Sujet :

L'empire étatsunien lance une nouvelle attaque contre la diversité culturelle

Date :

06/05/2013

D'Albert Salon (courriel : albertsalon(chez)noos.fr)  

Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez « chez » par « @ ».

L'empire lance une nouvelle attaque contre la diversité culturelle :

Il s'agit de la négociation demandée à l'Union européenne (UE) par les États-Unis d'Amérique (EU) d'un accord bilatéral de libre échange.

Drapeau euro-yanquiDerrière cet intitulé apparemment anodin, se cache la volonté de l'empire, d'assurer la domination sans partage de ses industries culturelles, notamment cinématographiques de ses "Majors", par la soumission de l'UE aux règles de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC) qui n'admettent pas l'exception culturelle.

Si les États-Unis obtenaient entière satisfaction, ils auraient enfin leur revanche triomphale sur la France, le Québec, l'OIF, principaux promoteurs de la convention UNESCO du 20 octobre 2005.

Convention bête noire des États-Unis, contre laquelle ils avaient été les seuls, avec leur indéfectible allié Israël, à voter.

Convention contre laquelle ils ont continué à lutter avec acharnement - par accords bilatéraux de libre échange imposés à des États faibles signataires de ladite convention UNESCO (Maroc, Cambodge, et plusieurs autres...) pour effacer leur grave défaite diplomatique et promouvoir leurs énormes intérêts financiers en ce domaine.

Si l'UE acceptait les conditions états-uniennes, c'est la France qui souffrirait le plus gravement de cette soumission, car elle a toujours su jusqu'à ce jour exempter de ces règles impériales ses propres industries culturelles, notamment la belle vitalité de sa création et de sa distribution cinématographiques, d'autant plus gênante pour les "Majors" que les protections et subventions françaises contribuent, par les coproductions, à tenir la tête hors de l'eau des cinémas européens, africains, et autres, qui n'ont pas su protéger leur cinéma de la domination des États-Unis.

 

M. Karel de Gucht au Forum de Davos en 2012

 

Malheureusement, les États européens membres de l'UE ont délégué à celle-ci, à la Commission de Bruxelles, leurs pouvoirs de négociation avec l'OMC et avec les États-Unis en matière d'accords touchant au dogme intangible de « la concurrence libre et non faussée ».

La négociation au nom des États européens est donc menée par le « Commissaire européen » compétent, actuellement M. Karel de Gucht. Or, dans leur grande majorité, les États européens ont déjà renoncé à vraiment protéger leurs industries culturelles, ou sont prêts à le faire pour obtenir un accès plus large de leurs produits au marché états-unien dans les autres domaines.

La France en est donc hélas réduite à faire le siège de partenaires européens a priori mal disposés, et de ce Commissaire qui adhère pleinement à l'idéologie dominante, et dont le pouvoir de négociation et de conviction sera faible en ce qui concerne la défense de l' « exception culturelle française ».

La France elle-même est divisée sur ce sujet, et nos gouvernements, depuis quelques années, ne sont pas a priori hostiles à l'empire anglo-saxon ni à son relais bruxellois.

Heureusement, le monde culturel français semble se mobiliser et exercer les pressions nécessaires. La résolution jointe du Sénat en est la première manifestation officielle.

Cette démarche ne peut que recueillir le soutien très actif de nos associations de promotion du français et de la Francophonie.

Je suggère donc à d'autres associations (CO.U.R.R.I.E.L, DLF, A.FR.AV, ASSELAF, CLEC, etc.) de monter au créneau de leur côté.

