Les étudiants
français toujours aussi nuls en anglais
LE MONDE
AFP/STEPHANE DE
SAKUTIN
Les 20 000
étudiants qui
ont passé le
"Test of English
as a Foreign
Language", en
2008, arrivent
tout juste au
niveau attendu
en fin de lycée,
soit bien en
deçà d'un
quelconque
bilinguisme.
Le
précédent ministre de l'Éducation,
Xavier Darcos, voulait des
élèves bilingues à la fin de leur
scolarité. Il a bien fait de changer
de ministère avant les résultats
2008 du TOEFFL, ce "Test of
English as a
Foreign Language" que
requièrent les universités
anglo-saxonnes pour inscrire un
non-anglophone. Les 20 000 étudiants
qui l'ont passé en 2008 arrivent
tout juste au niveau attendu en fin
de lycée - soit en dessous des
attentes académiques de l'université
et bien en deçà d'un quelconque
bilinguisme.
Ces
résultats
placent la
France assez
loin dans le
classement
des bons
connaisseurs
de
l'anglais.
Au 69e
rang
d'un
classement
mondial
opéré sur
109 pays et
au 25e
dans
la liste des
43 États
européens.
Loin
derrière
l'inévitable
peloton de
tête des
pays
nordiques,
auquel
s'ajoutent
les
Allemands et
les
Néerlandais.
Tous deux
comptabilisent
102 points
sur 120,
quand notre
score de 88
nous place
tout juste
ex-aequo
avec la
Bulgarie, la
Biélorussie
et la
Lettonie.
Les cancres
de l'Europe
étant le
Kosovo (73),
Chypre (78)
et l'Albanie
(77).
Ce test
n'est pas
représentatif
de la
population
étudiante.
Il est passé
par les 20
000
étudiants
français qui
envisagent
de
poursuivre
leurs études
dans un pays
anglo-saxon.
S'ils ne
sont pas
forcément
les
meilleurs
locuteurs
dans la
langue de
Shakespeare,
ils se
sentent
capables de
suivre un
cursus en
anglais. Ce
qui n'est
pas l'avis
de toutes
les
universités
d'accueil.
Avec son
petit score,
l'étudiant
français
moyen voit
son choix
d'études à
l'étranger
limité.
Aussi
brillant
soit-il dans
sa
discipline,
il peut
oublier
l'université
Yale, qui
requiert un
score de
100, ou le
MIT
(Massachusetts
Institute of
Technology),
qui accepte
à partir de
90 (mais
recommande
100). Il lui
reste quand
même le
soleil de
Californie,
puisque l'UCLA
(University
of
California)
ou Berkeley
se
contentent
de 83
points. Et
encore, rien
n'est gagné.
ADN GAULOIS
Le test
démontre,
avec un
score de 21
sur 30, que
les
étudiants
français
sont les
moins bien
notés à
l'oral. Ce
manque de
pratique est
un handicap
de taille
pour le
recrutement
dans les
établissements
anglo-saxons.
D'ailleurs
seuls les
étudiants
chypriotes,
monégasques
et...
italiens
s'expriment
moins bien
que nous en
anglais.
L'honneur
serait sauf
si ces
derniers
n'étaient
sur une
pente
ascendante
et n'avaient
déjà
globalement
amélioré
leur score
général de 7
points en un
an. Ce qui
fait
craindre aux
Français
d'être
distancés
sous peu,
comme ils
l'ont déjà
été par les
Espagnols.
Le risque
est d'autant
plus grand
que la
courbe de
progression
française
reste
résolument à
l'horizontale.
Y aurait-il
dans l'ADN
gaulois un
gène qui
empêcherait
de parler,
voire de
comprendre
l'anglais ?
À l'heure où
la génétique
aide à
comprendre
les
dégénérescences
et autres
blocages, on
aimerait
qu'elle nous
explique
pourquoi les
Français
restent
irrémédiablement
imperméables
à la langue
de
Shakespeare.
À moins que
le vrai
problème ne
soit notre
système
éducatif et
que les
étudiants
qui
remontent la
moyenne ne
fassent
partie des
170 000
jeunes
favorisés
qui partent
chaque année
en séjour
linguistique
à l'étranger
?
