La vérité sur le génocide de 1994 au Rwanda

Bill Clinton et Paul Kagame, le 6 juillet 2006

Bill Clinton et Paul Kagame, près du lac Muhazi, au Rwanda, le 6 juillet 2006

 

Les propos qui tendent à dire que la France serait responsable du génocide de 1994 au Rwanda, sont faux, ils datent de 2006 et émanent du monde imaginaire inventé par le dictateur génocidaire Paul Kagame.

La France n'a absolument rien à se reprocher au Rwanda. 

La responsabilité du bain de sang rwandais incombe à Bill Clinton. Et les États-Unis étaient loin d'en être à leur premier crime de masse, eux qui ont froidement largué la bombe sur Hiroshima et Nagasaki.

Voici quelques documents qui vous permettront d'en savoir davantage :

 

- le blogue de Bernard Desgagné :

http://www.demokratia.info/Rwanda/Accueil.html

 

- Le rapport Davenport et Stam, universitaires étatsuniens, les seuls à avoir sérieusement étudié les massacres de 1994, au lieu de copier et coller les approximations de l'ONU :

 http://www.francophonie-avenir.com/Document-sur_le_genocide_rwandais_(rapport-de-Davenport-et-Stam).htm

 

- Le rapport de l'ONG "Refugees-International", daté du 17 mai 1994, en plein génocide. Ce rapport corrobore le témoignage de Marcel Guérin et Gloria Martinez (voir : Les massacres du FPR en 1994, pendant le génocide) et prouve bien que c'est l'APR (Armée patriotique rwandaise [APR] dirigée par Paul Kagamé) qui massacrait des milliers de personnes, et non les « extrémistes hutus »

 

- Je vous fais grâce des nombreuses preuves indubitables des massacres commis par l'APR après 1994, notamment à Kibeho (1995) et au Zaïre, devenu la RDC, entre 1996 et aujourd'hui.

 

- Enfin, deux articles à lire impérativement :

un article paru dans Marianne, le 31 mars 2014 : Rwanda : « J'ai assisté à la préparation de l'attentat qui a déclenché le génocide »

et un article de Bernard Lugan, paru dans "polemia.com", le lundi 7 avril 2014 : Rwanda, un génocide en questions

 

Rwanda : « J'ai assisté à la préparation de l'attentat qui a déclenché le génocide »

Avion du Président Juvénal Habyarimana

Un rebelle du FPR marche près des débris de l'avion dont le crash a coûté la vie à l'ancien président hutu Juvénal Habyarimana, Kigali, 1994 - JEAN MARC BOUJOU/AP/SIP

 

 

Jean-Marie Micombero, ancien haut gradé du Front patriotique rwandais, accuse Paul Kagamé, actuel président du Rwanda. Son témoignage crucial sur les événements de la journée du 6 avril 1994 contredit les affirmations de Kigali et les conclusions de l'instruction française.

« Le 6 avril 1994, j'étais à Kigali, dans le bâtiment du Parlement, appelé CND, où était installé, depuis les accords d'Arusha [actant le partage du pouvoir en août 1993 entre le président et les rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) imposé par la France, l'Allemagne, la Belgique et les États-Unis], un bataillon de 600 militaires de l'Armée patriotique rwandaise [APR] dirigée par Paul Kagamé. C'est de là que sont partis les deux tireurs qui ont abattu l'avion de celui que nous appelions Ikinani*, c'est-à-dire Habyarimana, le président du Rwanda. J'ai été témoin des préparatifs de l'attentat qui a coûté la vie aux présidents rwandais et burundais et à 10 autres personnes, dont trois Français, et j'ai assisté à ce qui s'est passé dans les heures qui l'ont suivi...»

Jean-Marie Micombero est le témoin direct le plus gradé qui accable Paul Kagamé, l'actuel président du Rwanda. Il était un des officiers de renseignement du 3e bataillon de l'APR. Il a rencontré à Paris les juges Nathalie Poux et Marc Trévidic, les 5 juillet 2013 et 30 janvier 2014. Ses témoignages n'ont pas «fuité». Et pour cause : il contredit les affirmations de Kigali, relayées par les avocats Lef Forster et Bernard Maingain et la quasi- totalité de la presse française. Jean-Marie Micombero m'a raconté cette terrible journée.

