), il fait comme si cette clause était juridiquement valable. Elle ne l’est pas. Le préambule pose, sans réserve possible, que « le droit de pratiquer une langue régionale ou minoritaire dans la vie privée et publique constitue un droit imprescriptible ». (retour)

 

Les conséquences de la Charte

Une fois la Charte ratifiée, tout locuteur d’une langue minoritaire reconnue comme telle par le pays signataire sera en droit de saisir la Cour européenne des droits de l’homme pour se faire traduire les textes de loi et bénéficier de documents administratifs dans sa langue.

Du fait que la Charte ne reconnaît que des langues de minorités linguistiques, les dialectes français ne devraient pas être reconnus : en vue de contourner ce dispositif, Lionel Jospin a chargé un linguiste (jusqu’alors surtout connu comme médiéviste) de déterminer les langues parlées sur le territoire national.

Or, alors que la plupart des États ont fait en sorte de reconnaître le moins grand nombre possible de langues minoritaires (ainsi l’Allemagne, qui refuse de reconnaître officiellement tout problème de « minorités nationales » à l’intérieur de ses frontières, a-t-elle refusé de reconnaître le yiddish et le turc, pourtant parlés par deux millions de personnes — décision d’ailleurs conforme aux dispositions de la charte qui ne reconnaît pas les langues des « migrants »), ce linguiste a retenu 75 langues allant du bourguignon-morvandiau aux langues de Nouvelle-Calédonie (nyelâyu, kumak, caac, yuaga, jawe, nemi, fwâi, pije, pwaamei, pwapwâ, cèmuhî, paicî, ajië, arhâ, arhö, ôrôwe, neku, sîchë, tîrî, xârâcùù, xârâgùrè, drubéa, numèè) en passant par l’arabe dialectal et le berbère (mais pas le portugais) [lire ici son rapport].

Au moment où l’État procède à des coupes budgétaires drastiques, et où l’enseignement des langues, à l’exception de l’anglais, de l’espagnol et de l’allemand, est sinistré, ratifier la charte reviendrait à verser des prébendes à des militants de toutes obédiences empressés d’exiger la traduction des textes officiels dans leur idiome. C’est d’ailleurs bien ce qu’ils attendent… Et c’est ce que Robert Badinter a très tôt rappelé, constatant que ce « serait donner un fondement légal, sur la base d’une convention internationale, à la revendication collective des régionalistes les plus radicaux » [3]. Mais en vain.

Il reste à se demander par quelle aberration des socialistes peuvent défendre un dispositif pareil et dénoncer l’héritage de la Révolution française en posant le fait ethnique comme une revendication « moderne » opposable à une conception « désuète » — je ne fais là que citer les socialistes Armand Jung et Jean-Jacques Urvoas (auteurs d’une brochure intitulée Langues et cultures régionales : en finir avec l’exception française publiée par la Fondation Jean Jaurès) qui placent la France « au banc des accusés » car, d’après eux, ne pas reconnaître de minorités en France constitue une atteinte aux droits de l’homme [4]. Les notions d’« ethnie » ou d’« ethnicité » n’étant, comme le rappelait Pierre Bourdieu, que des « euphémismes savants que l’on a substitués à la notion de « race » [5], cette promotion de l’ethnisme contre la conception républicaine de la laïcité s’apparente à un accablant recyclage à gauche des thèmes orchestrés de longue date par les autonomistes.

Plus accablant encore, le président socialiste du Conseil régional de Bretagne le soutient au nom « des Bretons », comme si les Bretons attendaient la reconnaissance de leur ethnie (et comme si le breton et le gallo n’étaient pas déjà largement enseignés et subventionnés sur fonds publics). Et le Conseil culturel de Bretagne se fend d’une lettre ouverte présentant la ratification de la charte comme une obligation au motif que « ceux qui veulent parler breton, gallo, basque, catalan, alsacien, corse, flamand, créole ou d’autres langues autochtones en ont légitimement le droit ». Les « autochtones » seraient donc empêchés de parler leur langue ? Et ce, en raison du refus de ratifier la charte ? C’est sur cette base que ces représentants non élus d’une « minorité » enrôlée dans une croisade dont ils ne connaissent pas les enjeux dénoncent « un système jacobin, archaïque et discriminatoire ». En quoi discriminatoire ? En ce qu’il s’oppose à toute discrimination ethnique ? La réponse du gouvernement le 2 avril 2008 était limpide : « La France ne reconnaît pas en son sein l’existence de minorités disposant en tant que telles de droits collectifs opposables dans son ordre juridique. Elle considère que l’application des droits de l’homme à tous les ressortissants d’un État, dans l’égalité et la non-discrimination, apporte normalement à ceux-ci, quelle que soit leur situation, la protection pleine et entière à laquelle ils peuvent prétendre. » Sauf à revendiquer l’allégeance de l’homme à la tribu, on est en droit de conclure qu’il s’agit là, en effet, « d’une conception particulièrement exigeante des droits de l’homme. » Faut-il brader cet héritage ? Pour quel profit ?