Réaction de M. De Poli :
Madame,
Je me permets de vous écrire car j'ai
été outré par votre article sur le niveau des étudiants en anglais :
http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/08/25/les-etudiants-francais-toujours-aussi-nuls-en-anglais_1231684_3224.html
Je me permets donc d'ajouter quelques
observations complémentaires :
>Les étudiants français toujours aussi nuls en anglais
Mais pourquoi toujours privilégier l'anglais ? Et si les étudiants
français sont nuls en anglais, qu'est-ce que cela peut bien faire ?
L'utilité de l'anglais est extrêmement
relative : 99% des Français ne l'emploient JAMAIS dans leurs
activités professionnelles. De plus, des entreprises ont été
lourdement sanctionnées ces dernières années par les tribunaux pour
usage illégal de l'anglais. Par exemple la société américaine GEMS
en mars 2006, condamnée à 570.000 euros d'amende pour avoir pour
avoir transmis des documents en anglais sans traduction à ses
salariés français :
L'Humanité Dimanche, numéro 54 du 29 mars au 4 avril,
consacre un dossier aux abus occasionnés par l'usage de
l'anglais dans les entreprises. Sous couvert d'une modernité
mal placée et d'une efficacité illusoire, hors de toute
motivation rigoureusement professionnelle, l'usage forcé,
sans discernement, de l'anglais, est davantage sources de
dysfonctionnements et d'accidents, de stress et de
discriminations. Sans justification objective d'efficacité
et de performance, sans lien direct avec les compétences
professionnelles nécessitées par la nature du travail,
l'anglais devient un outil de sélection, de discrimination
et de déclassement. Exemples à l'appui, l'Humanité Dimanche
pose de vraies questions et rappelle une vérité d'évidence :
l'anglais n'est pas la mangue maternelle des salariés
français et ne le sera jamais. Un appel à la sagesse et à
moins de conformisme.
>Y aurait-il dans l'ADN gaulois un gène qui
empêcherait de parler, voire de comprendre l'anglais ?
Et la nullité en langues des Anglo-Saxons, pourquoi n'en
parle-t-on jamais ? Je trouve ridicule, injuste et stupide
de fustiger à chaque fois les Français (alors qu'ils ne sont
pas si nuls en langue que ça) tandis que l'on ne fustige
jamais les Anglo-Saxons (qui, eux, sont vraiment nuls en
langues !).
Je pense qu'il serait vraiment temps quand les journalistes
français se réveillent et comprennent les effets néfastes de
l'anglomanie pour la France. Il a pourtant été prouvé par
des auteurs anglo-saxons eux-mêmes que
l'enseignement généralisé de l'anglais dans un pays
s'apparente à une mainmise coloniale (voir entre
autres les ouvrages de l'Australien Alastair Pennycook).
Pour se convaincre du caractère clairement colonial de cet
enseignement, il suffit de lire le texte suivant :
Je vous communique ci-après deux textes qui
montrent les dangers de l'anglais pour nos intérêts
nationaux :
Pour se convaincre de cette catastrophe qu'est le
pillage de la recherche française, il suffit de lire les
propos effarants d'un chercheur américain, extraits de
l'argumentaire :
« Au moins 90% des articles que nous
recevons ne valent rien. 2 % sont originaux
et méritent d'être publiés. 5% sont des
développements de travaux antérieurs que
nous devons publier également. Enfin, moins
de 1% de ces articles donnent des idées sur
des nouvelles directions de recherche
pouvant quelquefois conduire à des
applications commerciales. Nous recevons ces
articles en première exclusivité,
antérieurement à toute publication. Ils nous
arrivent sur un plateau d'argent, écrits
dans notre langue, sans que nous
demandions quoi que ce soit à quiconque.
Comment voulez-vous que nous nous empêchions
d'en exploiter les meilleures idées ? Même
avec les meilleures intentions du monde,
nous ne pouvons nous empêcher d'être
influencés, de changer nos objectifs de
recherche et d'utiliser les idées les plus
prometteuses à notre profit. N'oubliez pas
qu'une majorité de ces articles nous vient
de l'étranger et que ce qu'ils décrivent n'a
jamais fait l'objet de publication
antérieure, en anglais ou d'autres langues.
D'autre part, nous passons facilement un
tiers de notre temps, voire la moitié, à
chercher de l'argent pour financer notre
travail. Beaucoup d'entre nous n'ont aucune
sécurité d'emploi. La concurrence pour les
octrois de recherche, qui ont fondu comme
neige au soleil ces dernières années, est
féroce. Tout le monde essaye de briller,
même si ce n'est que dans les apparences.