« La fin d'ikinani »

« Ce matin-là, très tôt, j'ai vu arriver James Mugabo à moto. Il travaillait à l'aéroport et donnait des renseignements sur les déplacements de Habyarimana et sur le déploiement des gardes présidentiels. Il est allé directement voir Charles Karamba, le boss du renseignement, chapeauté par Charles Kayonga, le patron du 3e bataillon installé au CND. J'ai vu alors Karamba prendre sa radio et se mettre à parler sur le canal du bataillon. Il a dit à tout le monde de se mettre en stand-by. J'ai immédiatement quitté l'immeuble principal du CND pour aller prendre mon fusil d'assaut AK47, avant d'aller rejoindre ma position dans la tranchée qui entourait et protégeait le CND. C'est là, dans une tente installée tout près de ma position dans la tranchée, que je dormais. En la rejoignant, j'ai rencontré Andrew Kagamé [aucun lien avec Paul Kagamé], le commandant de la compagnie Tiger du 3e bataillon, qui était un ami personnel. "C'est probablement la fin d'Ikinani", m'a-t-il dit. »

Jean-Marie Micombero conforte ainsi les affirmations d'Aloys Ruyenzi, alors le principal garde du corps de Paul Kagamé, et d'Abdul Ruzibiza, sergent dans l'APR, jusque-là les témoins clés de l'instruction. Il est un des témoins annoncés aux juges Poux et Trévidic, le 20 avril 2012, par Théogène Rudasingwa, ex-secrétaire général du FPR et ex-ambassadeur du Rwanda à Washington. Lequel avait affirmé aux juges que Paul Kagamé lui-même lui avait confié, en juillet 1994, avoir commandité l'attentat...

« Et, juste après, comme pour confirmer ce que venait de me dire mon ami Andrew Kagamé, j'ai vu la Toyota Stout 2200 qui quittait le CND, poursuit Micombero. J'avais repéré le manège depuis quelques semaines. Officiellement, la camionnette allait déposer les déchets dans un endroit communément appelé Mulindi, sur la route de Masaka, mais, en réalité, ses occupants habituels allaient faire des repérages pour trouver un endroit tranquille d'où tirer les missiles contre l'avion de Habyarimana. Je n'ai pas distingué qui était ce jour-là dans la camionnette, mais j'ai pensé qu'il y avait le chauffeur, Didier Mazimpaka, les deux tireurs, Franck Nziza et Eric Nshimiyimana [qu'Aloys Ruyenzi et Abdul Ruzibiza appellent Eric Hakizimana], et les deux gardiens des missiles, Potien Ntambara et le patron de la mission, le lieutenant Karegeya, alias "Eveready", surnom qui lui venait de sa ressemblance avec un chat dessiné sur les piles alimentant nos lampes torches. Beaucoup de monde avait fait des repérages. En plus des occupants de la camionnette, y avaient évidemment participé Charles Kayonga, le chef du bataillon des 600, mais aussi un certain Hubert, le patron de ce qu'on appelait les "techniciens", véritables semeurs de terreur dans Kigali, très souvent déguisés en extrémistes hutus qu'on appelait les Interahamwe. Charles Karamba, Kamugisha et Jacob Tumwine avaient également participé à cette recherche du lieu de tir idéal. Beaucoup de mes collègues du renseignement et d'autres officiers opérationnels connaissaient donc le lieu de tir des missiles : Masaka. De cet endroit, les avions en phase d'atterrissage étaient très visibles. »

Les comptes rendus de ces repérages étaient faits à Karamba, parfois à Charles Kayonga ou à Silas Udahemuka, poursuit Micombero. Mais c'est le seul Kayonga qui rendait compte à Paul Kagamé. Chaque soir, je le voyais monter sur le toit du bâtiment principal du CND pour lui parler secrètement par talkie-walkie. Le chef du bataillon (indicatif radio : 22C) utilisait pour cela un réseau de communication ultrasecret pour rendre compte à "OB" (l'indicatif de Paul Kagamé) des préparatifs de l'attentat. À défaut d'obtenir le patron, Kayonga parlait à James Kabarebe, son principal collaborateur.

J'étais au courant des préparatifs de l'assassinat depuis quelques semaines. En mars, j'avais en effet parlé à mon camarade Franck Nziza à son arrivée du QG de Mulindi avec Eric Nshimiyimana. Le soir même, j'avais revu Franck autour d'un verre au mess des VIP. Il m'avait alors confié qu'il était venu, comme Eric, avec son arme. Comme je savais que Franck faisait partie de la section missile du high command, j'en avais déduit qu'Eric et lui étaient venus avec leur missile... J'avais aussi eu des informations complémentaires par Eric Kibonge Ntazinda, mon beau-frère, lui aussi arrivé de Mulindi pour conduire la Toyota jusqu'à Masaka. J'ai ensuite revu Franck Nziza à plusieurs reprises. Comme il était persuadé que je connaissais tous les détails du planning de l'attentat, il me parlait d'abondance. Il m'a dit qu'il était bien là pour abattre l'avion du président... Mon beau-frère a été finalement remplacé par Didier Mazimpaka à cause de sa mauvaise conduite.