Se référant désormais aux directives du Conseil de l’Europe, certains élus de gauche tiennent à l’égard de la France des discours haineux que l’on dirait calqués sur ceux de l’extrême droite ethno-régionaliste. Ils rejoignent par là le puissant lobby patronal breton de Locarn qui appelle de ses vœux une « Europe des tribus » [6]. La charte est l’un des outils destinés à la faire advenir. (retour)

 

Françoise Morvan

 

Françoise Morvan a dénoncé la dérive identitaire à l’œuvre en Bretagne dans un essai « Le monde comme si » (Babel-Actes Sud). Poursuivant ses recherches sur la réécriture de l’histoire induite par les autonomistes, elle a publié « Miliciens contre maquisards, un essai sur la Résistance », et donné de nombreux articles au Groupe Information Bretagne tout en étudiant l’instrumentalisation du folklore par les nationalistes (ce qu’analyse, entre autres, sa thèse sur François-Marie Luzel et son édition en dix-huit volumes des œuvres de ce folkloriste). Elle s’est penchée sur le problème de la charte européenne des langues régionales et minoritaires dans le cadre de ses recherches sur l’ethno-régionalisme et les mouvements autonomistes.

 

Europe ethnique des régions


 

Notes

[1] Yvonne Bollmann, La Bataille des langues en Europe, Bartillat, 2001 (et aussi, La Tentation allemande, Michalon, 1998, et Ce que veut l’Allemagne, Bartillat, 2003). (retour)

[2] Dans ce sens, la carte des minorités ethniques européennes élaborée par le Conseil de l’Europe semble programmatique. (retour)

[3] Le Nouvel Observateur, 1er juillet 1999. (retour)

[4] Présentant la France comme une aberrante exception (alors que 14 pays ont refusé à ce jour de signer la charte et 7 de la ratifier), A. Jung et J.-J. Urvoas (président de la Commission des lois à l’Assemblée nationale), présentent la France comme coupable et mise au ban des nations par des autorités internationales — ainsi Alvaro Gil-Roblès, voix du Conseil de l’Europe, et Gay McDougall, « experte » auprès de l’ONU, laquelle « invite abruptement le gouvernement français à une reconnaissance de la réalité », à savoir « reconnaître l’existence de minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques sur le territoire français », signer la Convention cadre pour la protection des minorités nationales et, bien sûr, ratifier la Charte (p. 131) … La confusion la plus totale est entretenue sur les notions, elles-mêmes on ne peut plus confuses, de « groupes », d’« ethnies » et de « minorités ». (retour)

[5] Pierre Bourdieu, « L’identité et la représentation, éléments pour une réflexion critique sur l’idée de région », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 35, novembre 1980, p. 64. (retour)

[6] Intervention de Dick Veerman prônant, contre les États et surtout la France, « une fédération de tribus européennes dont la tribu bretonne », université d’été de l’Institut de Locarn, 2012 à retrouver ici. (retour)

 

 

**************************

 

 

Source : m-pep.org, le dimanche 19 janvier 2014

Possibilité de réagir sur : http://www.m-pep.org/spip.php?article3517#outil_sommaire_0

 

 

 

**************************

 

 

 

Quelques commentaires prélevés sur le site de M'PEP :

 

 

19 janvier 2014, par Philippe

Cela avait déjà été tenté par Jospin mais le Conseil Constitutionnel saisi par Chirac alors Président de la République avait énoncé que celle-ci ne pouvait pas être ratifiée au motif que cette charte était en contradiction avec la Constitution.

Je pense que cette ratification ne pourra être faite qu’après une révision constitutionnelle qui j’espère n’aboutira pas.

Sa ratification serait une catastrophe pour la République.

