Sujet :

 Le MIP mité par l'anglais !

Date :

10/10/2007

Envoi d'Aleks Kadar (courriel : aleks.kadar(chez)free.fr)     

Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez « chez » par « @ ».

Mip-mip, revoilà les coyotes : God save our gracious Mip

(MIP, marché international des contenus audiovisuels)

 

 

l’anglais est la langue officielle du Mip, donnant parfois lieu à des situations cocasses

En direct du MIP, à Cannes, en compagnie de nos deux reporteurs dans le monde merveilleux de la télévision.

8h20, hier matin (1). Les portes du bunker du Palais des festivals sont encore closes mais déjà, une centaine de participants est agglutinée, prête à bondir, à dégainer les "banknotes" pour rafler telle nouvelle série au nez et à la barbe de la concurrence. De l’extérieur, on aperçoit les stands, encore assoupis ; derrière les portes, les vigiles vêtus de blousons Endemol prennent leur temps. 8h25, larsen, crachotements de sono et musique à fond les ballons : les impatients tournent la tête vers la gauche, vers l’écran géant. Franchement, les caméras cachées de Juste pour rire, ça commence à aller. Enfin, les portes s’ouvrent et la marée s’engouffre dans le Mip. Remontant le courant, un saumon de belle taille : Takis Candilis, directeur de la fiction de TF1. Pincement au cœur : d’ordinaire le mardi, au Mip, TF1 organise un déjeuner de presse pour vanter ses nouvelles fictions et là rien. C’est que, depuis des années, main dans la main, Takis Candilis et Étienne Mougeotte nous y annoncent la mort du téléfilm de 90 mn, avantageusement remplacé par des fictions pétaradantes de modernité et de 52 minutes. Comme l’Hôpital. Qui a fait 16% de parts de marché. Du coup, pour le déjeuner, ceinture. Et de toute façon, Mougeotte a d’autres Figaro Magazine et nous d’autres Nagui à fouetter.

Car Nagui, oui, ce bon vieux Nagui, présente ce mardi une rétrospective de dix ans de tendances télé. Au passage, totalement indigente, la rétro, mais figurez-vous que Nagui la commente entièrement en anglais. Car l’anglais est la langue officielle du Mip, donnant parfois lieu à des situations cocasses. Lors de la conférence de presse de Leslie Moonves, patron de la chaîne américaine CBS et désigné "Personality of the year" par le Mip, un journaliste asiatique s’embarque dans des questions farfelues dans un anglais qui ne l’est pas moins. Les questions, on n’est pas sûrs d’avoir compris, mais les réponses sont claires : non, CBS ne diffusera pas le concert du New-York Philharmonic Orchestra et c’est non aussi pour le tae-kwon-do.

Pour le lancement de "No Comment TV" sur YouTube par Euronews, ça devient n’importe quoi. Philippe Cayla, patron d’Euronews, parle anglais comme la vache espagnole de Michel Rocard. Et c’est dans cet anglais de cuisine qu’il répond aux questions en anglais de cuisine des journalistes français. Mais une consœur a dit « Non ». Cette courageuse journaliste — dont nous tairons le nom mais qui travaille dans un quotidien économique qui commence par « Tri » et finit par « Bune » – pose ses questions en français. Non mais alors ! Comme disait l’autre jour Sébastien Chabal, "We are in France, we speak French". Las, aux questions en bleu-blanc-rouge de notre héroïne du jour, il fut répondu en anglais par le patron français d’une chaîne européenne. Bloody hell.

(1) Parce que vous pensiez qu’on profitait du Mip pour faire la grasse matinée, hein, ingrats lecteurs.
 

Isabelle Roberts, Raphaël Garrigos
 

 

Source : Écran de Libération.fr, le mercredi 10 octobre 2007

http://www.ecrans.fr/Mip-mip-revoila-les-coyotes-God,2298.html

 

 

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Réaction de Mme Brigitte Laval :

C'est rageant de voir que ce Mip basé à Cannes a comme langue officielle l'anglais ! Nous ne sommes pas une colonie britannique, ne l'avons jamais été ! Et pour ma part, je n'ai pas l'intention de considérer mon pays comme tel !

Que l'on ne me réponde pas que l'anglais est la langue internationale, la langue d'union, d'amitié de communication entre les humains. Non ! Plusieurs langues sont internationales aussi, français y compris! L'anglais est seulement la langue de la première puissance mondiale, dont on peut apprécier ou non la culture, la façon de vivre ! Mais cette culture, cette façon de vivre, véhiculés par la langue anglo-américaine, n'ont pas à se substituer aux autres. Nous n'avons pas à singer les Américains, nous n'avons pas à faire en permanence des efforts pour exprimer nos idées en une langue étrangère, étrangère, oui, comme toutes les langues étrangères, bien qu'un ancien ministre ait déclaré un jour le contraire ! Tous ces efforts, de plus, pour se rendre plus ou moins ridicules ! C'est si triste !

Alors, bravo à M. Chabal et à la journaliste courageuse d'avoir refusé de s'exprimer en anglais en France. Et honte à ceux, Français comme eux, qui ont répondu en anglais !

Les Américains eux-mêmes ne sont pas dupes et doivent bien rigoler : « L'emploi de l'anglais accroît l'influence politique des pays anglophones beaucoup plus puissamment qu'une forte économie ou une grande puissance de feu » (Washington Post 1992). Alors, où est la langue si sympathique et si neutre chargée de réunir les humains ?

Une dernière citation pour nos anglophiles béats : « Si tu te comportes en ver de terre, ne t'étonnes pas que l'on t'écrase » (Kant).

 

 

 

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