En voyant partir la Toyota 2200, ce 6 avril, très tôt dans la matinée, je savais donc qu'elle se dirigeait vers Masaka, sans connaître toutefois le lieu exact du tir. Ce n'est qu'après la chute de Kigali que Franck Nziza, dont j'étais très proche, m'a montré l'endroit d'où il avait tiré son missile. C'était juste après le petit pont, à gauche sur la route qui monte vers Masaka. Cet attentat relève aujourd'hui du secret-défense alors que pendant plusieurs années beaucoup de monde connaissait et parlait ouvertement de l'opération contre Ikinani ! Elle n'est véritablement devenue secrète qu'après l'arrivée des mandats du juge Bruguière... »

Tension palpable

L'ancien officier de renseignement à qui je montre une carte d'état-major de l'époque me désigne le lieu d'où ont été tirés les missiles (voir p. 42). Sur cette carte, il est facile de reconstituer le trajet que la camionnette Toyota empruntait pour aller du CND à Masaka. Et Micombero reprend le cours de cette journée du 6 avril 1994.

« La camionnette roulait donc vers Masaka. Mais un brouillard épais est tombé sur Kigali. J'ai entendu le bruit du décollage d'un avion qui devait être le Falcon 50 d'Ikinani. À peu près en même temps, sur ma radio, avec laquelle je captais le canal de la chaîne de commandement du 3e bataillon - canal accessible à Charles Kayonga, le patron du bataillon, son adjoint Jacob Tumwine, le commandant de la 3e compagnie, James Karamba, les officiers de renseignement dont je faisais partie, et à tous les commandants de compagnie -, la voix d'"Eveready" qui parlait à Andrew Kagamé, ce jour-là officier de garde, précisa :

"Il y a trop de brouillard, on ne voit rien...

- Opération stand down", a répondu Andrew.

L'opération contre Ikinani avait donc été stoppée.

Peu de temps après, j'ai vu la camionnette revenir au CND. Le "stand by class one" a alors été levé. "Eveready" a rejoint Andrew Kagamé dans le bâtiment principal du CND. J'étais là. Étaient également présents Karamba et les officiers de renseignement. "Eveready" a fourni des détails sur les raisons de l'abandon de l'opération : "Il y avait trop de brouillard, la visibilité n'était pas suffisante, on a été obligés d'abandonner..."

James Mugabo est revenu à moto, peu de temps après le retour de la camionnette. On était encore au début de la matinée. Il y avait du soleil et la vie normale du bataillon a recommencé. En fin d'après-midi, je n'ai pas vu la camionnette repartir, alors que j'étais dans le bureau, à l'intérieur du bâtiment du CND, avec Jacob Tumwine, le commandant des opérations du 3e bataillon et quelques civils (avec lesquels on faisait des évaluations sur les informations de sécurité dans Kigali). Je n'avais pas ma radio avec moi. À un moment, Tumwine, qui avait l'air tendu, est sorti. La nuit tombait. Quelque temps plus tard, j'ai entendu une très forte explosion. Je suis sorti pour aller chercher mon arme et ma radio. Les civils ont été priés de quitter le CND pour rentrer chez eux. La tension était palpable. Des véhicules filaient sur la route Remera-CND-Kimihura-centre-ville. J'ai alors pensé que l'avion de Habyarimana avait explosé. Avec Tumwine et Karamba, on s'est dit que c'était dangereux de laisser partir les employés civils... Plus tard, alors qu'il faisait nuit, j'ai croisé Franck qui m'a dit : "L'opération a bien réussi, même si mon missile a raté la cible. Heureusement, celui d'Éric l'a touchée !"

Nous n'avons pas discuté longtemps parce qu'on s'attendait à une attaque. Ce soir-là, pour la première fois, Charles Kayonga a autorisé la bière. J'ai bu une Heineken... Vers le milieu de la nuit, je suis allé voir Andrew Kagamé qui était avec "Eveready" et Kitoko. "Eveready" nous a raconté ce qui s'était passé à Masaka : "Nous sommes partis vers le bas de la colline de Masaka. Nous nous sommes mis en position défensive. Didier faisait des allers-retours sur la route avec la camionnette. Les deux tireurs se sont installés à l'endroit prévu. Nziza a tiré et a raté son coup. Et immédiatement Éric a tiré et a touché l'avion d'Ikinani. Après, nous avons vite rejoint avec les deux tireurs la Toyota qui nous attendait sur la route de Masaka et sommes revenus au CND." »

Assassinats ciblés

À 20 h 21 min 53 s, heure locale, le pilote du Falcon 50, immatriculé 9XR-NN, qui revenait de Dar es-Salaam (Tanzanie), répondit à la tour de contrôle : « Reçu. » Ce fut son dernier mot. Quatre minutes et quatre secondes plus tard, la balise de détresse envoyait son premier signal. Il y en aura cinq, dont le dernier à 20 h 26 min 7 s. Les 12 passagers dont le président Habyarimana s'étaient écrasés tout près de sa résidence.