 

Albert Salon, ancien ambassadeur, président d' Avenir de la langue française (ALF).

http://www.avenir-langue-francaise.fr

 

 

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N° 522

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 avril 2013

 

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

 

 

présentée, en application de l'article 73 quinquies du Règlement, relative au respect de l'exception culturelle et de la diversité des expressions culturelles,

Par Mme Marie-Christine BLANDIN, M. David ASSOULINE, Mmes Françoise CARTRON, Brigitte GONTHIER-MAURIN, M. Jacques LEGENDRE, Mme Catherine MORIN-DESAILLY, M. Jean-Pierre PLANCADE, Mme Maryvonne BLONDIN, M. Louis DUVERNOIS, Mme Sophie PRIMAS, MM. Serge ANDREONI, Maurice ANTISTE, Dominique BAILLY, Pierre BORDIER, Mmes Corinne BOUCHOUX, Marie-Annick DUCHÊNE, MM. Louis DUVERNOIS, André GATTOLIN, Mme Françoise LABORDE, MM. Pierre LAURENT, Michel LE SCOUARNEC, Jean-Jacques LOZACH, Philippe MADRELLE, Jacques-Bernard MAGNER, Mme Danielle MICHEL, M. Jean-Pierre LELEUX et Mme Claudine LEPAGE,

 

Sénateurs

(Envoyée à la commission des affaires européennes.)

 

EXPOSÉ DES MOTIFS

 

 

Mesdames, Messieurs,

 

La Commission européenne a adopté le 12 mars dernier un projet de mandat autorisant l'ouverture de négociations concernant un accord global sur le commerce et l'investissement, intitulé « Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement, entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique » qui inclurait les services culturels et audiovisuels.

C'est la première fois, en vingt ans, que la Commission ne respecte pas le principe de l'exception culturelle, en n'excluant pas expressément le secteur audiovisuel d'un accord de commerce international, a fortiori avec les États-Unis. Il s'agit là d'une offensive libérale sans précédent qui ne saurait laisser la représentation nationale indifférente.

La culture ne peut être considérée comme une marchandise comme les autres, sauf à accepter la disparition de la diversité culturelle. Le caractère d'universalité qui s'attache aux biens culturels ne saurait, dès lors, être remis en cause. La Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l'Organisation des Nations-Unies pour l'éducation, la science et la culture du 20 octobre 2005 s'attache à le démontrer. Il importe, d'ailleurs, de souligner que contrairement à l'Union européenne, les États-Unis ont refusé d'être parties à cette Convention.

Le traité de Lisbonne a introduit une novation dans la rédaction de l'article 207 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif aux négociations commerciales. Il est possible de déroger au principe de la majorité qualifiée, lors du vote au Conseil qui entérinera le mandat de négociation de la Commission, si les accords commerciaux risquent de porter atteinte à la diversité culturelle et linguistique de l'Union européenne. Cette disposition revient à donner un droit de veto à un État membre, à condition qu'il soit en mesure de prouver cette atteinte.

Afin de se garder de cette interprétation, la Commission a introduit dans le texte de son projet de mandat une mention selon laquelle la diversité culturelle serait préservée. Peut-on sérieusement croire que cette affirmation platonique permettra aux nouveaux supports numériques agrégateurs de contenu, principalement détenus par des sociétés américaines, de respecter la diversité culturelle une fois l'accord de libre-échange agréé ?

Peut-on sérieusement accréditer l'idée qu'une libéralisation des échanges avec les États-Unis dans le domaine des services audiovisuels ne serait pas dommageable pour les industries cinématographiques et la diversité linguistique européennes ?

Peut-on, enfin, réellement soutenir la thèse selon laquelle les services audiovisuels seront protégés alors que les États-Unis sont particulièrement à l'offensive sur ce secteur important de leur politique commerciale ?

La France - comme l'Union européenne - est attachée au principe de la neutralité technologique en vertu duquel le support technique ne saurait modifier le contenu de l'œuvre. Elle reste dès lors attentive à ce que l'environnement numérique ne soit pas propice à remettre en cause la diversité des expressions culturelles que le traité de Lisbonne protège juridiquement.

