Sujet :

Des Indiens manifestent contre le tout-anglais !

Date :

20/08/2014

Envoi de Charles Durand  (courriel : charles.durand(chez)hotmail.fr)  

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Des Indiens contre le tout-anglais !

Dans « le choc des civilisations » de Huntington, je crois me souvenir que le chiffre donné pour les locuteurs de langue anglaise aux Indes est bien plus faible que les 230 000 annoncés par l'article du Monde. J'avais d'ailleurs cité Huntington à ce propos dans un de mes livres.

Enfin, puisqu'il s'agit du Monde, on peut facilement penser que cet organe de relais de la pensée mondialiste et atlantiste a certainement tendance à embellir la situation en faveur de l'anglais !

CD

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Les Indiens mettent l'anglais à l'épreuve

Par Julien Bouissou

Des Indiens contre le tout-anglais

 

New Delhi, le 1er août. Des organisations nationalistes telle Hindu Sena manifestent contre le test d'aptitude au concours d'entrée dans la fonction publique.

|India Today/ZUMA/REA / India Today/ZUMA/REA

 

Supprimer les tests dans la langue de l'ancien colon aux concours d'accès à la fonction publique, c'est ce que revendiquent les étudiants indiens. Un mouvement qui met en évidence la montée en puissance de la classe moyenne dans un pays où seule l'élite parle couramment l'anglais.

C'est un petit test d'anglais qui a déclenché une gigantesque tempête politique en Inde, entraînant même des suspensions de séance au Parlement. Les épreuves incriminées font partie d'un examen permettant de présélectionner, parmi plus de 900 000 candidats, ceux qui sont autorisés à passer le concours d'entrée dans la fonction publique avec, à la clé, 1 291 places. Des tests de logique et d'anglais ont été ajoutés en 2011.

Problème : l'anglais est la langue maternelle de 230 000 Indiens seulement, selon les chiffres du recensement de 2001, et 87,5 millions le parlent en deuxième langue. Autant dire une minorité dans un pays qui compte 1,2 milliard d'habitants. Et même si la plupart des lois, la Constitution indienne ou encore les jugements de la Cour suprême sont rédigés en anglais, les manifestants s'insurgent contre un concours qui favoriserait la minorité anglophone.

« Nous n'avons rien contre l'anglais ni l'hindi. Nous réclamons juste l'égalité des chances », explique Roji M John, le président du syndicat étudiant NSUI, affilié au Parti du Congrès, aujourd'hui dans l'opposition. Début août, les étudiants indiens sont descendus dans la rue pour réclamer l'annulation de l'examen controversé. « Non à la discrimination des étudiants originaires des zones rurales », pouvait-on lire sur leurs pancartes. La bataille entre l'hindi et l'anglais est en réalité celle des pauvres contre les riches, des castes inférieures contre les castes supérieures, des déclassés contre l'élite, des campagnes contre les villes... Yogendra YadavDans la mosaïque culturelle indienne, toute question linguistique est politique, car elle traduit un rapport de force entre communautés. Dans une tribune publiée dans le quotidien The Indian Express, Yogendra Yadav, le porte-parole de l'Aam Aadmi Party (AAP) ou Parti de l'homme ordinaire, . dénonce un « apartheid linguistique » :« Les manifestations ne prennent pas pour cible l'anglais mais la domination de l'anglais. Elles s'attaquent à ce présupposé selon lequel tous les talents du pays résident dans le petit groupe de locuteurs de l'anglais.» Dans l'enseignement supérieur, les personnes parlant l'hindi ne sont pas les seules à souffrir de cet « apartheid ». Dès l'école primaire, les enfants issus des populations tribales qui ne parlent ni l'hindi ni l’une des 22 langues reconnues par la Constitution indienne ne vont pas jusqu'au bout de l'année scolaire ou connaissent des problèmes d'apprentissage.

SI L'USAGE DE L'ANGLAIS SERT LES INTÉRÊTS DE L'ÉLITE, par quoi le remplacer ? L'hindi, qui est la langue maternelle d'au moins 420 millions d'Indiens, ne fait pas non plus l'unanimité. Les habitants du Sud y voient le vecteur de la domination culturelle et politique du Nord. Au lendemain de l'indépendance de l'Inde, en 1947, l'Assemblée constituante avait été confrontée au même problème pour choisir la langue officielle. L'anglais était alors la seule langue véhiculaire du pays. Mais comment les parlementaires pouvaient-ils choisir la langue des colonisateurs dont ils venaient de s'affranchir ? En réponse à l'argument selon lequel l'hindi, la langue la plus parlée, devait être retenu. C.N. Annadurai, un parlementaire de l'ex-État de Madras, dans le Sud du pays, avait déclaré : « Si nous avions dû accepter le principe de la supériorité numérique pour sélectionner notre oiseau national, alors ce ne serait pas le paon, mais le corbeau que nous aurions choisi. » L'Inde retint finalement l'hindi et l'anglais comme langues nationales. Ce compromis, qui devait être une solution provisoire, est toujours en vigueur. Aujourd'hui, l'anglais n'est plus la langue du colonisateur, mais celle de l'élite. Et la contestation de la suprématie de l'anglais dans l'administration indienne signale l'ascension des classes moyennes. L'élite anglophone qui monopolisait l'administration indienne se tourne vers le secteur privé. Le gouvernement indien a annoncé, le 4 août, qu'il supprimerait l'épreuve d'anglais controversée et qu'il lancerait une réforme du concours à la fin du mois. Parmi les pistes envisagées, la possibilité, pour les candidats, de passer l'examen de présélection dans l'une des 22 langues reconnues par la Constitution indienne.

 

Source : lemonde.fr/le-magazine, le samedi 16 août 2014

 

 

 

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Réaction de Billot de la Meurthe

Merci pour cet article, ça fait toujours plaisir de voir des gens résister à la domination de l'anglais... juste pour préciser : la Constitution indienne prévoyait que l'anglais resterait langue officielle pendant 15 ans. Mais 15 ans après, personne n'a pu se mettre d'accord sur l'hindi, parlé dans une partie du pays seulement. Le problème est le même aujourd'hui, en dehors de l'anglais aucune langue ne peut « chapeauter » toutes les zones géographiques de ce pays immense.

 

 

 

 



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