« Le lendemain matin, on était toujours en stand-by. A l'aube, le bâtiment du CND fut la cible des mitrailleuses 14 mm qui tiraient de Kacyiru, mais sans faire de dégâts. Dans la matinée, la peur dans les rues était palpable, des assassinats ciblés avaient lieu dans la ville, des consultations se déroulaient entre les officiels de la Minuar et ceux de notre contingent. Ce sont nos agents qui nous rapportaient ce qu'il se passait dans le centre de Kigali. Les cadres du FPR qui étaient encore là (d'autres avaient en effet déjà été évacués quelques jours avant l'attentat) faisaient pression sur Charles Kayonga pour qu'il ordonne la sortie de ses militaires pour sauver des civils. Après avoir consulté Paul Kagamé, il leur répondit qu'il fallait attendre que beaucoup d'atrocités soient commises et qu'elles soient connues de tous avant de les autoriser à sortir. Ce n'est qu'au début de l'après-midi que certains militaires reçurent l'ordre de sortir. »

Quelques années plus tard, Jean-Marie Micombero est devenu juge à la Haute Cour militaire, puis directeur au ministère de la Défense, et ensuite secrétaire général, c'est-à-dire numéro deux du même ministère. Une accusation fabriquée (corruption et association de malfaiteurs) le conduit en prison pendant un an. Il quitte le Rwanda en août 2011 et milite au Rwanda National Congress, un parti d'opposition qui regroupe notamment le général Faustin Kayumba Nyamwasa, ancien chef d'état-major, Théogène Rudasingwa, qui était en 1994 le secrétaire général du FPR, Gérald Gahima, ancien procureur, et Patrick Karegeya, jusqu'à son étranglement par des tueurs de Paul Kagamé dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier dernier.

Le témoignage de Jean-Marie Micombero conforte l'enquête sur les missiles et leur traçabilité, de l'ex-URSS à Masaka en passant par l'Ouganda et Mulindi, le QG de Paul Kagamé. Enquête qui situe à partir d'éléments matériels les auteurs de l'attentat dans le camp du FPR. C'est bien sur le lieu de tir désigné par Micombero que, le 25 avril 1994, des paysans rwandais des environs de Kigali découvriront deux tubes lance-missiles type SAM-16 fabriqués en URSS, en juillet 1987, et dont les références ont permis, grâce à Moscou, de reconstituer le trajet des missiles qui ont abattu l'avion. Les deux missiles et leurs tubes lanceurs faisaient partie d'une commande de 40 missiles SAM-16 livrés à l'Ouganda dans le cadre d'un marché interétatique.

Mémoire auditive

Après le lancement de neuf mandats d'arrêt contre des collaborateurs de Paul Kagamé et la rupture des relations diplomatiques entre le Rwanda et la France qui a suivi, la justice, sous pression des autorités françaises, semble être entrée dans la logique de Kigali. Les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux vont en effet accorder aux nouveaux témoins rwandais travaillant pour Paul Kagamé la même importance qu'à ceux qui ont rompu avec lui. Les juges ne sont plus sûrs que les missiles aient été tirés de Masaka et ordonnent un rapport balistique. Dans quelques d'années, l'Ecole nationale de la magistrature à Bordeaux dissertera sur la monstruosité juridique de cette expertise. Les résultats balistiques n'étant pas probants, les juges font appel à des experts en acoustique qui, à partir de la mémoire auditive de témoins presque exclusivement choisis par Kigali, d'un événement survenu dix-sept ans plus tôt, sont censés déterminer le lieu de tir des missiles ! Or ces « experts » ne se sont pas rendus au Rwanda mais ont mesuré, en France, à La Ferté-Saint-Aubin (Loiret) - pays plat n'ayant aucun rapport avec les collines de Masaka et Kanombé - et, «par similitude, par rapport à un propulseur de roquette suffisamment équivalent», le nombre de décibels d'un SAM-16. Résultat : ils concluent que les missiles ont été tirés de Kanombé, colline où, selon les avocats des mis en examen rwandais, la garde présidentielle du président Habyarimana était installée. Il n'en a pas fallu davantage pour que leurs avocats, Lef Forster et Bernard Maingain, concluent que les missiles avaient été tirés par des extrémistes hutus. Précisons que le camp de Kanombé n'abritait pas la garde présidentielle, mais un escadron parachutiste, un hôpital militaire, divers services de mécanique automobile, des logements pour des coopérants français et des bureaux pour des coopérants allemands, et seulement quelques éléments de la garde autour de la résidence présidentielle. À lire ou à écouter la plupart des médias, et notamment Libération, le Nouvel Observateur, Jeune Afrique et France Inter, « la vérité avait enfin gagné », Kagamé était innocenté ! Lef Forster et Bernard Maingain ont réclamé un non-lieu, mais, en novembre dernier, ils ont reçu une réponse négative. La vérité judiciaire serait-elle en train de rattraper la vérité ?


