Sujet :

Sarkozy au sujet du français

Date :

10/03/2007

Envoi de Marceau Déchamps   (courriel : dlf78(chez)club-internet.fr)     

Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez « chez » par « @ ».

 

 

COMMUNIQUÉ

 
 

Veuillez trouver, en pièce jointe, un extrait du discours de Nicolas Sarkozy, le 9 mars à Caen.

Il me semblait important de le porter à votre connaissance, car c'est une réponse indirecte à notre lettre aux candidats.

Je m'engage, bien entendu à vous faire un communiqué similaire si un autre candidat à la présidence de la République fait également des déclarations relatives à son projet politique pour la langue française et la francophonie.

 

Marceau Déchamps,
vice-président
Défense de la langue française
http://www.langue-francaise.org

 

 

 

Extrait du discours de Caen, 9 mars 2007, de Nicolas Sarkozy

 

« La France c’est une langue, une langue qu’elle met à la disposition de tous les hommes. Le français disait Rivarol ce n’est plus la langue française, c’est la langue humaine.

Le français c’est l’âme de la France, c’est son esprit, c’est sa culture, c’est sa pensée, c’est sa liberté. C’est le droit de penser autrement que selon la pensée dominante. La diversité linguistique c’est la condition de la diversité culturelle et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. La langue n’est pas une marchandise, la langue n’est pas une technique.

L’obsession d’une langue unique au prétexte de l’efficacité est un leurre qui masque les effets de domination de la pensée unique dont la langue unique est l’antichambre. Mais l’efficacité n’est même pas prouvée : la Renaissance où tout le monde s’est mis à penser et à écrire dans sa langue nationale fut plus féconde pour la pensée humaine que les longs siècles de domination exclusive du latin, comme si la créativité était bel et bien inséparable de la diversité.

Nous avons le devoir pour nos enfants, pour l’avenir de la civilisation mondiale, pour la défense d’une certaine idée de l’homme, de promouvoir la langue française.

 Si je suis élu, je mettrai la francophonie au rang des priorités diplomatiques de la France. Je renforcerai tout à la fois le dispositif de l’action culturelle de la France à l’étranger et l’aide à la création, parce que c’est par la création que le français rayonne.

Je veillerai à ce que dans les entreprises installées sur le territoire français la langue de travail soit le français dès lors qu’il n’y a aucune nécessité économique ou commerciale qui oblige à s’exprimer dans une autre langue.

Je me battrai pour que dans les instances européennes et à l’ONU le français continue d’être employé. Ce sera naturellement une obligation absolue pour tout représentant de la France dans des organisations internationales.

Surtout je me battrai pour que soit généralisé partout en Europe l’enseignement de deux langues étrangères parce que c’est la seule façon efficace pour que l’hégémonie de l’anglais soit battue en brèche.

Mais le patrimoine linguistique de la France, ce n’est pas seulement le Français, c’est aussi l’extraordinaire richesse de ses langues régionales. Il suffit de se souvenir de l’œuvre immense de Mistral pour prendre conscience de l’appauvrissement que constituerait la disparition de toutes ces langues très anciennes qui ont concouru à la formation de la langue française et qui continuent à vivre en partie en elle.

Je souhaite que leur enseignement soit correctement pris en charge par l’éducation nationale.

La logique de confrontation avec le français que cherchent à faire prévaloir certains indépendantistes qui veulent en finir avec l’unité française que nous avons mis si longtemps à construire et qui reste le bien le plus précieux, mais aussi le plus fragile que nous ayons à léguer à nos enfants.

Si je suis élu, je ne serai pas favorable à la charte européenne des langues régionales, non pas parce que je conteste les langues régionales, qu’au contraire je veux soutenir et développer, mais parce que je ne veux pas que demain un juge européen ayant une expérience historique du problème des minorités différente de la nôtre puisse décider qu’une langue régionale doit être considérée comme langue de la République au même titre que le français.

Car au-delà de la lettre des textes il y a la dynamique des interprétations et des jurisprudences qui peut aller très loin. J’ai la conviction qu’en France, terre de liberté, aucune minorité n’est opprimée et qu’il n’est donc pas nécessaire de donner à des juges européens le droit de se prononcer sur un sujet qui est consubstantiel à notre pacte national et n’a absolument rien à voir avec la construction de l’Europe. »

 

 

Réaction : 

 

Je vous remercie vivement de m'avoir envoyé le texte d'un discours de M. Nicolas Sarkozy (prononcé à Caen le 9 mars dernier) dans lequel il  exprime son intention, s'il est élu à la présidence de la République, de « promouvoir la langue française ». Très bien.

S'agissant pourtant de la fort judicieuse proposition du sénateur Philippe Marini visant à compléter la loi Toubon de 1994, approuvée à l'unanimité par le Sénat en 2005, et dont le maire de Compiègne me disait dans un message qu'il m'a envoyé le 8 mars dernier « déplorer qu´elle n´ait pu encore être inscrite à l´ordre du jour de l´Assemblée nationale », on lit ceci sous la plume de M. Paul-Marie Coûteaux, député européen : « La proposition du sénateur UMP ne reçut pas l'aval de son groupe, ni davantage celle de son parti, encore moins du président dudit parti qui juge de telles dispositions "inapplicables dans les
cadres actuels » (Être et parler français, 2006, aux éditions Perrin, p. 351).

J'observe, d'ailleurs, que ni la loi Toubon, dont les milieux d'affaires se moquent éperdument sans que les pouvoirs publics paraissent s'en émouvoir, ni le projet de M. Marini, dont l'utilité et l'urgence sont chaque jour plus flagrantes, ne sont évoqués dans l'exposé du candidat. Cela est très ennuyeux. Dans ces conditions, il me semble que les associations de défense de la langue française seraient évidemment fondées à interroger le candidat sur ces deux points très précis ...