 

19 janvier 2014, par SergeG

Comme par hasard, ce genre de sujet réapparaît quand les socialistes son au pouvoir comme l'AGÉTAC/OMC en 90, l’AMI en 99 et aujourd’hui l’accord avec les États-Unis.
Ci dessous un texte que j’ai écrit en 2000 :
Sur le plan social, l’organisation de solidarités nécessite et des espaces et des populations suffisamment importantes. Sur le plan économique, la mondialisation de l’économie, qui a mis le pouvoir dans les mains des transnationales et de leurs technocrates, nécessite au contraire un renforcement des nations pour contrebalancer les pouvoirs de ces marchands cupides et sans scrupule. Quel rapport de force pourrait opposer une région française aux transnationales ?

Quant à la langue, elle est un des éléments nécessaire à la cohésion du peuple d’une nation. Si des personnes veulent, pour des raisons qui leur sont personnelles, apprendre une langue locale, comme pour le choix d’une religion, c’est un problème individuel dans lequel l’État n’a pas à s’immiscer. L’espéranto doit être la langue internationale afin d’éviter une colonisation culturelle et économique par l’utilisation d’une des langues nationales actuelles.

Je suis convaincu quant à moi, que la volonté d’éclater les nations en groupuscules régionalistes, religieux, ethniques... n’est pas due au hasard. Elle est l’expression de la volonté de diviser pour mieux régner de la part de ceux qui aujourd’hui imposent leur hégémonie économique et financière et qui veulent que cela dure !!! La partition de la France en « peuples » ethniques, religieux, politiques ou régionalistes ne peut que conduire à une cohabitation conflictuelle violente remettant en cause la paix civile. Dans notre République laïc, il ne peut y avoir de place pour des peuples de gauche ou de droite … corse, breton ou basque … juif, chrétien ou musulman …jaune, noir, blanc ou beur … tous sont français. Ceux qui au nom de la lutte contre le racisme sont favorables au culte des particularismes en refusant l’intégration des immigrés cultivent un racisme qui fait flamber nos banlieues. S’il n’y avait pas de beur, de peuple juif, de peuple corse, mais des personnes ayant le sentiment d’appartenir à un seul peuple et à la même nation beaucoup de problèmes liés au sentiment de supériorité ou d’infériorité voire de rejet n’existeraient pas.

 

19 janvier 2014, par Philippe Martel

Sur le site conspirationniste Boulevard Voltaire, Pierre Hillard explique gravement que l’origine de cette affaire, et l’ancêtre ultime de l’effroyable FUEV, ce sont les francs-maçons juifs du B’nai Brith, fraternellement rejoints ensuite par les pangermanistes. Carrément. Pourquoi pas les aliens et les Templiers, à y être ? Mme Morvan est-elle en accord avec Boulevard Voltaire, ou Debout la République, ou les Jeunes populaires ? Les villiéristes, ou ce qu’il en reste ne se sont pas encore manifestés sur ce sujet, mais je suis sûr qu’eux-mêmes comme le le FN partagent l’hostilité de tous ces gens contre la Charte. Chacun son camp. Encore faut-il avoir le courage d’assumer. La haine de Mme Morvan pour ses anciens amis nationalistes bretons la jette dans les bras du pire nationalisme français qui soit. Mais c’est son problème.
Je ne suis pas sûr de croire que la Charte règlera les problèmes des langues régionales. Ce que je sais, c’est que contrairement à ce qu’affirme Mme Morvan, leur statut actuel n’est pas vraiment aussi "largement" favorable qu’elle le dit, depuis que la droite a sauvagement taillé dans les postes d’enseignants mis aux concours de l’Education Nationale. je précise que pour moi c’est à l’Éducation Nationale d’assurer un statut digne à l’enseignement de ces langues, aux antipodes du mépris bourgeois qui les frappe actuellement, y compris chez des gens qui s’affirment, et sans doute se croient de gauche.