* Les Rwandais l'ont appelé ainsi après qu'il eut dit un jour : « Je suis ikinani que les méchants et les traîtres n'ont pas réussi à faire plier.» Ikinani veut dire «ainvincible ».

 

 

Source : Marianne, le lundi 31 mars 2014

http://www.marianne.net/Rwanda-J-ai-assiste-a-la-preparation-de-l-attentat-qui-a-declenche-le-genocide_a237714.html

 

 

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Rwanda : un génocide en questions

Assassinat du président Habyarimana, jeu trouble de Washington, enquête du juge Trévidic : clés de compréhension et d’explication.

- Le 6 avril 1994, l’avion transportant deux présidents africains en exercice, MM. Juvénal Habyarimana du Rwanda et Cyprien Ntaryamira du Burundi était abattu par un missile [1]. Aucune enquête internationale ne fut ouverte afin d’identifier les auteurs de cet attentat qui fut le déclencheur du génocide du Rwanda [2].

Les États-Unis à la manœuvre

Rwanda, un génocide en questionMis en place au mois de mai 1995 après sa création au mois de novembre 1994 par le Conseil de sécurité de l’ONU avec compétence pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 1994, le TPIR (Tribunal pénal international pour le Rwanda) fut installé à Arusha, en Tanzanie.

Dès le début, les Etats-Unis d’Amérique firent pression afin que l’attentat du 6 avril 1994, pourtant totalement inclus dans les limites chronologiques imparties au TPIR, soit écarté de son champ d’investigation. Avec une grande constance, tous les procureurs qui se succédèrent à la tête de ce tribunal respectèrent cette étrange exclusion. Le TPIR spécialement créé pour juger les responsables du génocide, refusa donc de rechercher les auteurs de l’acte terroriste qui en fut la cause (!).

L’insolite attitude des États-Unis pose d’autant plus problème qu’en 1995, il ne faisait alors de doute pour personne que les auteurs de l’attentat du 6 avril 1994 étaient ces « Hutu extrémistes » tant de fois dénoncés par les ONG américaines. Pourquoi les États-Unis étaient-ils donc opposés à ce que la responsabilité de ces derniers dans l’attentat qui déclencha le génocide du Rwanda soit officiellement mise en évidence par une enquête du TPIR ? La réponse à cette question est peut-être que les services de Washington savaient déjà que l’attentat n’avait pas été commis par les « Hutu extrémistes »… En interdisant au TPIR de mener l’enquête sur l’assassinat du président Habyarimana, les États-Unis protégèrent donc de fait ceux qui, en détruisant en vol son avion, permirent au FPR (Front patriotique rwandais), mouvement essentiellement tutsi totalisant de 10% à 15% de la population, de s’emparer militairement d’un pouvoir que l’ethno-mathématique électorale lui interdisait de conquérir par les urnes. Un retour en arrière est ici nécessaire.

Washington qui avait décidé de créer un fort pôle d’influence en Afrique centre-orientale, fit de l’Ouganda le pivot de sa stratégie dans cette partie du continent. À partir de ce pays, les États-Unis armèrent et conseillèrent le FPR qui, depuis octobre 1990, menait la guerre contre le Rwanda. Ils lui fournirent une aide diplomatique et, par le biais d’ONG liées à leurs services, ils montèrent des campagnes internationales de diabolisation du régime Habyarimana tout en présentant au contraire les hommes du général Kagamé comme des combattants de la démocratie.

Tant que François Mitterrand fut au pouvoir en France, ce plan de conquête du Rwanda fut mis en échec. Il réussit en 1994 quand, à la faveur de la seconde cohabitation, une droite en partie atlantiste occupa l’Hôtel de Matignon.

Le 7 avril, une fois le président Habyarimana assassiné, le FPR reprit unilatéralement les hostilités violant ainsi les accords de paix d’Arusha. Le président Mitterrand fut alors partisan d’une intervention militaire française destinée à ramener le FPR sur ses lignes de départ et cela afin de sauver le processus de paix d’Arusha [3]. Comme le gouvernement de Monsieur Edouard Balladur y était opposé, le général Kagamé eut le champ libre pour conquérir le pays et au mois de juillet 1994 il fut le maître à Kigali.