Les développements de M. Sarkozy appellent d'autres commentaires. Je me bornerai à ce qui suit. Il a déclaré : « Si je suis élu, je mettrai la francophonie au rang des priorités diplomatiques de la France ». Excellente idée car, pour l'heure, ce serait plutôt le cadet des soucis de nos représentations diplomatiques (voir mon très prochain courriel sur le thème « Diplomatie et défense du français »). Mais, là encore, on peut se demander pourquoi d'aussi bonnes intentions n'ont pas été mises  en œuvre plus tôt par le parti politique que préside M. Sarkozy,  lequel a dominé, et de très loin, comme peu de partis auront pu le
faire, la vie politique et parlementaire de toute la législature qui s'achève.
 

M. Jean-Pierre Busnel,

jpabusnel@wanadoo.fr

 

 

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Discours de Caen dans son intégralité

Nicolas Sarkozy, Discours à Caen (09/03/07)

 

 

 

Mes chers amis,

 

Merci d'être là si nombreux.

Merci de votre enthousiasme.

Merci de votre soutien.

Ce soir à travers votre foule immense, c'est la Normandie tout entière qui montre qu'elle veut être une fois de plus au rendez-vous de l'Histoire.

Ce rendez-vous, elle ne l'a jamais manqué.

Normands au sang mêlé, vous avez été ces héros qui ont conquis l'Angleterre, Naples, la Sicile et Antioche, vous avez sillonné les mers, exploré le monde, et fait de votre terre à force de travail l'une des plus fécondes au monde.

Vous avez été moines, soldats et paysans, explorateurs et conquérants, et votre destin depuis la guerre de Cent Ans jusqu'à la bataille de Normandie se confond avec celui de la France.

C'est ici qu'avec la Résistance contre l'occupation anglaise on vit pour la première fois la volonté de se battre pour rester Français.

C'est ici que succédant aux heures les plus sombres de notre histoire commença le 6 juin 1944 la libération de la France occupée. Bataille décisive que les survivants ont cherché en vain à décrire avec des mots. Il y a des tragédies qu'aucun mot n'est assez fort pour exprimer. Il y a des malheurs trop grands pour être racontés. Et cette tragédie dépasse l'imagination humaine.

À ces héros qui venaient des quatre coins du monde dont beaucoup allaient mourir et auxquels nous devons tout, Eisenhower avait dit : « les yeux du monde sont fixés sur vous. Les espoirs, les prières de tous les peuples libres vous accompagnent. »

Mais personne ce matin-là n'avait prié pour eux, personne ne les avait vus. À l'heure où les premières vagues d'assaut se succédaient en enjambant les cadavres laissés par les vagues précédentes, le monde ignorait encore que venait de commencer la bataille de France.

Il faudra six semaines aux Alliés pour prendre Caen. Le 14 juin le Général De Gaulle est à Bayeux. Il déclare à la foule en liesse : « le chemin du combat est aussi le chemin de la liberté et le chemin de l'honneur (...). Nous combattrons pour la France avec passion mais aussi avec raison (...). La victoire que nous remporterons sera la victoire de la liberté et la victoire de la France. »

Deux ans plus tard, le 16 juin 1946, il revenait à Bayeux prononcer son célèbre discours. Il commença par ces mots : « C'est ici dans notre Normandie, glorieuse et mutilé, que quatre années après le désastre initial débute la victoire finale des Alliés et de la France. C'est ici que l'effort de ceux qui n'avaient jamais cédé (...) tira des événements sa justification. C'est ici que sur le sol des ancêtres réapparut l'État, l'État légitime (...), l'État capable de rétablir autour de lui l'unité nationale... »

En ces journées de juin 1944 les plages du Calvados, Caen, Bayeux ce pas une partie de la France, c'était toute la France. C'était là que le Général De Gaulle avait proclamé que la France était redevenue la France, qu'elle était rentrée chez elle. C'est cette terre normande, où avait commencé la libération de la Patrie, qu'il choisit deux ans plus tard pour dire aux Français sa conception de la République et de la Constitution.

Cette terre où, avant d'être les fils de nos Rois, les ducs s'appelaient Longue-Épée, Sans-Peur, l'Irascible, Bras-de-Fer, le Conquérant, cette terre qui donna à la France Dumont d'Urville qui parcourut tous les océans, découvrit la Terre Adélie et mourut dans la première catastrophe ferroviaire de l'histoire de France, et le Maréchal Koenig, le héros de Bir-Hakeim qui fut la première victoire de la France combattante, cette terre où entre le Mont Saint-Michel et Lisieux, entre l'Abbaye aux hommes et l'Abbaye aux femmes, Dieu est partout.

Cette terre où les hommes, quand ils ne regardent pas vers le ciel, regardent vers l'océan, où le sang des Vikings s'est mélangé à celui des Gaulois et des Francs, est une terre française, peut-être la plus française de toutes. Ici l'on est Français sans renoncer en rien à être Normand.

Ici depuis Philippe-Auguste on a été occupé, pillé, ravagé, mais l'on n'a jamais pris les armes contre la France, on n'a jamais songé que l'on pouvait être plus libre en étant moins Français.

Ici l'on sait depuis toujours qu'être Français, c'est être libre, que la France est pour la liberté une garantie et non une menace.

Qu'est-ce que la France au fond sinon une multitude de provinces et de petits pays très anciens qui ont une histoire, une culture, sinon une multitude de petites patries qui en forment ensemble une grande ?

Qu'est-ce que la France, sinon des provinces qui, selon la belle formule de Michelet, « se sont comprises et se sont aimées » ? Des provinces dans lesquelles chacun a des racines qui restent vivaces même pour celui qui s'en est éloigné.

