Belgique,
ton identité fout l’camp !
Dans quelle langue dois-je vous écrire pour être compris ? Voilà la
question qui me hante. J’ai choisi le français, puisque c’est la
langue que j’ai apprise dans ma tendre enfance en Belgique, il y a un
demi-siècle.
Depuis 30 ans, j’habite le Québec et à chaque visite en Belgique, je constate un recul du
français. Autant dans les médias écrits, la publicité, l’affichage
que dans le langage courant. Au cours des 20 dernières années, j’ai
assisté au Québec à des améliorations remarquables de l’usage du
français. Il est vrai qu’il a fallu une loi pour favoriser cet usage. Mais le Québec n’est-il pas
à l’origine de la plupart des nouveaux mots crées à partir de racines
françaises pour décrire une réalité technologique angloaméricaine
? Courriel, pourriel, clavardage, logiciel, etc.
Un revendeur de pièces de vélo à Bruxelles ne pourrait comprendre
ce qu’est la potence du guidon : il ne connaît que le mot anglais. Ne
parlons pas des RYD, abréviation de termes anglais (Responsible Young
Drivers).
Ce lundi 5 janvier, dans votre quotidien, je trouve un taximan car-jacké
(en français un chauffeur de taxi arnaqué, ou molesté ou volé).
Mais également : Sobelair light (en français, allégé). (...) Dans les
commerces du centre-ville, presque tout est affiché en anglais. On ne
trouve pas d’articles en français ou en néerlandais. Les
exemples d’assimilation à l’anglo-américain pleuvent comme la
pluie éternelle sur Bruxelles. J’en ai la nausée. Que le français
ou le néerlandais soit votre langue, peu importe :
défendez-la, c’est votre identité. Le peuple belge perd son
identité comme il perd ses langues.
Serge
Sokolski (par courriel)
Source
: Le Soir, journal du lundi 5 janvier 2004