Aussi cette proposition de résolution relative au respect de l'exception culturelle et de la diversité des expressions culturelles dans les négociations commerciales a-t-elle pour objet d'inviter le gouvernement à demander l'exclusion explicite des services audiovisuels du mandat de négociation de la Commission, en l'engageant, si nécessaire, à utiliser le droit de veto dont il dispose en vertu de l'article 207 paragraphe 4 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

 

 

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

Article unique

 

 

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu l'article 22 de la Charte des droits fondamentaux,

Vu l'article 3 du Traité sur l'Union européenne,

Vu le paragraphe 4 des articles 167 et 207 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

Vu la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l'Organisation des Nations-Unies pour l'éducation, la science et la culture, adoptée à Paris le 20 octobre 2005,

Vu la recommandation adoptée par la Commission européenne le 12 mars 2013, de décision du Conseil autorisant l'ouverture de négociations concernant un accord global sur le commerce et l'investissement, intitulé « Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement, entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique » [COM (2013) 136 final],

Considérant que la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne précise que « l'Union européenne respecte la diversité culturelle (...) et linguistique »,

Considérant que le Traité sur l'Union européenne promeut et défend la diversité culturelle au sein de l'Union européenne, notamment dans le cadre de la négociation d'accords commerciaux entre l'Union européenne et des pays tiers,

Considérant que le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne exige un vote à l'unanimité au sein du Conseil de l'Union européenne pour la négociation et la conclusion d'accords avec un ou des pays tiers « dans le domaine du commerce des services culturels et audiovisuels lorsque ces accords risquent de porter atteinte à la diversité culturelle et linguistique de l'Union »,

Considérant que l'Union européenne est, comme la France, partie à la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles précitée,

Considérant que les États-Unis ont refusé, à l'inverse, d'être partie à cette même convention,

Considérant que la culture ne saurait se résumer au concept de marchandise,

Considérant que les biens et services culturels ne sauraient être assimilés à des marchandises comme les autres,

1. Regrette qu'en refusant d'exclure explicitement les services culturels et audiovisuels du projet de mandat de négociation de la Commission européenne concernant un accord global sur le commerce et l'investissement, intitulé « Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement, entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique », le vote intervenu le 12 mars 2013 au sein du collège des commissions sur ce mandat de négociation n'ait pas permis de prendre pleinement en compte la protection et la promotion de la diversité culturelle ;

2. Demande, par conséquent, que les services audiovisuels soient expressément exclus du mandat de négociation de la Commission européenne concernant le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique, afin d'assurer la pérennité de l'industrie cinématographique et audiovisuelle européenne, tout particulièrement dans l'environnement numérique ;

3. Affirme son attachement au principe de la neutralité technologique, en vertu duquel la nature du support ne modifie pas le contenu de l'œuvre, et souligne que l'insertion des technologies de l'information et de la communication dans l'accord de libre-échange ne saurait être un moyen de contourner la protection de la diversité culturelle, attachée en particulier aux contenus audiovisuels et cinématographiques ;

4. Considère que la mention expresse de la protection de la diversité culturelle dans la recommandation, adoptée par la Commission européenne le 12 mars 2013, de décision du Conseil précitée ne saurait suffire ni à garantir la protection effective de la diversité culturelle, ni à faire obstacle à ce que le Conseil puisse exiger un vote à l'unanimité en son sein afin de garantir le respect de la diversité culturelle ;

5. Demande, pour le cas où la diversité culturelle ne serait pas préservée de manière adéquate, notamment par l'exclusion explicite des services audiovisuels dans le mandat de négociation, que le Gouvernement utilise son droit de veto, si nécessaire, au titre de la protection de la diversité culturelle, en application du a du paragraphe 4 de l'article 207 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, lorsque le Conseil de l'Union européenne sera amené à examiner la proposition de mandat de négociation en vue de son adoption.

 

Document au format PDF

 

 

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Merci d'écrire à votre sénateur pour qu'il soutienne cette proposition :

http://www.senat.fr/senateurs/senatl.html

 

 

 

 

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