 

Qu'est-ce que la France ? La France est un miracle. Ce miracle est politique. Il est intellectuel. Il est moral. Il est culturel.

C'est le miracle de la France de conjuguer une identité si forte avec une aspiration si grande à l'universalisme.

C'est le miracle de la France d'être une grande patrie faite d'une multitude de petites patries unies par une formidable volonté de vivre ensemble, de partager une langue, une histoire, une façon d'être et de penser, où chacun se reconnaît dans un idéal et un destin communs sans que soient effacés les histoires personnelles et les destins particuliers.

C'est le miracle de la France d'avoir forgé de l'unité sans jamais fabriquer de l'uniformité.

C'est le miracle de la France de combiner une aussi haute idée de l'État avec une passion aussi grande de la liberté.

C'est le miracle de la France d'être aussi fortement attachée à l'idée de nation et en même temps aussi ouverte sur le monde.

C'est le miracle de la France d'aimer d'une même passion l'égalité et le mérite, le sentiment et la raison.

Mais chacun sent bien que ce miracle est menacé.

 

La France est une terre charnelle à laquelle chacun se sent rattaché par un lien mystérieux dont il ne sait au fond qu'une chose, c'est qu'il ne peut le couper sans perdre quelque chose de lui-même.

La France c'est une culture, un idéal, une idée. « Une âme, un principe spirituel » disait Renan.

La France ce n'est pas une race, la France ce n'est pas une ethnie. La France c'est tous les hommes qui l'aiment, qui sont prêts à défendre ses idées, ses valeurs, à se battre pour elles.

La France elle est dans les têtes et dans les cœurs.

La France est partout où ses valeurs sont vivantes dans la tête et dans le cœur des hommes.

La France c'est un rêve de civilisation.

La France c'est un rêve d'unité.

La France c'est un rêve d'émancipation.

La France c'est un rêve de grandeur et d'universalité.

La France c'est une vieille nation.

La France ce n'est pas une page blanche. C'est un pays qui a une longue histoire. C'est un pays qui s'est forgé au cours des siècles une identité, une personnalité qu'il faut respecter, qu'on ne peut pas effacer, qu'on ne peut pas ignorer, qui est une part de l'identité de chacun, qui est faite de mille apports, de commémorations, de leçons d'instituteurs, de réminiscences qui se transmettent de génération en génération, de souvenirs d'enfance, de vieilles histoires de grands-pères qui ont fait la guerre et qui racontent à leur tour à leurs petits-enfants ce que leurs grands-pères leur ont raconté jadis.

La France c'est un pays qui dissimule dans les replis de son inconscient collectif mille blessures secrètes et autant de fiertés inavouées.

C'est une trame mystérieuse de mémoires individuelles et collectives qui rattache chacun d'entre nous, chacun de ceux qui se sentent Français, d'où qu'il viennent, à tout le passé de la nation.

Cette histoire est comme toutes les histoires, elle a ses heures sombres et ses heures éclatantes, elle a ses moments de honte et ses moments de gloire, elle a ses grandeurs et ses bassesses. Sans doute a-t-il fallu bien des crimes, des drames, des tragédies pour que du chaos des peuples émergeât la France.

Mais au bout du compte nous avons tout lieu d'être fiers de notre pays, de son histoire, de ce qu'il a incarné, de ce qu'il incarne encore aux yeux du monde.

Car la France n'a jamais cédé à la tentation totalitaire. Elle n'a jamais exterminé un peuple. Elle n'a pas inventé la solution finale, elle n'a pas commis de crime contre l'humanité, ni de génocide. Elle a commis des fautes qui doivent être réparées, et je pense d'abord aux harkis et à tous ceux qui se sont battus pour la France et vis-à-vis desquels la France a une dette d'honneur qu'elle n'a pas réglée, je pense aux rapatriés qui n'ont eu le choix au moment de la décolonisation qu'entre la valise et le cercueil, je pense aux victimes innocentes de toutes les persécutions dont elle doit honorer la mémoire.

Mais la mode de la repentance est une mode exécrable.

Je n'accepte pas que l'on demande aux fils d'expier les fautes des pères.

Je n'accepte pas que l'on juge toujours le passé avec les préjugés du présent.

Je n'accepte pas cette bonne conscience moralisatrice qui réécrit l'histoire dans le seul but de mettre la nation en accusation.

Je n'accepte pas ce changement systématique de la nation qui est la forme ultime de la détestation de soi.

Car pour un Français, haïr la France c'est se haïr lui-même.

Je n'accepte pas que l'on veuille vivre en France en professant la haine de la France.

Je veux que le racisme et l'antisémitisme soient poursuivis et condamnés avec la plus grande sévérité. Mais je ne veux pas que l'on dise que tous les Français sont racistes ou antisémites, parce que c'est faux. Je ne veux pas que l'on dise que la France est le pays le plus raciste et le plus antisémite au monde, parce que ce n'est pas vrai, parce que la France c'est exactement le contraire, c'est le pays des droits de l'homme, c'est le pays qui récuse le plus le communautarisme qui renvoie chacun à ses origines ethniques et religieuses, c'est le pays de la République, qui s'est toujours battu depuis deux cents ans pour la liberté, l'égalité et la fraternité de tous les hommes.

Non, tous les Français dans les colonies n'étaient pas des monstres et des exploiteurs.

Non, tous les Français ne furent pas pétainistes.

Non, tous les Français ne furent pas antidreyfusards.

Non, tous les Français ne sont pas racistes.

Et la vérité c'est qu'il y a peu de pays dans le monde qui auraient été capables de se diviser et de se déchirer pour le sort d'un capitaine juif. La vérité c'est qu'il n'y a pas beaucoup de pays dans le monde qui aient tant fourni d'armes à l'esprit humain pour lutter contre la tentation du racisme.