 

20 janvier 2014, par Danièle Dugelay

Le projet d’une fédération européenne des régions ethniques est un des piliers de la mondialisation libérale au service de la domination de la haute finance internationale. L’expérimentation doit commencer par l’Europe. Il s’agit de diviser pour mieux régner. Un état-nation a la taille nécessaire pour pouvoir résister à l’oppression, voire se révolter. Ce n’est pas le cas de ces régions dites « ethniques » ou « ethnolinguistiques », voire « ethnoreligieuses » comme en Europe centrale, surtout si les autorités mondiales et les services secrets provoquent des compétitions ou des conflits entre elles. Il est faux de dire que la gauche soutient ce projet : le Parti de Gauche a dû faire une mise au point pour dire son opposition pour mettre fin aux rumeurs lancées par des régionalistes acharnés et Jean-Luc Mélenchon a publié un rappel de sa position et son explication de vote à l’Assemblée Européenne contre la Charte des langues minoritaires, véritable clé qui ouvrirait toutes les portes vers la réalisation de ce projet antirépublicain. La position des Verts peut surprendre, mais elle n’a pas changé depuis des décennies, en faveur de cette Europe fédérale des régions ethnolinguistique, position qu’ils soutiennent avec le Conseil de l’Europe et la partie ALE de leur groupe au Parlement Européen. Hollande est soumis aux désirs de la commission et de la finance, les socialistes le suivent, mais Hollande, les socialistes fidèles, les Verts fidèles sont-ils de gauche ? Non, évidemment.

 

19 janvier 2014, par ggil

Alors que l’incompréhension est un facteur aggravant et favorisant les conflits, et on constate une dérive dans ce sens en Europe, le problème essentiel aujourd’hui est plutôt quel outil pour communiquer entre les peuples, sans domination de l’un ou l’autre, la langue en étant un fort vecteur. Le français parlé sur tout le terroir, quelles qu’en soient les raisons historiques est maintenant un atout à défendre.
Est-ce que le M’pep fait la promotion de l’esperanto pour l’Europe ?

 

19 janvier 2014, par Duplan André PG69

Voir également l’analyse que JL Mélenchon fait sur le même sujet dénonçant les dérives ethnicistes sur le lien :
http://europe.jean-luc-melenchon.fr/2013/09/19/encore-une-fois-la-charte-des-langues-regionales/

 

20 janvier 2014, par Stephan

Si il est possible que les initiateurs de cette charte aient des relents de nationalisme étriqué empreint de racisme et nous pouvons remercier l’auteur de cet article de nous le rappeler, il n en reste pas moins que l’État français a aussi anéanti un patrimoine linguistique extraordinaire en imposant le français comme seule langue d’enseignement pour accompagner sa politique de colonisation des terres non francophones. Aucun de mes grands parents n’est né francophone et ils ont été brimés, tapés et punis pour oser parler leur langue à l’école et les forcer à apprendre le français..ils ont appris à avoir honte de leur langue, honte d’eux mêmes comme des paysans de la montagne....pour faire quoi ? migrer dans les villes francophones et servir les nantis ! Si dans leur pays de montagne les petites industries locales qui s’étaient développées le long des cours d’eau avaient survécu ils auraient pu vivre bien sur leur terres ;combiner agriculture, exploitation de ressources naturelles renouvelables, emploi salarié et dans leur langue au lieu de connaitre un exil dans l’exploitation et rester pauvres de toutes façons.
Derrière cette question de langue ce qui s’est joué ce sont des véritables enjeux de développement capitaliste et d’exploitation de populations drainées dans les villes pour y être mieux asservies et contrôlées

L’histoire de France pourrait aussi bien s’écrire comme celle des peuples qui la composent, certes des migrations internes et internationales qui font la France actuelle, mais bien de rapports de domination transportés par la langue et des classes sociales liées au pouvoir central « parisien ».

Derrière la langue c est aussi tous ces enjeux de développement des peuples qui contribuent à créer cette France multiculturelle dont nous devrions être fiers et que nous devrions promouvoir au lieu de chercher à la détruire.

L’Alsace est la seule région qui est restée bilingue, l’Occitan, le Basque, le Breton, le Flamand peinent à survivre alors que le Basque et le Catalan doivent probablement leur relative vivacité à la relative autonomie des Basques et Catalans d’Espagne

Parler plusieurs langues ne peut être qu’un plus, que tout enfant qui le désire puisse être bilingue dans les langues de France ne pourra que l aider à apprendre d’autres langues internationales.

Ce Jacobinisme très parisien est lié aux groupes dominants et alliés qui a voulu tuer toute revendication linguistique pour construire une France et qui a pillé ses régions et les laissent exsangues dans le monde rural au lieu de penser un développement harmonieux des territoires tant culturel, linguistique que économique.
Nombre de nations ont pu garder leur patrimoine linguistique, même au pays de Galle le gallois a connu une véritable renaissance pourquoi pas la France ?

