Sujet :

 Jean-Claude Casanova a tout compris !

Date :

10/02/2008

Envoi d'Aleks Kadar  (courriel : aleks.kadar(chez)free.fr)     

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Connaissez-vous l'auteur de l'article ?
Un article qui va plaire à tous les étatsuniphiles, atlantistes, natophiles et Cie.

 AK


 Défense de l'occident
 
 
  - En France le mot « Atlantique », quand il est utilisé dans la langue  politique, est presque devenu une obscénité. À droite ou à gauche chacun  s'efforce de paraître le moins « Atlantique » possible. Pourtant, la  charte de l'Atlantique en août 1941, signée entre Roosevelt et  Churchill, a fondé l'alliance destinée à libérer l'Europe du nazisme. De  même le Traité de L'Organisation de l'Atlantique Nord, conclu en 1949  entre les États-Unis et onze pays européens, dont la France, rejoints en  1955 par l'Allemagne de l'Ouest et en 1982 par l'Espagne, a permis de  contenir l'Union Soviétique et favorisé son effondrement. La Pologne et  les Pays Baltes, qu'Hitler et Staline se partagèrent en 1939, ont  retrouvé leur liberté et font désormais partie de l'Union européenne et  de l'Otan. Si vous interrogez un Polonais, un Anglais ou un Italien, il  se proclamera « Atlantique » sans difficulté et sans honte.

Jean-Claude Casanova


  Pourquoi alors cette réserve française ? Dans le passé, l'influence  communiste a joué un rôle, comme le nationalisme gaulliste. Les  Communistes rêvaient de l'Orient despotique et les gaullistes, disciples de Maurras, songeaient à « la France seule ». Mais le parti communiste  n'exerce guère plus d'influence au-delà de quelques municipalités et  c'est un disciple de Gaulle, Jacques Chirac, qui a encouragé l'Otan, en  1999, à bombarder Belgrade, puis à envoyer nos troupes, sous drapeau de  l'Otan, en Asie centrale, en 2003, détruire le régime des Talibans. Il subsiste pourtant un sentiment anti-atlantique qui imprègne le  discours français. Il a été renforcé par l'intervention américaine en  Irak et par l'impopularité de cette action grossie par les excès  rhétoriques de Dominique de Villepin et par les imprudences de George  Bush. Il s'ajoute à cela le ressentiment né de la suprématie des  États-Unis dans l'ordre de la science, de la puissance et de l'économie,  la fascination envieuse qu'exercent leur culture, leur cinéma et leur  musique, l'instauration de l'anglais comme langue mondiale qui rend  difficile toute prétention à l'universalité de la langue française. Nous sommes donc le pays européen dans lequel l'hostilité à l'Amérique est la  plus forte. Ces réactions sont explicables, mais les autres Européens les éprouvent moins, elles sont préjudiciables à notre politique et  paralysent nos réflexions. Pour deux raisons : parce que nous  appartenons à l'Occident et que l'on ne nie pas sans danger sa propre identité historique, parce que l'hostilité à l'Amérique divise  immanquablement l'Europe et que ce sentiment nous sépare de nos  compatriotes européens et empêche l'Union des peuples européens d'avancer vers l'unité.

 Il semble heureusement que les choses évoluent et que la France  redécouvre l'Occident. Deux signes annoncent ce progrès. D'abord les déclarations de Nicolas Sarkozy : il a affirmé avec une grande solennité son « attachement à l'Otan », il a déclaré qu'il fallait construire une défense européenne et rénover l'alliance atlantique, en renonçant aux « querelles théologiques » sur les relations entre l'une et l'autre, pour  que la France puisse « reprendre toute sa place dans l'Otan » (à Washington, devant le Congrès des États-Unis, 7 novembre 2007). On ne  saurait mieux dire. Il reste à espérer que les Anglais et les Américains  accepteront ces propositions et ne verront pas dans la volonté de  renforcer la défense européenne un moyen détourné d'affaiblir l'Otan.  S'ils cédaient à cette interprétation maligne, ils dévoileraient une suspicion à l'égard de l'Europe qui justifierait en retour les interprétations gaullistes de l'atlantisme. Rien ne permet sur ce point de douter de la bonne volonté de Nicolas Sarkozy, il est donc de l'intérêt de l'Europe et de l'Occident de le prendre au mot.