La vérité c'est qu'il n'y a pas eu beaucoup de puissances coloniales dans le monde qui aient tant œuvré pour la civilisation et le développement et si peu pour l'exploitation. On peut condamner le principe du système colonial et avoir l'honnêteté de reconnaître cela.

On doit condamner la collaboration et Vichy mais on doit reconnaître que beaucoup de Français ont aidé des Juifs à échapper à la Gestapo.

On doit condamner les Français qui ont dénoncé des Juifs, qui ont servi d'auxiliaires à la machine de mort nazie mais on ne doit pas oublier toutes ces familles qui au péril de leur vie ont caché des enfants juifs parmi leurs propres enfants.

On doit condamner les miliciens qui se faisaient les complices des persécuteurs mais ne pas oublier les résistants des maquis, ceux du Vercors et des Glières qui se battaient jusqu'à la mort, et tous ceux qui sacrifiaient leur vie pour retarder les divisions blindées allemandes qui en juin 44 remontaient vers la Normandie. Que serait-il advenu si les chars étaient arrivés plus tôt ?

À force de demander à la France d'expier son passé,

À force de dénigrer la nation et de la charger de tous les péchés de la Terre,

À force de nourrir la honte d'être Français au lieu de chercher les raisons d'en être fier.

À force c'est notre capacité à vivre ensemble qui s'abîme, c'est notre participation à un destin commun qui est remise en question.

En abîmant la fierté d'être Français, en ressassant indéfiniment de vieilles haines qui appartiennent au passé, en voulant faire expier aux fils les fautes des pères, en cherchant dans l'histoire la cause de tous ses échecs on occulte les vraies causes qui sont dans le présent et dans chacun de nous. Et l'on dessert la cause que l'on prétend servir. Car dresser les Français les uns contre les autres, attiser les rancœurs et la haine de soi, c'est prendre le risque d'affaiblir la solidarité nationale et c'est desservir la cause de l'intégration que l'on prétend servir. Parce que l'on cherche rarement à s'intégrer à ce que l'on a appris à détester.

À ceux qui veulent vivre en France, la France ne demande au fond qu'une chose, c'est qu'ils admettent que la France ne commence pas avec eux mais qu'elle a commencé il y a bien longtemps et qu'elle veut seulement qu'on l'aime et qu'on respecte ses valeurs, qu'on prenne en partage son histoire, qu'on se sente partie prenante de sa destinée.

À ceux qui veulent vivre en France, nous voulons offrir la fierté d'être Français. Ceux qui méprisent la France, ceux qui la haïssent ne sont pas obligés de rester.

La France ne s'est pas bâtie sur l'oubli. Nul n'a oublié les peines, les souffrance et les malheurs. À Béziers, à Carcassonne, dans l'Ariège nul n'a oublié la croisade des Albigeois, Simon de Montfort et les légats du Pape criant : « tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens ! » Les protestants des Cévennes n'ont pas oublié les persécutions. Les vendéens n'ont pas oublié les colonnes infernales. Les républicains espagnols qu'on a parqués dans des camps n'ont rien oublié. Les enfants juifs qui ont vu leurs parents conduits au Vel d'Hiv par la police de Vichy n'ont rien oublié.

Non, nul n'a rien oublié des peines, des souffrances et des malheurs, mais pour tous l'amour de la France a été le plus fort et d'autant plus fort qu'il était fait de douleurs surmontées.

La France ce n'est pas l'oubli de ce que l'on est, c'est la foi dans un destin commun plus forte que la haine et la vengeance.

À Aigues-Mortes les femmes protestantes enfermées dans la Tour de Constance par Louis XIV ont gravé sur les murs de leur prison « Résister » aucune d'ente elles n'a écrit « mort à la France » comme on le voit aujourd'hui sur certains murs.

 

L'homme ne grandit pas quand la nation décline. Entre la fuite en avant dans le mondialisme et l'enfermement dans le local, entre le marché planétaire et les féodalités, entre le nomadisme et le tribalisme, je le dis haut et fort : la conception française de la nation est une force d'émancipation.

Le 21 avril 2002, le non à la Constitution européenne, la montée du vote extrême et du vote protestataire qui mettent la République en péril sont d'abord l'expression d'une profonde crise de l'identité nationale. Nous n'avons pas pris cette crise suffisamment au sérieux. Il faut cesser de se voiler la face, de se soumettre à la dictature du politiquement correct et de la pensée unique.

Il faut dire les choses comme elles sont :

C'est le dénigrement et l'affaiblissement de la nation qui attisent le nationalisme.

C'est l'incapacité croissante de la nation à protéger qui nourrit l'exaspération sociale.

C'est l'affaissement de l'identité française qui nourrit la crispation identitaire.

 

Qu'est-ce que la France sinon d'abord une idée de l'homme, du respect qu'on lui doit, des droits que nul ne peut lui retirer ?

Qu'est-ce que la France sinon un combat multiséculaire pour la dignité de la personne humaine et pour sa liberté ?

Qu'est-ce que la France sinon une culture qui se veut l'héritière de toutes les cultures qui dans le monde ont apporté quelque chose à l'idée d'humanité ?

Qu'est-ce que la France sinon la foi dans la capacité de l'homme à s'améliorer ? Sinon une identité forgée par des siècles d'histoire et des valeurs partagées. Une identité qui s'enrichit des différences de chaque nouvelle génération. Mais que les choses soient claires, pour moi les mots identité nationale sont une réalité républicaine profonde.

Qu'est-ce que la France sinon cet effort continuel pour faire la synthèse de ce qu'il y a de plus grand et de plus beau dans les hommes, sinon cet intercesseur unique entre ce qu'il y a de singulier dans chaque homme et ce qu'il y a d'universel dans tous les hommes, entre le sentiment de chacun et la raison de tous ?