À partir du Rwanda, les États-Unis préparèrent ensuite la seconde phase de leur plan qui était le renversement du maréchal Mobutu du Zaïre. En 1997, paralysée par les fausses accusations de complicité avec les « génocidaires » montées de toutes pièces par les services américains et qui avaient été relayées par la presse hexagonale, la France n’osa pas intervenir pour soutenir son allié zaïrois attaqué par une coalition ougando-rwandaise. Le Zaïre redevenu RDC (République démocratique du Congo) fut démembré et l’exploitation-pillage des richesses du Kivu par les sociétés-écran rwandaises débuta. La connaissance de cet arrière-plan est indispensable à la compréhension du dossier rwandais [4].

Les preuves contre le FPR s’accumulent

Revenons à l’attentat du 6 avril 1994. En 1998, saisi des plaintes déposées par les familles de l’équipage français de l’avion et par la veuve du président Habyarimana, le juge anti-terroriste Bruguière mena son enquête. Au mois de novembre 2006, il rendit une ordonnance de soit-communiqué et mit en examen neuf personnalités très proches du général Kagamé, accusées d’avoir organisé ou perpétré l’attentat du 6 avril 1994. Ne pouvant poursuivre le chef de l’État rwandais car il était protégé par son immunité, le juge français demanda au TPIR de l’inculper. En vain.

La contre-attaque du général Kagamé se fit à travers ses puissants réseaux d’influence français et par le biais d’une presse qui ne cessa jamais de lui servir de porte-voix, notamment Libération et Le Figaro quand Patrick de Saint-Exupéry collaborait à ce dernier titre. Appuyé sur les uns et sur les autres, il tenta une manœuvre dilatoire destinée à discréditer le travail du juge Bruguière en prétendant que ce dernier aurait été influencé par des témoins dont les propos lui auraient été mal traduits ou qu’il aurait mal interprétés.

Cette argumentation qui fut reprise sans vérification par les médias ne correspond pas à la vérité car les témoins entendus par le juge Bruguière furent également auditionnés par le TPIR devant lequel la traduction simultanée (kinyarwanda-français-anglais) était faite par des traducteurs assermentés. Or, les procès-verbaux des audiences montrent que ces témoins firent aux juges internationaux les mêmes déclarations qu’au juge français. Avec une différence toutefois : ils déposèrent sous serment et en pleine connaissance des graves sanctions – dont l’incarcération à l’audience –, qu’entraînait le parjure devant ce tribunal international.

Le juge Trévidic ayant succédé au juge Bruguière en 2007, de nouveaux éléments accablants pour les responsables de l’actuel régime de Kigali s’ajoutèrent peu à peu au dossier. Entre autres :

- Le jeudi 21 juin 2012, à Johannesburg, le général Faustin Kayumba Nyamwasa, ancien chef d’état-major de l’APR (Armée patriotique rwandaise), qui était en 1994 responsable du renseignement militaire du général Kagamé, affirma sous serment devant un tribunal, que ce dernier « a ordonné le meurtre du président Habyarimana » [5], confirmant ainsi les termes de l’ordonnance du juge Bruguière.

- Le 9 juillet 2013, la correspondante de RFI en Afrique du Sud, Madame Sonia Rolley, publia deux entretiens exclusifs, l’un avec le général Faustin Kayumba Nyamwaza, l’autre avec le colonel Patrick Karegeya, ancien chef des renseignements du général Kagamé, dans lesquels les deux hommes accusaient de la façon la plus claire ce dernier d’être l’ordonnateur de l’attentat du 6 avril 1994 qui coûta la vie au président Habyarimana.

- Patrick Karegeya qui avait affirmé au micro de RFI qu’il était en mesure de prouver d’où les missiles avaient été tirés, fut étranglé dans sa chambre d’hôtel de Johannesburg le 1er janvier 2014.

- Le général Kayumba et le colonel Karegeya demandaient depuis des mois à être entendus par le juge Trévidic. Ce dernier ne pourra donc plus interroger le second…Quant au premier, le juge doit se hâter de le rencontrer car il a échappé de justesse à une seconde tentative de meurtre le 4 mars 2014

- En juillet 2013 puis en janvier 2014, Jean-Marie Micombero, ancien secrétaire général au ministère rwandais de la Défense et qui, le 6 avril 1994, était affecté à une section chargée du renseignement dépendant directement de Paul Kagamé, témoigna devant le juge Trévidic. Réfugié en Belgique depuis 2010 où il est placé sous protection policière, il a donné les noms des deux hommes qui, le 6 avril 1994, tirèrent deux missiles sur l’avion présidentiel. Il a également livré nombre de détails sur les préparatifs et sur le déroulement de l’attentat [6]. Ces déclarations recoupaient en les confirmant celles recueilles en leur temps par le juge Bruguière auprès d’autres témoins.