C'est justement l'Occident qui est le mot-clé du dernier livre d'Édouard Balladur (Pour une Union Occidentale entre l'Europe et les États-Unis, Fayard, 120 pages). L'ancien Premier ministre pense par lui-même et  pense profondément. Dans le monde, tel qu'il est, il constate qu'il existe des origines communes et une complète identité de civilisation entre l'Europe et les États-Unis, qui partagent des intérêts communs et des aspirations identiques à la démocratie et au droit. Désormais la technique et la science qui furent créées en Occident se répandent partout et l'économie et la démographie mondiales en seront bouleversées. La place de l'Occident se rétrécira. D'autres joueront un rôle plus grand. Il n'existe pas de motif légitime de redouter ces bouleversements mais pour préparer ce nouveau monde il serait utile de ne pas affaiblir l'Occident, héritier de l'histoire européenne, en entretenant ses divisions. Je ne peux ici résumer et commenter le petit livre salubre et courageux d'Édouard Balladur. Mais sa vision éclairée et la volonté énergique de Nicolas Sarkozy permettront peut-être d'ouvrir une nouvelle phase heureuse des relations entre la France, l'Europe et l'Amérique du Nord.


 Jean-Claude Casanova

WWW.CLUB-CORSICA.COM

 

Source : Club-Corsica.com, le 10 février 2008

http://info.club-corsica.com/casanova_101_001.html

 

 

Réactions :

 

Je connais (trop) bien l'auteur de cet article : il vient d'être nommé à la tête de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, depuis la mort de René Rémond, c'est-à-dire à la tête de la « fondation » qui chapeaute Sciences Po Paris, mon école... J'avais déjà eu de mauvais échos de lui, j'avais déjà été en contact avec sa pensée spécieuse et francophobe (masochiste, donc) lors d'une conférence, mais là c'est pire que tout ce que j'avais pu imaginer; je commence à comprendre pourquoi il a été nommé à son poste : l'administration de Sciences Po est américaniste primaire, atlantiste ! Son directeur dit que l'anglais n'est plus une langue étrangère, et il impose des cours en anglais à tous les élèves depuis l'an dernier. Ce n'est pas le seul à le faire en France, mais alors que souvent ailleurs cela se fait par illusion niaise de pragmatisme, j'ai l'impression que dans son cas cela se fait par idéologie, par conviction, ce qui est beaucoup plus grave. Et M. Casanova dit que l'anglais « a été instaurée langue mondiale » (ben voyons, allons-y gaiement !), et pense à n'en pas douter que c'est « naturellement » la langue de « l'Occident »...

Il est pénible de lire que l'indépendantisme de la France, c'est à dire sa résistance aux hégémonies de tout poil, notamment américaine et soviétique (en son temps), est une scorie du passé qu'il faudrait bien vite chasser, qu'elle est l'apanage d'un gaullisme maurassien (sic, Maurras était pétainiste et a été enfermé en 1945, sous le Gouvernement provisoire de De Gaulle !) ou d'un communisme qui en l'occurrence sert de repoussoir éculé.

On note d'ailleurs qu'il ne semble pas faire de différence entre « atlantique » (mot que personne n'utilise) et « atlantiste » (qui est le mot le plus usité et dont Casanova ne parle pourtant pas). Pour ma part, atlantique peut-être, mais atlantiste non !
 
Jérémie.