La France c'est un art, c'est une culture, c'est une manière d'être et de penser.

La France c'est la pensée claire, c'est la raison, c'est l'esprit des Lumières.

C'est aussi 2000 ans de christianisme, 2000 ans de civilisation chrétienne. C'est Saint Denis, c'est Reims, c'est le Mont Saint-Michel. C'est Dieu sorti de la pénombre du sanctuaire où l'art roman l'avait enfermé pour être offert à la lumière des cathédrales.

C'est la morale laïque qui incorpore 2000 ans de valeurs chrétiennes.

C'est le respect de toutes les religions.

C'est l'universalisme et c'est l'humanisme.

Cette culture est une part de nous-mêmes, nous n'avons pas le droit de la renier, nous avons le devoir de la transmettre à nos enfants. Je veux que l'école redevienne un lieu de transmission de la culture. Je veux qu'à l'école on enseigne aux enfants les grands auteurs. Et je le dis pour que les choses soient claires. Nul ne peut faire le tri dans la culture française que l'on doit enseigner dans les écoles et les collèges. Nul ne peut exiger la censure d'un grand auteur parce qu'il heurte ses convictions philosophiques ou religieuses.

Voltaire, pour ne citer que lui, continuera si je suis élu à être enseigné dans les écoles françaises, il continuera à être dans les programmes des examens, il continuera à être joué librement dans les théâtres qui le souhaitent et je ne tolérerai pas que quiconque tente de s'y opposer par la violence. Parce que pour moi la liberté de l'esprit c'est la première valeur de la culture française et la première qualité de l'intelligence humaine. Si nous voulons une société de liberté, si nous voulons contribuer à faire de nos enfants des hommes libres, si nous voulons former des âmes libres, il nous faut protéger et encourager la liberté, et que reste-t-il de la liberté si les fanatiques peuvent menacer de mort les professeurs de philosophie, interdire les caricatures et mettre Voltaire à l'index ?

Celui qui ne veut pas respecter nos valeurs de liberté n'est pas obligé de rester.

Celui qui ne veut pas respecter notre conception de l'homme, celui qui récuse l'humanisme et l'universalisme, celui qui récuse l'usage de la raison, celui qui veut abolir l'héritage des Lumières et celui de la Révolution, celui qui ne veut pas reconnaître que la femme est l'égal de l'homme, celui qui veut cloîtrer sa femme, obliger sa fille à porter le voile, à se faire exciser ou à se marier de force, celui-là n'a rien à faire en France et il doit savoir que s'il reste, les lois et les principes de la République s'appliqueront à lui comme à tous les autres citoyens.

 

La France a affronté tant d'épreuves, surmonté tant de drames, qu'elle s'est forgé un caractère, une personnalité dont la force a souvent étonné le monde. La France de toujours, la vraie France, celle qui s'inscrit dans une longue histoire, celle qui est la somme de tous ces destins individuels, ne peut pas mourir parce que chacun d'entre vous veut qu'elle vive.

La France, dont tous ceux qui se sont battus pour elle de génération en génération ne savaient au fond qu'une chose c'est qu'ils ne voulaient pas la perdre, parce qu'ils sentaient que c'était ce qu'ils avaient de plus précieux à transmettre à leurs enfants, parce qu'ils comprenaient qu'en se battant pour elle ils se battaient pour eux, parce qu'ils avaient au fond de leur cœur le sentiment que ce lien mystérieux les rattachait à une destinée commune exceptionnelle à la grandeur de laquelle chacun avait sa part.

 

La France c'est une langue, une langue qu'elle met à la disposition de tous les hommes.

Le Français disait Rivarol ce n'est plus la langue française, c'est la langue humaine.

Le Français c'est l'âme de la France, c'est son esprit, c'est sa culture, c'est sa pensée, c'est sa liberté. C'est le droit de penser autrement que selon la pensée dominante.

La diversité linguistique c'est la condition de la diversité culturelle et du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

La langue n'est pas une marchandise, la langue n'est pas une technique.

L'obsession d'une langue unique au prétexte de l'efficacité est un leurre qui masque les effets de domination de la pensée unique dont la langue unique est l'antichambre. Mais l'efficacité n'est même pas prouvée : la Renaissance où tout le monde s'est mis à penser et à écrire dans sa langue nationale fut plus féconde pour la pensée humaine que les longs siècles de domination exclusive du latin, comme si la créativité était bel et bien inséparable de la diversité.

Nous avons le devoir pour nos enfants, pour l'avenir de la civilisation mondiale, pour la défense d'une certaine idée de l'homme, de promouvoir la langue française.

Si je suis élu, je mettrai la francophonie au rang des priorités diplomatiques de la France. Je renforcerai tout à la fois le dispositif de l'action culturelle de la France à l'étranger et l'aide à la création, parce que c'est par la création que le Français rayonne.

Je veillerai à ce que dans les entreprises installées sur le territoire français la langue de travail soit le Français dès lors qu'il n'y a aucune nécessité économique ou commerciale qui oblige à s'exprimer dans une autre langue.

Je me battrai pour que dans les instances européennes et à l'ONU le Français continue d'être employé. Ce sera naturellement une obligation absolue pour tout représentant de la France dans des organisations internationales.

Surtout je me battrai pour que soit généralisé partout en Europe l'enseignement de deux langues étrangères parce que c'est la seule façon efficace pour que l'hégémonie de l'anglais soit battue en brèche.

Mais le patrimoine linguistique de la France, ce n'est pas seulement le Français, c'est aussi l'extraordinaire richesse de ses langues régionales. Il suffit de se souvenir de l'œuvre immense de Mistral pour prendre conscience de l'appauvrissement que constituerait la disparition de toutes ces langues très anciennes qui ont concouru à la formation de la langue française et qui continuent à vivre en partie en elle.

