École : La Flandre s'apprête à prendre des mesures pour assurer l'accès des élèves ... néerlandophones dans ses classes

 

Un enseignement bilingue à Bruxelles ?

 

 

De plus en plus de petits francophones fréquentent les écoles flamandes. Le CDH plaide pour un enseignement bilingue à Bruxelles, sur une base volontaire.

 

Les écoles flamandes de Bruxelles attirent de plus en plus d’élèves francophones. À tel point que certains parents néerlandophones doivent parfois frapper à la porte de plusieurs établissement avant de pouvoir inscrire leur rejeton !
Cette situation a mobilisé six députés flamands, issus de tous les partis flamands du gouvernement bruxellois (VLD-VU, CD&V, SP.A et Groen !). Ils viennent de déposer, au parlement flamand, une proposition de décret visant à accorder, dans les écoles du réseau d’enseignement néerlandophone bruxellois, un «droit de priorité limité» aux enfants issus de familles qui parlent le néerlandais dans la vie de tous les jours.
Concrètement, la formule proposée par les signataires est la suivante : durant l’année qui précède la rentrée scolaire de l’élève, des listes d’inscriptions sont ouvertes, école par école, entre le 1er septembre et le 31 janvier. Il est fixé, par établissement, une capacité maximale d’élèves. Si le nombre de demandes d’inscription est inférieur à cette capacité, toutes les demandes seront acceptées. Si en revanche le nombre de demandes dépasse cette capacité, priorité sera donnée aux demandes néerlandophones. Un élève néerlandophone s’inscrivant le 30 janvier serait ainsi prioritaire par rapport à un élève issu d’une famille non néerlandophone ayant introduit sa demande en novembre. Si la proposition de décret est acceptée, cette procédure entrerait en vigueur à la rentrée scolaire 2005.
Selon l’opposition CDH bruxelloise, l’instauration de quotas d’écoliers en fonction de leur idiome est contraire au droit européen. Le traité de Rome, modifié par celui de Maastricht, prévoit l’abolition de toute discrimination basée sur la nationalité entre les travailleurs de l’Union, pour l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail. Mais la Cour de justice européenne a encouragé l’entrée de l’enseignement dans le champ d’application du traité. Ainsi, un État ne peut plus réserver l’accès d’écoles à ses nationaux.
Cette objection juridique posée, le chef de groupe CDH au parlement bruxellois, Benoît Cerexhe, affirme que cette initiative flamande est révélatrice d’un vrai problème : à Bruxelles, de plus en plus de parents francophones arrivent à la conclusion que l’immersion linguistique est la seule solution efficace pour que leurs enfants deviennent bilingues. Bruxelles compte 22 % de chômeurs et 90 % d’entre eux sont unilingues francophones, dit Cerexhe. Constatons que l'apprentissage actuel des langues fonctionne mal. Ceux qui peuvent se payer des cours de langue particuliers ou des stages de voile en Zélande finiront toujours par s’en tirer, mais les autres ? La solution, c’est faciliter l’organisation, sur base volontaire, de cours généraux en néerlandais dans les écoles (francophones) bruxelloises !
La Communauté française, compétente en matière d’organisation de l’enseignement, permet l’immersion dans les écoles wallonnes et bruxelloises depuis 1998. Pour certains, cela heurte la loi de 1963 stipulant que l’emploi des langues dans les écoles bruxelloises est de compétence fédérale. Le Conseil d’État est saisi du point. En attendant, une résolution demandant à l’exécutif bruxellois d’initier toute collaboration et concertation (pour dispenser des cours bilingues) sera mise aux voix au parlement régional aujourd’hui. PS, Écolo et CD&V devraient la voter. Le MR est divisé : le PRL est plutôt pour, le FDF clairement contre..


WIilliam Bourton


 

« Les parents doivent suivre leur enfant »

Deux cent soixante élèves fréquentent la Prinses Paolaschool, un établissement primaire communal (néerlandophone) de Woluwe-Saint­Lambert. Parmi eux, 80 % de petits francophones ! Une situation qui ne semble pas vraiment gêner Sonja Laeremans, directrice depuis 20 ans.

Je n’ai personnellement jamais eu à refuser l’inscription d’un élève néerlandophone par manque de place, explique-t-elle. Au moment des inscriptions, je n’ai jamais exigé non plus qu’un des deux parents parle le néerlandais. Par contre, je demande que les parents «suivent» leur enfant et qu’ils fassent tout pour entretenir le néerlandais en dehors de l’école, en l’inscrivant à une académie de musique en néerlandais par exemple...

Selon la directrice, la motivation principale des parents francophones dans leur démarche est d’offrir à leur enfant une facilité qu’ils n’ont pas eue eux-mêmes (devenir bilingue). Certains me disent aussi que le niveau de l’enseignement néerlandophone est meilleur ; mais, là, je les contredis, car, personnellement, j’ai inscrit mes enfants dans l’enseignement francophone et je peux témoigner que les cours y sont aussi de qualité.

 

« Les parents veulent offrir à leur enfant une facilité qu’ils n’ont pas eue eux-mêmes »

Les parents néerlandophones se plaignent-ils de quelque baisse de la qualité de l’enseignement, consécutive au fait que -- au début de l’année du moins -- une majorité de la classe maîtrise mal la langue ?

Non, répond la directrice. En fait, le niveau ne diminue pas parce que, comme je l’ai expliqué les jeunes francophones sont motivés et travaillent à la maison...

Habituellement, l’école décourage les inscriptions de jeunes francophones en cours de cycle. On constate par ailleurs que, plus on «avance» dans le cycle, plus la proportion de francophones diminue : ils sont ainsi 50 % de moins en sixième année qu’en première. 

William Bourton

 

Source : Le Soir, journal du vendredi 26 mars 2004