Sujet :

Colonisation de l'Europe par les États-Unis d'Amérique !

Date :

14/10/2006

D' Anna-Maria Campogrande (courriel : anna-maria.compagrande(chez)skynet.fr) 

Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondante, remplacez « chez » par « @ ».

Colonisation de l'Europe par les États-Unis d'Amérique !

Comme je l'ai déjà dit, j'ai cru dans le projet européen, je n'y crois plus parce que il est totalement à la dérive, il ne reste quasi plus rien du projet original dont, je l´avoue, j´ai été fasciné aussi longtemps qu´il a existé. Le projet d´intégration qu´on a connu jusqu´aux années 80 n´existe plus, il a été transformé en projet de colonisation au bénéfice des États-Unis d'Amérique.

Cela étant, aussi longtemps que les institutions de Bruxelles continueront d´exister, il n´est de l´intérêt de personne de les ignorer parce qu'elles continuent à fonctionner à l´encontre des citoyens européens et déterminent notre vie quotidienne, conditionnent le sort des nos langues et de notre culture au tréfonds de notre être. C´est, en très grande mesure, par le biais des mécanismes communautaires qu´on se retrouve avec le tout anglais, notamment au sein de ces institutions, et donc dans la conception des politiques et des réglementations, dans tous les programmes liés à l´éducation, dans les programmes et projets de toute sorte que la Commission européenne finance, dans les appels d´offre pour les mettre en œuvre.

Je crois l´avoir déjà raconté ici : il n´y a pas longtemps une ONG belge dont les statuts étaient rédigés en français, a dû les faire traduire en anglais pour participer à un appel d´offre. Ce qui montre bien que même le trilinguisme, sur lequel se reposent Allemands et Français, n´est qu´un mirage.

Ma position n´est pas de suivre ce type d´intégration mais d´être là pour la contrer avec tous ceux qui se sentent concernés et par tous les moyens légaux à notre disposition. En l´absence de quoi, nous nous réveillerons un jour avec la Constitution européenne en place en dépit des NON, l´anglais comme langue unique, même dans le fonctionnement interne de nos pays, les femmes européennes en tchador, la Turquie et même Israël et la Palestine comme nouveaux États Membres afin de porter la paix dans cette région et perdre celle de la nôtre.

La question posée par Charles Durand : « Il serait intéressant d'élucider les mécanismes par lesquels les Étatsuniens ont réussi à infiltrer la Commission »,  est très intéressante parce que la réponse à cette question met en évidence le cœur du problème qui consiste en l´existence de deux Europe :  la pragmatique et celle de l´État de droit. Les Américains avec l´allié Britannique ont réussi parce qu'ils sont des pragmatiques qui n´ont aucun besoin des règles ni d´une quelconque cohérence avec les engagements pris, contrairement à ce qu´il en est de nous les Gréco-Latins, les Allemands et d´une manière générale les continentaux qui fondent le vivre ensemble sur le droit écrit. Les Anglo-Américains chevauchent n´importe quel tigre pour arriver au résultat qu´ils poursuivent.

 

Je vais vous donner quelques exemples parmi des milliers.

1. Lors des dernières discussions au Conseil de Ministres pour l´entrée de la Turquie, Condoleeza Rice est restée des heures au téléphone avec toute la diplomatie européenne aux plus hauts niveaux en prenant contact, un par un, avec tous les participants à la réunion et en arrachant à chacun sa disponibilité à une ouverture. Or, les États-Unis d'Amérique ne sont pas un membre de la Communauté européenne et Condoleezza Rice n´a pas de droit de cité au sein du fonctionnement institutionnel de l´Europe. S´il y avait un minimum d´identité européenne et de solidarité entre les pays de l´Europe, Condoleezza ne devrait même pas être admise, lors d´une réunion du Conseil des Ministres européens, à discuter de ce sujet avec la diplomatie européenne, mais les Américains ne s´arrêtent pas face à ces futilités et les Européens encaissent.

  2. Lorsque, à la Commission, j´étais dans le service qui s´occupe des droit de l´homme au plan international, sous la responsabilité du Commissaire britannique Chris Patten, tout d´un coup on a vu arriver deux « stagiaires » américains auxquels on a confié des dossiers parmi les plus sensibles. L´un des stagiaires a eu le cran de venir me donner des instructions sur ce que je devais faire et écrire, suite à ma non collaboration et à mes vives protestations les stagiaires ont du déguerpir afin d´éviter un possible scandale, mais moi-même j´ai été vertement réprimandée et obligée de changer de poste. Ce genre de choses devraient être prises au sérieux, mais personne veut se mouiller, tout le monde veut apparaître agréable, tolérant, « cool », les hautes hiérarchies ne bougent pas, laissent faire et voilà où l´on en arrive. Je me demande combien de « stagiaires » américains continuent à travailler sans encombre dans les méandres des services de la Commission parce qu'ils ne sont pas  tous tombés sur une casse-cou comme moi.

  3. Lors de la rédaction du Traité de Maastricht beaucoup d´États Membres n´étaient pas favorables à « communautariser » le domaine de l´Éducation et Culture, dont on a déjà parlé, par soucis de préserver l´identité nationale, de ce fait, sous la pression de certaines « bonnes intentions » déclarant souhaiter valoriser la culture en tant que patrimoine commun, on a inséré deux articles qui accordent à la Commission une faculté de consultation et de coordination en interdisant explicitement  toute réglementation. Il n´a pas fallu plus que cela pour coloniser l´Europe à l´anglais, depuis lors les réunions se multiplient avec la participation du Conseil de l´Europe et de pays tels que la Norvège et autre qui ne sont pas membres de la Communauté européenne, mais anglophiles convaincus. Dans un tel contexte, la France et les éventuels autres pays qui voudraient défendre leur langue devient encore plus minoritaires qu´au sein de l´Union. Peut importe, les résultats de ces réunions sont transmis aux instances nationales qui ensuite imposent l´anglais partout au nom de l´Europe.

Comment voulez-vous, vous qui croyez en l´État de droit, vous battre avec ceux qui ne savent, ou ne veulent, pas faire la différence entre une disposition législative et un compte-rendu ?

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ces mécanismes diaboliques, mais je voulais simplement exposer les raisons pour lesquelles je considère qu´il ne faut pas ignorer le processus d´intégration de l´Europe, et que, lorsque j´en parle, ce n´est pas nécessairement pour dire que je suis d´accord.

 

Anna Maria Campogrande

 

 

 

Haut de page