Je souhaite que leur enseignement soit correctement pris en charge par l'éducation nationale.

Je souhaite que l'on soutienne leur pratique et leur diffusion. Mais je ne veux pas de cette logique de confrontation avec le Français que cherchent à faire prévaloir certains indépendantistes qui veulent en finir avec l'unité française que nous avons mis si longtemps à construire et qui reste le bien le plus précieux mais aussi le plus fragile que nous ayons à léguer à nos enfants.

Si je suis élu, je ne serai pas favorable à la charte européenne des langues régionales, non pas parce que je conteste les langues régionales, qu'au contraire je veux soutenir et développer, mais parce que je ne veux pas que demain un juge européen ayant une expérience historique du problème des minorités différente de la nôtre puisse décider qu'une langue régionale doit être considérée comme langue de la République au même titre que le Français.

Car au-delà de la lettre des textes il y a la dynamique des interprétations et des jurisprudences qui peut aller très loin. J'ai la conviction qu'en France, terre de liberté, aucune minorité n'est opprimée et qu'il n'est donc pas nécessaire de donner à des juges européens le droit de se prononcer sur un sujet qui est consubstantiel à notre pacte national et n'a absolument rien à voir avec la construction de l'Europe.

 

Qu'est-ce que la France ? La France c'est la République.

La République c'est la compréhension mutuelle, le respect de l'autre et la solidarité pour tous.

C'est la liberté de chacun garantie par la liberté de tous.

C'est l'égalité des droits pour tous garantie par les devoirs de chacun.

C'est la souveraineté de l'individu garantie par la souveraineté du peuple.

C'est l'espérance de la justice.

C'est la volonté générale exprimée par la loi.

C'est la nation qui se gouverne elle-même.

C'est l'État impartial. Idée sur laquelle je ne transigerai pas et qui passe par des nominations elles aussi impartiales.

C'est la foi dans la raison, dans l'Homme et dans le progrès.

C'est le mérite.

C'est la vertu civique comme fondement de la citoyenneté.

C'est la propriété et son respect comme conditions de la liberté.

C'est le service public comme condition de l'égalité de tous les citoyens, quelque soit leur rang, quelque soit leur handicap, quelque soit le territoire où ils vivent.

C'est l'éducation comme condition de l'émancipation.

La République fraternelle c'est celle de Mirabeau et des droits de l'homme, celle de Victor Hugo et des « Misérables », celle de Jules Ferry et des instituteurs, celle de Jaurès et des dreyfusards, celle du Général De Gaulle et des Français libres.

Nous sommes les héritiers de tous ceux qui dans l'histoire ont porté haut les idées de nation et de République quel que fût leur parti.

Qu'il soit bien entendu que nous ne laisserons pas plus le monopole de la République au Parti Socialiste que nous ne laisserons le monopole de la nation à l'extrême-droite.

Qu'ont fait les socialistes, pour la République ? Rien ! Qu'ont-ils l'intention de faire ? Pas davantage ! Les socialistes de jadis étaient d'abord des Républicains. Les socialistes d'aujourd'hui sont d'abord des socialistes. Ils ne sont pas préoccupés par l'avenir de la République. Ils sont préoccupés par l'avenir du socialisme. Ils n'ont pas tort : la République est toujours une idée neuve tandis que le socialisme est déjà une idée morte. Pour eux la République c'est l'affaire des partis. Pour nous c'est le problème de la nation. Pour eux la République c'est la gauche. Pour nous la République ce n'est pas la droite, ce n'est pas la gauche, ce sont tous les Français.

J'affirme qu'on affaiblit la République quand on cherche à abaisser l'autorité de l'État. On affaiblit la République quand on dénigre la nation. On affaiblit la République quand on soutient ceux qui violent la loi, ceux qui squattent le bien d'autrui, ceux qui veulent avoir tous les droits sans respecter les droits des autres. On affaiblit la République quand on s'efforce par tous les moyens de ruiner la morale de l'effort et du mérite, quand on transforme le citoyen en assisté, quand on confond l'égalité avec l'égalitarisme, la solidarité avec l'assistanat.

On affaiblit la République quand on la livre aux corporatismes et aux clientélismes, quand on l'abandonne aux communautarismes.

À ceux qui veulent l'ordre sans le mouvement, je dis que la République est un idéal de progrès, et que dans un monde qui change la République immobile est vouée au déclin.

À ceux qui veulent le mouvement sans l'ordre je dis que le désordre prépare toujours le triomphe de la loi du plus fort, qui est le contraire de la République.

Je veux dire que la République n'est pas un modèle figé pour l'éternité mais un projet toujours inachevé, un élan du coeur et de l'esprit, un idéal de civilisation et d'humanisme, un rêve d'universalité et de fraternité.

Je veux dire que la République, depuis 200 ans, c'est une continuité de principes, de valeurs, d'objectifs et une variété de moyens, de procédures et de priorités en fonction des circonstances.

Je veux dire que la République de Jules Ferry et de Gambetta n'était pas celle de Danton pas davantage celle de Robespierre, que celle de Clemenceau n'était pas celle de Lamartine et pas non plus celle du Général De Gaulle. Elle fut tour à tour girondine, jacobine, libérale, anticléricale, sociale, radicale... Elle se développa tour à tour par la conscription, par le suffrage universel, par l'école, par la laïcité, par la Sécurité sociale ou par le droit du travail... Elle s'affirma tour à tour dans la guerre et dans la paix, mais toujours combattant pour le même idéal.

