De : M.
Claude MARCET
Député au
Grand Conseil de Genève et membre de l'Association défense du français
(en Suisse)
Genève -
SUISSE
Courriel : marcet(chez)infomaniak.ch
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Monsieur Jean-Marc TRISCONE
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À
Monsieur Jean-Marc TRISCONE
Doyen de la Faculté des Sciences
Université de Genève
Quai Ernest Ansermet 24
1205 GENÈVE
Courriel :
Jean-Marc.Triscone@physics.unige.ch
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Genève, le 14 août 2008
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Monsieur,
J'ai bien reçu, pour mon information en raison de
mon appartenance au Grand Conseil de notre canton, votre publication
«
Sciences news
».
Permettez-moi par ces quelques lignes de revenir
sur votre envoi pour vous dire que j'ai été et reste
particulièrement choqué d'avoir reçu une revue écrite uniquement en
anglais par une Faculté financée essentiellement par les deniers
publics d'une collectivité, collectivité dans les textes étatiques
de laquelle nous ne trouvons nulle trace de l'anglais, sauf erreur
de ma part, comme langue officielle.
Cette façon de faire, qui se veut - comme vous
pourriez le dire -
«
in
»
dans un concept de mondialisation dans le domaine scientifique qui
est le vôtre, pourrait (j'utilise le conditionnel, car j'ose encore
espérer qu'il s'agit d'une erreur de
«
casting
»,
comme vous pourriez aussi le dire, plus exactement en français un
réel défaut de conscience) malheureusement faire sérieusement
admettre l'existence d'une mentalité de valet et de marionnette face
au néo-colonialisme et à l'impérialisme anglo-américain actuels sur
celte planète, valet-marionnette fondamentalement incapable de
comprendre les menées hégémoniques de la puissance économique et
politique du moment - puissance qui ne cache nullement ses ambitions
- avec à terme, si rien n'est sérieusement entrepris,
l'asservissement et le statut
«
à vos ordres
» (y
compris politique) de toute une société, la nôtre.
Il serait apparemment nécessaire que certains
décideurs dans ce canton, également au sein de votre Faculté,
puissent encore comprendre qu'initialement on tente de faire passer
l'anglais, en invoquant moult raisons, dont l'une, en ce qui
concerne plus particulièrement votre domaine des sciences, est la
nécessité d'avoir une langue internationale unique (tiens au fait
Louis Pasteur parlait-il l'anglais ? ...), mais que derrière tout
cela se cache une réelle volonté du monde néo-colonialiste et
impérialiste anglo-américain de faire passer initialement tout ou
partie de sa culture pour permettre ensuite d'imposer ses choix
politiques. L'histoire de ce monde est faite d'exemples de ce type
et il est grave, me référant à votre envoi, qu'au sein de
votre Faculté certains ne soient même pas (même plus ?) capables de
se rendre compte de ce problème.
Restant toujours dans votre domaine des sciences,
je trouve aussi particulièrement choquant qu'à Genève des étudiants
de langue maternelle française doivent, dans une université de
langue française étudier et converser en anglais, parce que c'est la
langue internationale de la science. Que l'on communique en anglais
entre instituts, je veux bien l'admettre, mais qu'à Genève on doive
se plier au diktat anglo-américain, il y a un pas qu'il ne faudrait
peut être pas franchir.
Dans d'autres domaines universitaires, la
gangrène progresse aussi. À l'EPFL, un cours a été donné en anglais
parce que l'un des étudiants ne parlait pas le français et cela sans
même se poser la question de savoir si l'un des étudiants romands
présents dans la salle parlait, lui, l'anglais. À Genève dans un
institut réputé, subventionné aussi par les deniers publics, il est
prévu de ne même plus demander aux futurs étudiants de parler le
français (je veux l'anglais, le français à la poubelle) et l'on sait
déjà que dans certaines disciplines universitaires en Suisse
romande on envisage désormais de ne plus faire passer les examens
finaux qu'en anglais. Des titres universitaires et des fonctions
professionnelles en Suisse n'apparaissent désormais plus qu'en
anglais, fait hautement, inadmissible s'il en est.