Pour le régime de Kigali, ces avancées du dossier sont terriblement destructrices et c’est pourquoi ses affidés ont reçu l’ordre d’allumer des contre-feux. La presse française est donc actuellement et une nouvelle fois à la manœuvre, n’hésitant pas à travestir les faits tout en continuant à réciter une histoire aujourd’hui obsolète.

La thèse fondant la « légitimité » du régime du général Kagamé, à savoir celle du génocide « programmé » et « planifié » par les « extrémistes » hutu, a en effet volé en éclats devant le TPIR. Dans tous ses jugements concernant les « principaux responsables du génocide », tant en première instance qu’en appel, ce tribunal international a en effet clairement établi qu’il n’y avait pas eu « entente » pour le commettre [7].

Conclusion : si ce génocide n’était pas « programmé », c’est donc qu’il fut « spontané ». Et s’il fut « spontané », c’est qu’un évènement d’une exceptionnelle gravité poussa certains à le commettre. Nous en revenons ainsi à l’assassinat du président Habyarimana

Que contient le dossier du juge Trévidic ?

La question de savoir qui ordonna l’attentat du 6 avril 1994 est donc primordiale. Voilà pourquoi, depuis des années, les services rwandais tentent d’enfumer la justice française, précisément parce qu’elle est la seule à enquêter sur cette affaire depuis qu’en janvier 1997, Madame Louise Arbour ordonna à Michael Hourigan de cesser ses investigations.

Quelques mois auparavant, cet avocat australien devenu fonctionnaire de l’ONU avait été personnellement chargé par Madame Arbour, Procureur du TPIR de septembre 1996 à septembre 1999, d’identifier les commanditaires et les auteurs de l’attentat du 6 avril 1994. Madame Arbour voulait alors étayer l’acte d’accusation jusque là rachitique qu’elle était occupée à dresser contre les anciens dirigeants du régime Habyarimana afin de montrer que cet attentat avait été commis par des « extrémistes hutu » et qu’en le commettant, ces derniers avaient donné le signal du génocide qu’ils avaient programmé.

Or, sur place, à Kigali, menant son enquête, Michael Hourigan découvrit tout au contraire que les auteurs de l’attentat n’étaient pas des « Hutu extrémistes », mais des Tutsi du FPR… et il obtint même les noms de ceux qui auraient abattu l’avion du président Habyarimana sur ordre du général Kagamé. Il rédigea ensuite un rapport qu’il remit personnellement à Madame Arbour. A partir du moment où il lui fit ces révélations, cette dernière changea totalement d’attitude à son égard, devenant cassante, le sommant de mettre un terme à ses recherches et exigeant la confidentialité absolue sur ses découvertes. Le contrat de Michael Hourigan avec l’ONU ne fut pas renouvelé.

Bien que le TPIR ait refusé de le lui communiquer au prétexte qu’il n’existait pas (!!!), le juge Bruguière obtint malgré tout une copie du « Rapport Hourigana». Devant le juge, Michael Hourigan authentifia son texte et il en confirma la teneur.

Le capitaine sénégalais Amadou Deme, adjoint de Michael Hourigan et ancien numéro 2 du renseignement de l’ONU au Rwanda a confirmé à la fois les résultats de l’enquête à laquelle il avait personnellement participé et l’insolite changement d’attitude de madame Arbour à partir du moment où le FPR fut suspecté d’avoir assassiné le président Habyarimana.

Tous ces éléments ainsi que de multiples autres témoignages figurent dans le dossier d’instruction et ils pèsent naturellement plus lourd que les tentatives d’enfumage médiatique périodiquement faites par les services de Kigali à travers les journaux français. C’est pourquoi, au mois de novembre 2013, le juge Trévidic refusa le non lieu demandé par les avocats des personnalités rwandaises mises en examen par le juge Bruguière en 2006. Cette décision était parfaitement justifiée car :

  1. Comment le juge Trévidic aurait-il pu faire autrement que de refuser le non lieu avec un dossier donnant, entre autres, le lieu du tir des missiles, les noms des deux tireurs et des membres de leur escorte, la marque et la couleur des véhicules utilisés pour transporter les missiles depuis l’Ouganda jusqu’au casernement de l’APR situé au centre de Kigali et de là jusqu’au lieu de tir à travers les lignes de l’armée rwandaise ainsi que le déroulé de l’action ?

  2. Comment le magistrat instructeur aurait-il pu rendre un non lieu quand son dossier contient la preuve que l’avion présidentiel rwandais a été engagé par deux missiles dont la traçabilité a été établie ? Grâce à la coopération judiciaire de la Russie il sait en effet que ces deux missiles dont les numéros de série étaient respectivement 04-87-04814 et 04-87-04835 faisaient partie d’un lot de 40 missiles SA 16 IGLA livrés à l’armée ougandaise quelques années auparavant. Or, Paul Kagamé et ses principaux adjoints furent officiers supérieurs dans l’armée ougandaise avant la guerre civile rwandaise et, de 1990 à 1994, l’Ouganda fut la base arrière, mais aussi l’arsenal du FPR.