Nos collègues européens ou asiatiques n'ont
pas cette obligation et peuvent vraiment se
consacrer à leur recherche scientifique et
produire quelque chose. Dans ce contexte,
vous pensez bien que nous allons exploiter
toute idée intéressante pour laquelle on
sollicite notre avis. Il est arrivé à
certains de mes collègues de refuser la
publication d'un article, lorsqu'ils
voulaient " pirater " son contenu de façon à
s'attribuer l'antériorité d'une idée qui les
intéressait particulièrement. Toutefois,
dans la plupart des cas, ça n'est même pas
nécessaire. Nous approuvons la publication
de ces articles mais notre réseau de
contacts avec l'industrie nous permet
d'exploiter les meilleures idées et d'en
tirer les bénéfices commerciaux en premier.
Nous ne sommes pas des saints. Comment
voulez-vous qu'il en soit autrement ? Dans
la quasi-totalité des cas, on ne peut même
pas nous accuser de plagiat faute de
preuves. Gallo a perdu dans ses démêlés avec
l'Institut Pasteur, car il avait reçu des
échantillons, parce qu'il y avait une trace
matérielle. Dans la plupart des cas, seule
compte l'information, qui est dématérialisée
par essence. Si vous faites la copie d'un
logiciel existant, vous violez les droits
d'auteur. Si vous volez une idée à quelqu'un
alors que celle-ci n'a pas encore fait
l'objet d'une publication antérieure et que
vous travaillez dans le même domaine de
recherche que celui à qui vous l'avez volée,
comment voulez-vous que ce dernier soit en
mesure de prouver quoi que ce soit ? ».
Le système de recherche français est donc aberrant et à
changer radicalement. On pourrait par exemple essayer de
s'inspirer du système de recherche japonais, bien plus
intelligent que celui qui est pratiqué en France, et où
les chercheurs publient d'abord les résultats de leurs
recherches au Japon en japonais, ce qui
permet à leurs industries d'exploiter en premier les
bonnes idées et évite ainsi le pillage. Autre extrait :
«
Au Japon, on peut constater que les chercheurs
japonais qui reçoivent des deniers publics sont
souvent dans l'obligation contractuelle,
lorsqu'ils veulent et qu'ils peuvent légalement
publier leurs travaux, de les communiquer en
priorité à des journaux et revues scientifiques
publiés au Japon, en japonais. Ces derniers
n'acceptent et ne publient que les meilleurs
articles décrivant des travaux qui contribuent
réellement au développement scientifique et
technique, dans la discipline considérée. Les
articles qui sont refusés sont généralement
traduits en anglais par leurs auteurs qui
cherchent alors à les publier dans des revues
américaines ou européennes. Cette pratique n'a
pas augmenté le nombre d'abonnements aux revues
scientifiques japonaises des bibliothèques
étrangères (à l'exception de la Chine et de la
Corée), mais elle a accompli l'équivalent. Bon
nombre de succursales de compagnies étrangères
et de délégations gouvernementales diverses
traduisent sans relâche pratiquement tout ce qui
est publié en japonais dans les domaines
scientifique et technique. Les Japonais sont les
premiers bénéficiaires de cette activité, car
c'est souvent eux qui effectuent ce travail de
traduction qui est, comme il se doit, très bien
rémunéré. Il implique d'être bilingue et d'avoir
des connaissances techniques très spécialisées.
De plus, la publication en langue japonaise
permet tout simplement de communiquer les
informations les plus intéressantes à la
fraction des chercheurs et ingénieurs japonais
initiés au sujet de la manière la plus efficace
possible. Son but n'est pas d'exclure la
traduction et la diffusion de l'information aux
puissances industrielles concurrentes, mais elle
introduit un délai qui est souvent suffisant
pour que l'exploitation des résultats publiés
puisse être démarrée, en priorité, par un
homologue japonais quand ce n'est pas par
l'auteur de l'article lui-même. Le problème
d'antériorité vis-à-vis de chercheurs étrangers
concurrents est ainsi évité et les bénéfices
éventuels sont immédiatement réinjectés dans
l'économie japonaise. L'argent du contribuable
est ainsi utilisé de manière optimale. Il
n'importe pas à un pays producteur de
connaissances de payer le coût de la diffusion
du savoir dans une langue autre que sa langue
nationale, mais bien aux utilisateurs des
nouvelles idées scientifiques... »
Bien à vous
Daniel DE POLI
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