Il y a cent ans presque Clemenceau prononça à la Roche-sur-Yon, sur cette terre vendéenne où il était né, un de ces discours dont il avait le secret « le combat éternel pour la libération de l'Homme continue, non plus nécessairement à coups de fusils, mais à coups de pensées, par le livre, par la parole, par la leçon. Le combat n'est plus aux chemins creux, il est à l'école (...) La République n'est rien qu'un instrument d'émancipation, un instrument d'évolution par l'éducation de tous ». On ne saurait mieux dire !

Nul ne se bat plus pour le drapeau blanc ou pour le drapeau rouge.

Il n'y a plus de chouans en Vendée,

La République a accompli le vieux rêve des rois. Elle nous a fait une nation une et indivisible. Une communauté de libres citoyens.

 

Être Français c'est aimer la France, c'est vouloir la République, c'est respecter l'État.

Être Français c'est prendre en partage l'histoire de la Franc et les valeurs de la France.

Être Français c'est penser qu'au-delà de la droite et de la gauche, au-delà des partis, au-delà des croyances, il y a quelque chose de plus grand qui s'appelle la France.

Je veux dire à tous les Français que la France est plus forte quand elle est unie, que la désunion des Français a toujours causé l'affaiblissement de la France, que lorsque la France est faible c'est chacun d'entre nous qui se trouve affaibli.

Être Français c'est se sentir l'héritier d'une seule et même histoire dont nous avons toutes les raisons d'être fiers. Si on aime la France, on doit assumer son histoire et celle de tous les Français qui ont fait de la France une grande nation.

J'ai cité Jaurès parce que Jaurès, quand il défend Dreyfus au nom de la justice, a fait de la France une grande nation. Je me sens l'héritier de Jaurès quand il dit à la jeunesse : « le courage c'est de choisir un métier et de le bien faire quel qu'il soit (...). Le courage c'est de dominer ses propres fautes, d'en souffrir, mais de ne pas en être accablé et de continuer son chemin (...). C'est de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l'univers profond. Je me sens l'héritier de Jaurès quand il dit : "contre toute menace et toute humiliation il faudrait défendre la France : elle est deux fois sacrée pour nous, parce qu'elle est la France et parce qu'elle est humaine" ».

J'ai cité Léon Blum parce que Léon Blum a fait de la France une grande nation quand il a dit : « l'émulation scolaire c'est l'égalité vraie ». Parce que je me sens l'héritier de l'enfant qui en 1936 grâce aux congés payés jette sur la mer son premier regard émerveillé et entend prononcer pour la première fois le mot « vacances ».

Oui, je me reconnais dans Jaurès et dans Blum, dans Jules Ferry, dans Clemenceau, comme je me reconnais dans Péguy, dans Lyautey et dans le Général De Gaulle, Chaban, dans Jean Monnet, dans Georges Pompidou.

Monsieur Hollande, que je n'ai pas souvent entendu citer Jaurès, a dit : « c'est une captation d'héritage ! » Je ne sais pas ce que feraient Jaurès ou Léon Blum de nos jours, pas plus que je ne sais ce que ferait le Général De Gaulle. Et Monsieur Hollande ne le sait pas non plus !

Ce que je sais c'est que l'histoire de France n'appartient à personne et qu'en tout cas elle n'a pas commencé avec le parti socialiste.

Ce que je sais c'est qu'il n'y a qu'une histoire de France et non pas deux, parce qu'il n'y a qu'une seule France.

Ce que je sais c'est qu'il y a des gens pour lesquels le patriotisme de parti sera toujours plus grand que l'amour de la patrie, alors que pour moi rien n'est plus grand que l'amour de la France.

Ce que je sais c'est qu'il y a des gens qui ne comprendront jamais que l'on veuille rassembler les Français, qui ne comprendront jamais que l'on puisse dire que lorsqu'il s'agit de la France il n'y a pas de camp.

Ce que je sais c'est que la gauche qui proclame que l'Ancien régime ce n'est pas la France, que les Croisades ce n'est pas la France, que la chrétienté ce n'est pas la France, que la droite ce n'est pas la France.

Cette gauche là je l'accuse de communautarisme historique.

C'est la même gauche qui fait semblant de croire que tous les antidreyfusards étaient de droite et tous les dreyfusards de gauche, que tous les pétainistes étaient de droite et tous les résistants de gauche. Ce que je sais c'est que cette gauche-là n'a rien à voir avec celle de Jaurès, ni avec celle de Léon Blum, qu'elle n'a ni pris la Bastille, ni fondé la Première République, ni la Deuxième, ni même la Troisième. Ce que je sais c'est que c'est le Général De Gaulle qui a donné le droit de vote aux femmes, créé la Sécurité Sociale, achevé la décolonisation et sauvé deux fois la République, et non le Parti Socialiste !

Ce que je sais c'est qu'à Londres, le Général De Gaulle n'a pas demandé pas à Jean Moulin s'il était de droite ou s'il était de gauche.

Ce que je sais c'est que lorsque la Gestapo a décidé de prendre en otages Georges Mandel et Léon Blum et de les retenir prisonniers dans une petite cabane en bordure du camp de Buchenwald, elle n'a pas fait de différence entre la France de gauche et celle de droite. Dans cette cabane il n'y avait pas deux France à l'ombre sinistre des chambres à gaz, il n'y en avait qu'une.

Ce que je sais c'est que Napoléon en achevant la Révolution a dit : « De Clovis au Comité de Salut Public, j'assume tout ».

Je ne veux donner de leçon à personne, mais quand j'entends dire que l'on ne peut pas admirer à la fois Saint Louis et Carnot, je pense toujours à Marc Bloch, ce grand historien républicain et laïque qui a écrit : « Il y a deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l'histoire de France : ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims, ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération ».

Ce n'est pas une querelle d'historiens. C'est un débat profondément politique car au travers de deux conceptions de l'histoire ce sont deux conceptions de la nation qui s'opposent.