  3. Comment un non lieu aurait-il pu être envisagé quand, devant le TPIR, il fut amplement démontré que l’armée rwandaise ne disposait pas de tels missiles et que l’arme du crime était en revanche entre les mains du FPR ?

  4. Comment le juge Trévidic aurait-il pu satisfaire à la demande exorbitante de non lieu alors qu’il sait que cette même armée rwandaise, paralysée par l’embargo sur les armes et la mise sous séquestre par l’ONU de son armement lourd et de ses hélicoptères, n’était pas en état de combattre et que ce fut le FPR qui reprit unilatéralement les hostilités car il savait qu’il allait gagner la guerre ?

  5. Comment un tel non lieu aurait-il pu être justifié alors que, comme cela fut largement démontré devant le TPIR, les forces du FPR qui n’attendaient qu’un signal pour lancer leur offensive préparée de longue date, reçurent l’ordre de marche depuis leurs bases de la frontière ougandaise dans la nuit du 6 au 7 avril, juste après l’annonce de la mort du président Habyarimana ?

Le général Kagamé va-t-il néanmoins réussir à faire enterrer le dossier ?

En dépit de toutes les pressions qu’il subit, il faudra bien que, tôt ou tard, le juge Trévidic face la balance entre les éléments que contient le dossier de l’assassinat du président Habyarimana.

Or, si le magistrat instructeur a bien entre les mains suffisamment d’éléments pour renvoyer les mis en examen devant la Cour d’Assises, tout va in fine dépendre du Parquet chargé de porter l’accusation à l’audience.

Nous voilà donc revenus aux réseaux d’influence que Kigali entretient en France et dont la mission est de tenter d’influencer le juge Trévidic pour que soit étouffé le dossier. En effet, et comme l’a dit Madame Carla Del Ponte qui succéda à Louise Arbour au poste de Procureur du TPIR : « S’il était avéré que c’est le FPR qui a abattu l’avion du président Habyarimana, c’est toute l’histoire du génocide du Rwanda qu’il faudrait re-écrire ».

Et de cela, les alliés, les soutiens et les obligés du général Kagamé ne veulent évidemment pas entendre parler.

Les éléments contenus dans cette analyse seront naturellement occultés par la presse française à l’occasion du vingtième anniversaire du début du génocide du Rwanda. Les journalistes paresseux continueront à réciter une histoire obsolète ; quant aux journalistes militants ils recopieront ou liront les fiches qui leur ont été remises par les agents de Kigali.

 

Bernard Lugan, le jeudi 3 avril 2014

 

Notes :

[1] Un premier missile rata sa cible.

[2] La « communauté internationale » se montra plus empressée quand il s’agit d’identifier les assassins de M. Rafik Hariri (2005), ancien Premier ministre libanais, et de Mme Bénazir Bhutto (2007), Premier ministre du Pakistan.

[3] Si une telle opération avait été décidée, il n’y aurait pas eu de génocide.

[4] Aujourd’hui, à Washington, le général Kagamé voit son étoile pâlir en raison des accusations portées contre son régime par les défenseurs des droits de l’Homme.

[5] Après avoir rompu avec Paul Kagamé, le général Nyamwaza se réfugia en Afrique du Sud où au mois de juin 2010, il survécut par miracle à une tentative d’assassinat. C’est à l’occasion du procès des six Rwandais qui tentèrent de le réduire au silence qu’il fit cette déclaration.

[6] Voir à ce sujet l’interview donnée à Pierre Péan intitulée « J’ai assisté à la préparation de l’attentat qui a déclenché le génocide » (Marianne numéro du 28 mars au 3 avril 2014).

[7] À l’exception du jugement de Jean Kambanda, ancien Premier ministre condamné en 1998, après qu’il eut plaidé coupable contre la promesse d’une peine réduite, procédure qui de facto lui avait fait accepter l’acte d’accusation du procureur. Depuis, il est fermement revenu sur cette reconnaissance.

 

Source : Bernard Lugan – L’Afrique réelle

polemia.com, le lundi 7 avril 2014

http://www.polemia.com/rwanda-un-genocide-en-questions/?utm_source=La+Lettre+de+Pol%C3%A9mia&utm_campaign=0af7eafb5a-lettre_de_polemia&utm_medium=email&utm_term=0_e536e3990e-0af7eafb5a-55412265

 

 

 

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Le Rwanda et la langue française

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