L'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde bascule dans le camp francophone.

 

Nous vous l’annoncions dès nos éditions d’hier : le rapport de force communautaire a basculé dans la circonscription électorale de Bruxelles-Hal-Vilvorde. En 1999, on y dénombrait 11 députés francophones et 11 Flamands. Dimanche soir, cette ventilation est passée à 13-9 en faveur des premiers. Ce glissement est une surprise. Comment l’expliquer ?

Il y a d’abord l’évolution démographique, favorable aux francophones. Et ce malgré tous les efforts consentis par la Flandre (tant en termes financiers que de propagande) pour attirer des néerlandophones à Bruxelles.., ou pour décourager les francophones d’élire domicile en périphérie.
En juin 1999, si francophones et Flamands s’étaient équitablement partagés les 22 sièges en jeu à Bruxelles-Hal-Vilvorde, les 11députés francophones avaient tout de même attiré 422 000 électeurs, contre 336 000 seulement pour les 11 néerlandophones. C’est uniquement par le jeu de l’apparentement avec Louvain que le onzième siège flamand (Volksunie) put être assuré. La NV.A n’ayant pas, loin s’en faut, le même taux de pénétration que la défunte VU, ce siège a facilement basculé dans le cap francophone. Oui, mais ce sont deux sièges qui ont changé de rôle linguistique...

Un deuxième élément explique ce basculement : c’est l’effet dit "nouveau Belge". Énormément d’étrangers sont devenus Belges, dans les années 2002-2003 grâce à la nouvelle loi sur la nationalité et à l’opération de régularisation. Il est généralement admis que ces nouveaux électeurs votent plus spontanément pour des candidats francophones.

Enfin, ne négligeons pas le vote des expatriés. Les Belges résidant à l’étranger peuvent s’inscrire dans l’arrondissement électoral de leur choix. Il semble qu’ils se soient massivement inscrits à Bruxelles-Hal-Vilvorde. Et, statistiquement, ces expatriés votent majoritairement "francophone".

Quelles pourraient être les conséquences politiques de ce déséquilibre communautaire au sein de l’arrondissement central ? Spontanément, on serait tenté de répondre que les partis flamands vont revenir avec leur vieille revendication de scission à l’occasion de la prochaine négociation gouvernementale... Pourtant, c’est peu probable.

Le VLD comme le SP.A (si l’on accepte l’hypothèse que, ayant gagné les élections au nord, ces deux formations seront autour de la table) pratiquent la « real­politik ». Non seulement elles savent que les francophones n’accepteront jamais de trancher le cordon entre Bruxelles et la périphérie mais, de surcroît, elles ont compris que cette séparation serait contre-productive en termes de représentativité parlementaire. En effet, séparés de Hal-Vilvorde, les Flamands de Bruxelles pourraient ne plus envoyer d’élus à la Chambre !

En revanche, il y a gros à parier que les partis flamands tentent, d’une manière ou d’une autre, de reconstruire le "pont" entre le corps électoral flamand de Bruxelles et celui de Louvain (un dispositif cassé par la Cour d’Arbitrage en février). Avec, en sus, une clef de répartition francophones-Flamands figée une fois pour toutes (12-10 ?) à Bruxelles-Hal-Vilvorde, comme c’est le cas au parlement régional bruxellois ? Là, on entend les boucliers francophones se lever...

William Bourton

 

Source : Le Soir, journal du 9 mai 2003