Ces questions de langue et d’identité oui sont toujours sensibles et peuvent être récupérées par des mouvements nationalistes et racistes, il faut y veiller mais ne mélangeons pas tous, nombre de mouvements pour la reconnaissance des langues et cultures sont aussi des mouvements de solidarité internationale, empreints de valeurs de justice sociale, générosité et partage qui ne visent que le développement de toutes les ressources de chacun et non pas son asservissement à des idéologies qui amputent les personnes au nom d’une prétendue nation qui reste fondamentalement inégalitaire et injuste

 

20 janvier 2014, par LBM

Arrêtez de vous en prendre toujours à l’État Jacobin. La diffusion et la « sauvegarde » des langues régionales disposent de plus de moyens que les langues minoritaires telles que le polonais, le portugais, l’italien, l’arabe dialectal ... qui pourtant sont parlées par nombre de nos compatriotes (ces langues sont étrangement absentes de la « Charte », il est vrai que si ces concitoyens veulent parler leur langue maternelle ou celle de leurs parents, ils n’ont qu’à retourner dans leur pays, comme diraient certains ... que je connais).

Pour parler plus précisément du breton, les moyens attribués par l’État et les différentes collectivités territoriales sont bien supérieurs à ceux qui sont attribués à l’enseignement public ... Je sais de quoi je parle en tant qu’élu municipal d’une commune des Côtes d’Armor.

Les écoles Diwan largement subventionnées des communes jusqu’à la région Bretagne disposent d’un encadrement nettement supérieur aux écoles publiques (dites normales) : 1 enseignement pour 9 élèves contre 1 pour 12 dans l’école républicaine.

Quant aux dépenses publiques que représentent pour les communes la double signalétique (rues, routes, bâtiments publics, communications ...) elles seraient bien mieux utiles ailleurs ...

Il faudrait peut-être s’interroger sur le bien-fondé de cet acharnement thérapeutique pour sauver cette langue bretonne (unifiée par qui d’ailleurs ?) que nos anciens ne comprennent pas.

Salut et fraternité.

Un jacobin conseiller municipal

 

20 janvier 2014, par artusse

Ce qui m’étonne c’est qu’on fait des missions dans le fin fond de l’Amazonie ou d’autres pays ou il existe encore des tribus en minorité, afin de sauver la culture et la langue de ces peuples, ce qui est une honorable cause, bien entendu, mais dès qu’il s’agit de la sauvegarde de son propre patrimoine, là, on est catalogué de gens bizarres, limite raciste... Il est bien entendu que les personnes qui luttent à leur niveau pour sauver le patrimoine et l’idiome local, le font dans un but unique, conserver un lien entre le passé, le présent et le futur. Il n’est nullement question d’indépendance... Il ne faut pas avoir peur de la signature de la charte des langues régionales...

 

20 janvier 2014, par Claude Thomas

Françoise Morvan est étonnante : elle a fait de l’opposition à la langue bretonne son fond de commerce alors qu’elle est parfaitement bilingue et qu’elle a largement participé à monter l’école bilingue breton/français Diwan de Saint-Brieuc. Depuis elle voit des autonomistes et des nationalistes bretons partout : cela me semble relever d’un problème personnel à Françoise Morvan : un clivage de l’objet dirait-on en psychanalyse : un clivage de l’objet Bretagne/breton, dont elle pratique la langue et qu’elle déteste par ailleurs comme si c’était un poids à porter donc à supprimer. Je vous en prie, Françoise Morvan, arrêtez ce combat ridicule et écrivez aussi bien que vous savez le faire. Sans rancune et Kenavo.

Claude Thomas

 

20 janvier 2014, par Yadec

Si juste que soient certaines remarques, l’adoption de cette charte serait une avancée vers la reconnaissance à terme de toutes les langues minoritaires de France comme l’arabe, le tamazight ou le cinti. D’autre part le breton n’est pas une langue ethnique. Il y a-t-il vraiment des langues ethniques ? Le succès de l’idée de Bretagne vient de sa taille. La Bretagne est une solidarité de taille humaine où l’histoire récente est bien plus importante que le passé. Le premier maire communiste en France était breton, le premier maire noir en France était breton, la première femme élue en France était bretonne et le premier baptisé par Picasso était un Juif breton. Le communautarisme dangereux est celui des pays recroquevillés sur eux-mêmes et sur le passé avec leurs exceptions culturelles et autres et leur management d’un autre âge. L’État-nation se meurt de vieillesse. 50 pays en 1900, pas loin de 200 maintenant.

