La langue des fables

« Selon le très sérieux Haut Conseil à l’intégration, moins de 6 000 personnes étrangères primo-arrivantes, soit environ 7 %, ont bénéficié en 2000 des services des plates-formes d’accueil où l’évaluation linguistique est facultative. (...)

La langue de la République est le français. C’est ce que nous rappelle fort opportunément la Constitution. (...) Il est outil de cohésion sociale. Sa maîtrise est au fondement du contrat d’intégration, elle représente un élément central de lutte contre les discriminations. Parce que nous ne savons décliner des droits sans devoirs, nous ne pouvons accepter l’invalidation de générations de migrants par défaut d’offre linguistique. Nous ne saurions admettre que ces populations soient ainsi rendues trois fois étrangères : à leur pays d’accueil, à leurs enfants, à leur destin. L’unité de la France est le  résultat d’une patiente construction où l’imposition du français comme langue de l’administration et de l’enseignement a joué un rôle moteur. Le maintien de la précarité linguistique pour des populations avec lesquelles nous devons partager notre avenir, c’est l’assurance de la délinquance de survie, de l’assistanat obligée. (...)

L'organisation de la cité ne saurait accepter le commerce de l'ignorance, à moins de vouloir jouer au pompier pyromane. L’insuffisance de maîtrise de la langue, c’est la promesse de cellules familiales déstructurées avec pour seul illusoire recours l'enfermement dans le communautarisme.
 

À langue facultative, droit et morale facultatifs.
 

Source : La Croix, journal du 14 février 2002