Pour ou contre les langues régionales dans la Constitution ?

 

L'Académie française, inquiète de la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution, a demandé le retrait d'un article de loi en ce sens voté en mai par l'Assemblée nationale. Les réactions, contrastées, d'Edmond Siméoni, l'un des « pères » du nationalisme corse, et de l'historien Max Gallo.

CONTRE

Pour l'historien Max Gallo, membre de l'Académie française, « l'unité de la République est en jeu ».

 (Reuters)

« Même si je suis entièrement d'accord avec la résolution de l'Académie française - votée à l'unanimité - qui s'oppose à la reconnaissance constitutionnelle des langues, je m'exprime ici en mon nom propre.

Depuis cinq siècles, le français a forgé notre pays. Quand se pose la question de la langue, c'est aussi la question de la nation, de la République et de son unité qui est mise sur la table. Je n'ai absolument rien contre les parlers régionaux, qui participent à la richesse de notre culture.

En revanche, les faire entrer dans la Constitution peut être une porte ouverte vers la ratification de la Charte européenne sur les langues régionales, puisque le Conseil constitutionnel ne pourra plus, comme par le passé, s'y opposer. Et cela, je n'en veux pas.

Si c'était le cas, demain, n'importe qui pourrait, par exemple, ester en justice dans la langue de son choix. Cela conduirait un peu plus encore à l'émiettement d'une nation déjà touchée par les communautarismes de toutes sortes. Et je ne souhaite pas que nous prenions le risque de la division nationale.

Chacun peut, s'il le veut, pratiquer librement la langue de sa région en France, et c'est très bien. Alors quel besoin de mêler la Constitution à cette affaire ?  »

 

POUR

La demande de l'Académie française a irrité les défenseurs des langues minoritaires comme Edmond Siméoni, l'un des « pères » du nationalisme corse.

 (Reuters)

« Je suis scandalisé qu'une institution de cette portée s'abaisse à ce niveau.

L'inquiétude concernant la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution n'a pas lieu d'être. Dire que les députés ont porté atteinte à l'identité nationale en souhaitant que les langues régionales appartiennent au patrimoine, c'est tout de même grotesque.

Ça ne fait que perpétuer la mise en cause de l'unité nationale et de son principal fleuron qu'est la langue française. Elle a produit des Voltaire, des  Montesquieu et elle pense qu'elle pourrait être menacée par des langues régionales. C'est aberrant.

Si l'article1 de la Constitution n'est pas modifié comme prévu, la France ne pourra pas modifier la charte des langues minoritaires. Ils ont placé cette mesure en protection contre d'éventuelles revendications.

Je pense que l'Europe entière a donné la leçon à la France : ailleurs, les langues régionales sont reconnues. La France ferait mieux de se demander pourquoi elle est aujourd'hui écrasée par l'Anglais ».

 

Par Olivier Le Naire et Baptiste Desgardin

 

 

 

Source : Lexpress.fr, le 17 juin 2008

http://www.lexpress.fr/actualite/politique/pour-ou-contre-les-langues-regionales-dans-la-constitution_512991.html