Dans les domaines économiques et financiers, les
mêmes dérives sont malheureusement constatées, car de grandes
entreprises étrangères réussissent désormais à imposer leurs
standards linguistiques étrangers sans nulle réaction des vassaux et
marionnettes du monde néo-colonialiste et impérialiste
anglo-américain, vassaux et marionnettes que l'on retrouve
malheureusement trop souvent dans les sphères dirigeantes de la
politique en Suisse. Parmi d'innombrables exemples, je peux citer,
dans mon domaine, le fait que de
«
Normes RPC
»
nous sommes arrivés à
"Swiss GAAP"
sans que cela choque nullement les décideurs politiques suisses ;
il est vrai que, depuis que les grandes fiduciaires
anglo-américaines se sont installées en Suisse, l'anglais est
devenu la seule et unique règle. Pour des raisons économiques,
certaines entreprises utilisent aussi (ou ont voulu et ont fait
machine arrière) l'anglais pour la transmission de leurs
informations. Le
«
sale » de la Migros est l'un des
exemples les plus frappant.
En Australie le principe politique est : «
Tu es le bienvenu, mais tu t'adaptes ou tu t'en vas », en
Suisse et à Genève en particulier le principe politique est « Tu es
le bienvenu, je me couche devant toi pour faire ce que tu
veux, car ma mentalité est celle d'une péripatéticienne à qui cela
ne fait rien d'être considérée comme le fossoyeur de la culture de
son pays, si elle peut y retirer quelques intérêts particuliers ».
Ainsi ce gouvernement genevois pour bien comprendre les dérives
inadmissibles actuelles que l'on peut constater, envoie déjà pour
information aux députés genevois la copie d'une lettre en anglais
(eh oui 1!), gouvernement qui lorsqu'on lui fait une remarque face à
ce qu'il faut bien comprendre comme étant une ignominie culturelle,
répond à côté de la plaque et ne juge même pas utile d'envoyer une
traduction en français aux députés qui ne parlent pas ou ne lisent
pas l'anglais n'est nul besoin ici de rappeler le site Internet de
l'État de Genève qui n'est majoritairement qu'en anglais derrière sa
fenêtre Économie). un vrai scandale, s'il en est.
J'ose
espérer qu'un jour, le monde politique suisse un peu moins « patate
creuse, ventre mou et tarte à la crème (à quelques exceptions près)
que celui qui tient les rênes actuellement de nos cantons et de
notre pays fera voter des lois qui, comme au Québec, interdiront
l'utilisation de l'anglais quand les mots français, allemands,
italiens, romanche existent pour chaque région concernée du pays,
avec à la clef de sérieuses amendes pour les entreprises
commerciales qui, comme cela se passe aussi au Québec dérapent,
s'aplatissent et baissent leur culottes devant le néo-colonialisme
économique anglo-américain, sans nullement voir à terme les
problèmes qui inéluctablement surgiront.
(Québec, site des plaintes
:
http://www.oqlf.gouv.qc.ca/francisation/respect/index.htlm)
Vous vous êtes très certainement rendu en
Angleterre et aux États-Unis, dans des régions très touristiques ou
internationales ; dites-moi si ces pays jugent utile de mettre, ne
serait-ce que des indications essentielles en langues étrangères
dans certains lieux importants : (aéroport, etc.). Y répondre,
c'est comprendre la mentalité du monde anglo-américain :«
j'impose, chez moi comme ailleurs, car
il y Il assez de vassaux, marionnettes et collabos potentiels
dans le monde pour nous suivre comme des
«
toutous
» et
le pire, c'est que cela est vrai, il n'a qu'à constater ce qui se
passe à Genève avec un pouvoir politique à la botte. Il
faudrait que certains décideurs politiques n'oublient pas que le
monde anglo-américain sait toujours inventer ce qui lui paraît
nécessaire (pas hélas n'importe quoi et son contraire d'ailleurs)
pour atteindre ses objectifs, principalement imposer sa
volonté partout où il le peut , dans le seul ses de ses intérêts.
Pour finir, et pour que cela soit clair, je n'ai
rien contre l'anglais en tant que véhicule de communication
dans certains domaines (j'avais de la famille en Angleterre où j'ai
étudié la langue), mais il y a des limites qu'il ne faudrait
peut-être pas dépasser ce qui est pourtant fait pour des raisons Qui
ont plus trait à l'intérêt particulier qu'à l'intérêt général de
notre société. Que l'on mette un terme anglais pour faciliter la vie
de nos hôtes (comme cela se voit dans certains pays) est une chose,
mais que I'on supprime le français au profit de I' anglais est
un pas inadmissible que seuls des vassaux au mieux, des collabos au
pire, peuvent se permettre d'envisager.
Cette lettre n'appelle pas de réponse.
Je vous prie d'agréer, Monsieur, l''assurance des mes sentiments
distingués.
M.
Claude Marcet