Il y a ceux qui ne chercheront toujours que la victoire d'un parti sur tous les autres et il y a ceux qui ont toujours à l'esprit l'intérêt commun. Nous sommes de ceux qui veulent parler à tous les Français.

Il y a ceux qui veulent un Président de la République qui sera le porte-parole d'une partie de la France contre l'autre. Nous sommes de ceux qui veulent un Président qui parlera au nom de tous les Français.

Il y a ceux qui veulent diviser pour régner. Nous sommes de ceux qui veulent rassembler.

Il y a ceux qui attisent encore la lutte des classes et il y a ceux qui disent que le sort de chacun dépend de celui de tous.

Il y a ceux qui cherchent toujours dans l'idéologie la réponse toute faite à toutes les questions et qui veulent encore résoudre les problèmes du XXIe siècle avec les solutions du XIXe siècle et il y a ceux qui sont convaincus que la seule politique qui vaille est celle qui se fait à partir des réalités, et d'abord des réalités humaines.

Je crois en la France, en la capacité des Français d'accomplir d'aussi grandes choses que celles qu'ont accompli leurs aïeux. Je crois qu'au-delà des convictions partisanes, au-delà de la droite, de la gauche et du centre, au-delà des extrêmes qui servent de porte-voix à tous ceux qui ont le sentiment qu'on ne les écoute jamais, la grande force de la France est dans tous ces Français qui sont avant tout des hommes de bonne volonté qui aiment leur pays et qui veulent pour lui et pour leurs enfants ce qu'il y a de mieux.

Voici pourquoi je veux parler à tous les Français sans exception parce que la France a besoin de l'énergie de tous ses enfants.

La France traverse une crise morale. La politique peut y remédier parce que la politique en est la cause.

Cette crise morale est une crise des valeurs, une crise des repères, une crise du sens, une crise de l'identité.

Le dénigrement de la nation est au coeur de cette crise.

être Français, c'est parler et écrire le Français.

être français, c'est respecter la loi.

Celui qui entre clandestinement en France, celui qui ne fait aucun effort pour s'intégrer, celui-là ne doit pas s'attendre à se voir reconnaître les mêmes droits qu'un Français.

être Français c'est avoir des droits mais c'est aussi se reconnaître des devoirs.

être Français c'est recevoir de la France et lui donner en retour.

Le problème de la France c'est qu'à force, pendant trop longtemps, de ne rien exiger de personne, même pas le respect de ses valeurs et de ses lois, elle a nourri l'une des plus graves crises d'identité de son histoire.

C'est la raison pour laquelle il faut maîtriser l'immigration. Accepter d'accueillir toute la misère du monde, c'est tirer toute la société vers le bas. C'est faire le malheur des immigrés que l'on n'arrive plus à intégrer, et le malheur de tous les autres. Ce sont comme toujours les plus modestes et les plus vulnérables qui payent le plus cher : le jeune de 20 ans qui meurt asphyxié dans sa cachette ou qui coule au fond de l'océan avec sa pirogue, les familles brûlées vives dans des hôtels sordides où elles s'entassent parce qu'on ne sait pas où les loger. En régularisant tous les sans-papiers on incite une masse croissante de malheureux à immigrer clandestinement dans l'espoir d'être régularisés un jour et l'on fait monter le ressentiment chez ceux qu'on accueille si mal et chez ceux qui se sentent de plus en plus étrangers dans leur propre pays. Si je suis élu président de la République, il n'y aura pas de régularisation globale.

Il faut lutter contre l'immigration clandestine qui fait la fortune des marchands de sommeil et des passeurs sans scrupule qui n'hésitent pas à mettre en danger la vie des pauvres malheureux dont ils exploitent la détresse.

Je souhaite que celui qui a été reconduit dans son pays ne puisse pas obtenir un titre de séjour en France pendant les 5 ans qui suivent.

Je souhaite que les étrangers en situation irrégulière soient exclus du droit au logement opposable.

Protéger c'est protéger la France, ses valeurs, c'est parce que je veux qu'elle reste ouverte, accueillante, généreuse, que je veux que l'immigration soit maîtrisée, que notre pays fixe chaque année le nombre des étrangers qu'il peut accueillir dans des conditions qui permettent de respecter la dignité des personnes.

Je souhaite que l'immigré en situation régulière ne puisse faire venir sa famille que dans la mesure où celle-ci a appris, avant de pénétrer sur notre territoire, à parler le Français et après que nous nous soyons assurés que les revenus de son travail lui permettent de la faire vivre et de la loger décemment.

Je souhaite qu'on ne puisse pas s'installer durablement en France sans se donner la peine d'écrire et de parler le Français.

C'est parce que je veux protéger la France et ses valeurs que je souhaite que soient définis les principes de l'entrée et du séjour des étrangers dans notre pays.

 

*

 

À Bayeux en 1946, le Général De Gaulle avait conclu son discours de la manière suivante :

« C'est la peine éternelle et c'est la grandeur de la France de ne s'arrêter jamais, car, pour elle, cesser d'agir reviendrait à disparaître. Mais il suffit d'évoquer l'univers rude et mouvant dans lequel nous avons à vivre pour tirer cette conclusion : nous ne jouerons notre rôle, nous n'obtiendrons ce qui nous est dû, nous ne servirons comme il convient l'intérêt supérieur du monde que si, après tant d'épreuves et de leçons et malgré les préjugés, les préventions et les chimères, nous organisons la direction nationale, c'est-à-dire l'État, pour l'efficience, la cohésion, la continuité ! Où est l'avenir ? Il est en nous. »

Que dire de mieux, que dire de plus ? Sinon ces deux mots magnifiques :

 

Vive la République !

Vive la France !

 

 

 

 

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