 

 

Ce Jean-Claude Casanova reprend un peu à sa manière le fameux « péril jaune ». Nous devons, dit-il, serrer les rangs entre occidentaux comme si l'Asie formait un bloc homogène, qui s'apprêtait à nous tomber dessus. S'il l'on arrive à facilement distinguer un extrême oriental d'un européen par son faciès, il faudrait être extrêmement ignorant pour prétendre mettre tout ce monde dans le même sac. Un Thaïlandais n'a pas de cause commune avec un Vietnamien, ou un Cambodgien. Un Indonésien n'a pas grand chose à voir avec un Laotien ou un Birman. Chine, Japon, Corée sont très très différents en dépit de l'influence chinoise ancienne sur les deux derniers pays. En aucun cas, ces gens ne forment un bloc commun. L'Asean (moins connue par son acronyme français Anase) n'est qu'une mince ébauche de coopération par rapport à l'UE dont le degré d'intégration est considérablement plus grand et qui est d'autant plus fragile qu'elle est censée fonctionner dans une langue qui n'appartient à aucune des familles des langues asiatiques. Que dire de l'Asie du sud-ouest, peuplée de Perses, d'Arabes, de Baloutches qui ont encore moins de points de commun avec les peuples d'Asie du sud-est, par les différences considérables de religion et de culture ?

Lorsque je vivais en Amérique du nord, j'ai souvent découvert que j'avais davantage de points communs avec d'autres européens qu'avec des nord-américains, même Québécois, en dépit du fait que, avec ces derniers, nous partageons la même langue. Ce n'est pas parce que la majorité des Étasuniens ont (encore) des têtes d'Européens que je dois me sentir particulièrement proches d'eux. A priori bien sûr, il n'y a aucune raison d'avoir un quelconque sentiment négatif à leur égard. Toutefois, si on se rend compte que, depuis presque un siècle, les États-Unis n'ont eu de cesse de s'ingérer dans les affaires des autres, de vouloir coloniser les esprits des Européens, d'abêtir l'Europe, de vouloir exploiter à leur seul profit les ressources naturelles ou intellectuelles de pays lointains, de bafouer la souveraineté d'une longue liste de pays, de mettre en place des dictateurs au mépris des fameux droits de l'homme qu'ils font semblant de défendre, alors, je ne ressens pas spécialement le besoin de « serrer les rangs » avec un tel peuple... Dans de tels conditions, le fameux péril jaune me paraît bien lointain et je dois m'occuper de problèmes nettement plus urgents tels que ceux qui nous préoccupent sur ce forum.

Charles Durand
 

 

Très juste, la stratégie étatsunienne et euro-atlantiste est de former un bloc  « EU d'Europe » de l'Atlantique à l'Union européenne, regroupant EUA et UE, un bloc qui serait plus à même de s'opposer à la Chine et à l'Inde. Comme si les EUA seuls ne suffisaient pas. Comme si l'UE seule était trop faible.

C'est vrai que l'Asie ne forme pas un bloc homogène, uni, mais ce n'est pas grave : la Chine et l'Inde constituent chacune une menace suffisamment
sérieuse pour les EUA pour qu'ils aient à coeur de constituer ce bloc EUA-UE.

La bonne nouvelle pour les EUA, c'est que la grande majorité des Européens de l'UE semblent très demandeurs de cette Union « occidentale », de Barroso à Sarkozy en passant par Berlusconi, la Pologne, l'Ukraine, les pays baltes, les pays scandinaves... Il a raison, le JC Casanova, qui en UE s'oppose encore à ce bloc occidental ?

En France même, difficile d'en trouver, des opposants à l'axe atlantique. Comme l'a dit Sarkozy, il est déplacé de qualifier les Français d'anti-étatsuniens. Les Français ne sont-ils pas de grands consommateurs et amateurs de films, chansons, produits « culturels », étatsuniens, de sous-nourriture étatsunienne etc., de la langue anglo-étatsunienne ?

Qui reste-t-il à part quelques souverainistes et des espérantistes ? Pourquoi les atlantistes comme JC Casanova s'inquiètent-ils donc ?

AK
 

 



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