Voici le message que j'ai envoyé hier au soir (21-11) à Laurent Ruquier, l'animateur de l'émission humoristique "On a tout essayé" ("France 2" à partir de 19h). L'invité était Philippe Marini, sénateur UMP de l'Oise. 

Ce sénateur a déposé une proposition de loi pour freiner l'abus de l'usage de l'anglais.

M. Henri Masson

 

 

 


De :

  M. Henri Masson
  espero.hm@wanadoo.fr

 

 

À : Laurent Ruquier

      Émission "On a tout essayé"

      France 2

       l.ruquier@france2.fr

 

 

                                                 Le 22 novembre 2005


Bonjour Laurent,

 

J'ai été consterné ce soir par l'appui excessif et pesant donné à l'anglais par trois participantes du plateau de "On a tout essayé", comme si l'on ne subissait pas assez le conditionnement qui pousse à croire que l'on est moins que rien sans l'anglais.

À Toronto, j'avais rencontré un syndicaliste des États-Unis, ancien mineur britannique, qui m'avait dit : "Celui qui impose sa langue
impose l'air sur lequel doivent gesticuler les marionnettes".

Alors, ces dames, qui refuseraient sans doute et avec raison de travailler pour le roi de Prusse, travaillent-elles pour la reine d'Angleterre ou pour le trio Bush-Blair-Berlusconi (dont le programme était basé sur les trois "i" : "Inglese, Internet e Imprese" (Anglais, Internet et Affairisme) ?

Ces personnes devraient méditer sur des remarques faites à plusieurs reprises par le philosophe Michel Serres selon lequel il y a aujourd'hui plus d'inscriptions en anglais sur les murs de Paris qu'il n'y en avait en allemand durant l'Occupation.

Elles devraient méditer aussi sur l'ouvrage rédigé par un ancien du British Council sous le titre "Linguistic Imperialism" (Oxford
University Press, 1992) et celui qu'il a publié plus récemment sous le titre "English-Only Europe ? Chalenging Language Policy" (Routledge, Londres, 2003).

Et elles pourraient enfin méditer au moins sur ces quelques phrases du Rapport Grin sur "L'enseignement des langues étrangères comme politique linguistique" :

 

"1) le Royaume-Uni gagne, à titre net, au minimum 10 milliards d´Euros par année du fait de la dominance actuelle de l´anglais ;

2) si l´on tient compte de l´effet multiplicateur de certaines composantes de cette somme, ainsi que du rendement des fonds que les
pays anglophones peuvent, du fait de la position privilégiée de leur langue, investir ailleurs, ce total est de 17 à 18 milliards d´euros
par année ;

3) ce chiffre serait certainement plus élevé si l´hégémonie de cette langue venait à être renforcée par une priorité que lui concéderaient d´autres États, notamment dans le cadre de leurs politiques éducatives respectives ;

4) ce chiffre ne tient pas compte de différents effets symboliques (comme l´avantage dont jouissent les locuteurs natifs de la langue
hégémonique dans toute situation de négociation ou de conflit se déroulant dans leur langue) ; cependant, ces effets symboliques ont
sans doute aussi des répercussions matérielles et financières" .

 

Ce rapport de 127 pages peut être téléchargé à l'adresse : <http://cisad.adc.education. fr/hcee/documents/rapport_Grin.pdf>

Pourquoi ne pas en inviter l'auteur, François Grin, qui est :
o Professeur d'économie à l'École de traduction et d'interprétation (ETI) de l'Université de Genève
o Directeur-adjoint du Service de la recherche en éducation (SRED) du Département genevois de l'instruction publique.
o Consultant en matière de politique linguistique et de politique de l'éducation pour des organismes officiels suisses ou étrangers, des
organisations internationales et des organisations non gouvernementales ?


Bien cordialement.
Henri Masson