De :

  Patrick Leloup
 (44) saint-Sébastien-sur-Loire
 pleloup44.anti.pourriel@laposte.net

 

 

À : M. Jacques Barrot, commissaire européen

      cabinet-barrot@cec.eu.int

      M. Pascal Lamy, commissaire européen

      Commissaire-Lamy@cec.eu.int

 

 

                                                   Le 16 décembre 2004


objet : Lutte contre le tout anglais

 

 

Monsieur,



Les institutions européennes sont très attentives au respect de la libre concurrence et sont fermement hostiles à tout ce qui pourrait fausser
cette concurrence et favoriser telle ou telle entreprise ; selon le récent projet de constitution, «l'Union offre à ses citoyennes et à ses
citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, et un marché unique où la concurrence est libre et non
faussée».

Pourtant, une très grave violation de la libre concurrence, de la liberté et de la justice est encouragée par les institutions européennes, par la place accordée dans ces institutions, en violation des traités, à la langue nationale d'un nombre très réduit de pays de l'Union : la langue anglaise.

Dans tous les domaines, les avantages considérables retirés de cette situation de monopole par les pays anglophones sont parfaitement connus de longue date.

Winston Churchill disait en 1943 : «I am very much interested in the question of basic English. The widespread use of this would be a gain to us far more durable and fruitful than the annexation of great provinces».

En 1987, le British Council avait estimé que la vraie richesse de la Grande Bretagne n'était pas le pétrole de la Mer du Nord, mais sa langue:
«Britain's real black gold is not North Sea oil but the English language». (British Council, 1987).

Voici ce qu'on pouvait lire dans le Washington Post et l'International Herald Tribune en 1992 :

«The use of English boosts the political influence of the English-speaking countries in ways perhaps more potent than gross domestic product or military firepower » (International Herald Tribune, 7 juillet 1992).

(«L'emploi de l'anglais accroît l'influence politique des pays anglophones beaucoup plus puissamment qu'une forte économie ou une grande puissance de feu»).

David Rothkopf, directeur général du cabinet de conseils «Kissinger Associates », écrit dans un ouvrage paru en 1997 et intitulé «Praise of
Cultural Imperialism» (Louange de l'impérialisme culturel) :

« Il y va de l'intérêt économique et politique des États-Unis d'Amérique de veiller à ce que, si le monde adopte une langue commune, ce soit l'anglais [...]. »

L'Union est censée promouvoir «la justice et la protection sociales, l'égalité entre les femmes et les hommes», mais chacun peut constater
qu'elle lutte très efficacement contre l'égalité entre les citoyens natifs des pays anglophones et les autres citoyens européens. «L'Union
respecte la richesse de sa diversité culturelle et linguistique, et veille à la sauvegarde et au développement du patrimoine culturel européen», mais dans les faits, la langue anglaise est la langue de l'Union tandis que la diversité culturelle et linguistique ne relève que du folklore.

«[...] toute discrimination exercée en raison de la nationalité est interdite», mais la discrimination en raison de la langue maternelle est encouragée, alors qu'elle est une discrimination indirecte en raison de la nationalité.

«L'Union est fondée sur les valeurs [...] d'égalité [...]. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la tolérance, la justice, la solidarité et la non-discrimination», mais les citoyens de langue maternelle autre que la langue anglaise font l'objet d'une intolérable discrimination et le plus souvent, seuls les citoyens de langue anglaise ont droit à l'information émanant des institutions européennes, et ils sont parfois même les seuls à pouvoir prétendre y travailler, puisqu'on peut citer de nombreuses offres d'emplois réservés aux seuls citoyens de langue maternelle anglaise.

Quand les institutions européennes cesseront-elles enfin de favoriser et soutenir cette illégitime et insupportable situation ?

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments distingués.

Patrick Leloup