« La francophonie doit avant tout être politique »

Lors de la Conférence des Peuples de Langue Française à Québec, Olivier Maingain, président de la CPLF, a également dit que la francophonie doit être plus active dans le monde.

 

Le 3 juillet 1608, l'explorateur et navigateur français Samuel de Champlain accoste le long du fleuve Saint-Laurent avec pour mission d'établir une colonie française permanente en territoire américain. Il y bâtit quelques maisons entourées d'une palissade et fonde ainsi la ville de Québec. 400 ans après, cette première ville francophone du continent américain est toujours la capitale d'une province qui a su défendre sa langue et sa culture propres.

Le Mouvement national des Québécoises et Québécois a choisi cette année particulière pour inviter à Québec l'ensemble des mouvements membres de la Conférence des peuples de langue française (CPLF). Des délégations de l'Acadie, des Fourons, de France, du Jura, du Québec, du Val d'Aoste et de la Wallonie­Bruxelles se sont réunies à Québec pour définir la place de la francophonie et du français dans notre monde actuel. La francophonie est partout en question, elle « se cherche une raison d'être », comme nous le rappelle le programme de cette XVlle Conférence des peuples de langue française. « La francophonie a-t­elle encore un sens au moment où la France n'en fait plus un horizon structurant de sa politique étrangère et au moment où le Québec semble de moins en moins intéressé à formuler une politique internationale animée par un véritable point de vue sur le monde, dans le contexte plus général de la régression du projet souverainiste ? »  La francophonie est chaque jour un peu plus en question, dans un monde qui vit la domination d'une idéologie ultralibérale et unilingue.

Olivier Maingain, président de la Conférence des peuples de langue française, considère que la francophonie doit être « avant tout politique ». Il rajoute qu' « incontestablement, la francophonie pourrait être beaucoup plus active dans le monde ». Dans ce sens, le Québec et la France, « peuples qui ont conscience de l'importance politique de la francophonie », doivent être les moteurs d'un mouvement global et organisé de promotion du français à l'échelle de la planète.

La XVlle Conférence des peuples de langue française a été l'occasion de montrer à nos hôtes québécois le soutien inconditionnel des peuples francophones européens aux revendications québécoises de souveraineté nationale. Dans sa première résolution générale, la Conférence rappelle en effet son « appui au mouvement souverainiste québécois et l'encourage à poursuivre sa lutte pour un État souverain, de langue et de culture françaises en Amérique », considérant que le Québec, « nation dont la reconnaissance demeure artificielle au sein de la fédération canadienne », doit prendre sa place d'égal à égal avec les autres nations dans la communauté internationale.

La Conférence a donné lieu à de multiples échanges sur la situation des peuples de langue française dans chacune des régions représentées au sein de la Conférence. La crise politique belge fut sur beaucoup de lèvres pendant ces trois jours, nos partenaires au sein de la Conférence étant fort inquiets de l'évolution politique en Belgique et de l'exacerbation d'un nationalisme flamand qui se fonde sur la négation des droits des francophones de la périphérie bruxelloise, des Fourons et de Flandre. Afin de rappeler le sort réservé aux francophones vivant en Flandre, la XVlle Conférence des peuples de langue française a adopté les résolutions de l'Action fouronnaise et du Rassemblement pour l'unité francophone Wallonie-Bruxelles, mouvement qui remplace au sein de la CPLF Bruxelles-Français et qui s'appuie sur le Manifeste pour l'unité francophone d'Antoinette Spaak et Serge Moureaux paru en novembre 2006. Ces résolutions rappellent notamment le sort de trois bourgmestres non nommés, le refus de ratifier la Convention-cadre de protection des minorités nationales et la nécessité d'élargir le territoire de la région bruxelloise.

La Conférence des peuples de langue française dit enfin « l'importance de l'unité de la Wallonie et de Bruxelles par la constitution d'une fédération de ces deux régions appelée à devenir l'État Wallonie-Bruxelles face à l'État flamand ». Martine Payfa, députée bruxelloise emmenant la délégation du Rassemblement pour l'unité francophone Wallonie-Bruxelles, a rappelé en effet lors de la présentation du rapport de sa délégation que cette fédération Wallonie-Bruxelles « est la voie la plus sûre pour préserver le rayonnement du français à Bruxelles, pour renforcer le redéploiement de la Wallonie trop longtemps oublié par l'État central dominé par la Flandre, pour redonner force et espoir à un peuple qui a donné le meilleur de lui-même à la Belgique, mais qui est aujourd'hui orphelin d'un État de plus en plus affaibli, pour ne pas dire évanescent ». Cette volonté qui était celle de la Conférence des peuples de langue française depuis sa fondation est aujourd'hui au centre des débats en Belgique, car « comme pour nos amis Québécois, le moment est venu pour les Wallons et les Bruxellois de faire le choix de la souveraineté, seule voie qui conduit à la prospérité, à la dignité », conclut Martine Payfa.


Patrick de Mûelenaere

 

Source :  Revue  « Perspectives Francophones »

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