 

20 janvier 2014, par DALGALIAN

Le texte de F. Morvan est un condensé parfait de l’idéologie du monolinguisme pour tous, en fait un plaidoyer pour un communautarisme qui exclut toutes les différences et toutes les richesses propres aux bi-et plurilingues.

Contrairement à ce qu’elle affirme de façon péremptoire, les bilingues en général et ceux qui ont la combinaison français-langue régionale en particulier ne sont pas des éléments de cloisonnement de la société française : ils sont de véritables ponts entre les peuples, les cultures, les humains. Ceux qui, comme F. Morvan, s’opposent à eux sont eux en train d’ériger des murs entre les peuples, entre les langues, entre les cultures.

D’ailleurs F. Morvan oublie que toute l’émergence d’Homo Sapiens a été inséparable de la diversification des humains, toujours et de plus en plus, et sur tous les plans : c’est même cette diversité (des croyances, des mythes, des musiques, des techniques, bref des cultures) qui fait la richesse de l’humanité et qui fonde la pulsion démocratique. Le passé le prouve, l’avenir le confirmera.

Gilbert DALGALIAN, psycholinguiste, promoteur de l’éducation bi-et plurilingue.

 

20 janvier 2014, par Frédérique

Je m’investis depuis longtemps dans la sauvegarde du patrimoine du secteur où j’habite. Pour moi patrimoine signifie : habitat, nature et paysage, histoire (la petite et la grande), langue... Selon Larousse, « le patrimoine est un bien commun d’une collectivité, d’un groupe humain, considéré comme un héritage transmis par les ancêtres. »

S’intéresser au patrimoine est une forme de reconnaissance des outils mis en place par ceux qui étaient là avant moi et qui sont mis à ma disposition pour qu’à mon tour, je puisse participer à l’histoire du Monde. Je parle bien d’outils et non pas de Valeurs. Pour moi, les Valeurs, c’est ce qui me permet de me regarder droit dans les yeux et d’être fière de l’image que j’y vois. Les Valeurs sont la capacité de Libre Choix, le fait de prendre conscience qu’il y ait un passé, un présent et un futur, la Responsabilité de moi-même et de mon regard sur l’Autre, la Dignité.

La langue régionale fait donc partie des outils et n’est en rien une valeur.
Comme tout outil, on peut en faire le meilleur ou le pire. Mais je n’ai jamais vu que l’on ait supprimé les marteaux ou les pics à glace, sous prétexte qu’un imbécile s’en soit servi pour massacrer son voisin.

Par contre, j’ai vu des jeunes enfants prendre plaisir à découvrir la langue que parle leur grand père ou arrière grand père, cette langue mystérieuse qui leur permet de créer un lien particulier avec eux, de comprendre la signification des noms de lieu ou de ville.
J’ai vu ces mêmes enfants s’intéresser à une tribu au fin fond du monde qui parle elle-aussi une langue particulière avec les anciens.
Et j’ai vu ces mêmes enfants apprendre la langue du pays voisin ou celle de l’autre bout de la Terre.

Connaître la terre et l’histoire de la région où je vis, à toujours été pour moi, source d’échange et m’a grandi dans ma connaissance de l’Autre. Mes propres racines me permettent de découvrir ce qui fait la beauté de celui qui est en face de moi. Ses racines me nourrissent.
Et pour vous donner un exemple. C’est la connaissance du flamand qui permet aujourd’hui à ma mère de pouvoir échanger quelques mots avec les Anglais, les Allemands ou les Néerlandais, grâce au tronc commun qui constitue chacune des langues. En effet, dans toutes ces langues, le mot « route » et le mot « pain » ont une sonorité approchante.

Faire disparaître une langue régionale ne fera pas reculer l’obscurantisme et l’ignorance. Mais cela renforcera le sentiment de ne pas être compris en tant qu’Etre avec sa culture. Comment puis-je comprendre que la langue de mes ancêtres est une langue négative, indigne d’exister ? Supprimer une langue régionale ne fera pas disparaître ce qui permet à cet obscurantisme et à cette ignorance de s’installer. C’est la peur de l’autre et les conditions de vie difficile qui permettent cela. Plutôt que de supprimer une langue, utilisons là pour dire tout haut ce qui fait que l’on soit fière d’être un Homme sur Terre.

 

À vous....

 

 

 

Haut de page