Sujet :

La mort de la culture française, vue du Vietnam

Date :

13/02/2008

De Charles Durand  (courriel : charles.durand(chez)hotmail.fr)  

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La mort de la culture française,

vue du Vietnam

 

L’édition européenne du magazine TIME du 21 novembre 2007 présentait en page de couverture “The death of French culture”, titre d’un article de Jonathan Burton, qui suscita plusieurs réactions dans la presse française à grand tirage. Le journal “Le Monde”, en la personne d’Antoine Compagnon, monta au créneau pour faire une mise au point ferme sous le titre “Le déclin français vu des États-Unis”, publiée le 29 novembre. Il précise que l’édition étasunienne du TIME n’a pas jugé utile de reprendre l’article. Pour lui, cette abstention confirme que, du point de vue étasunien, la culture française est déjà bien enterrée, « décidément nulle et non avenue » (sic). « C’est une vieille rengaine », affirme-t-il. Il y a trois ans, la “London Review of Books” avait publié deux articles tonitruants de Perry Anderson sur “La chute de la France”. Toutefois, la plupart des magazines et journaux anglo-saxons sont coutumiers du fait, sans forcément donner à leurs diatribes des titres suffisamment accrocheurs pour déclencher des réactions du lectorat français. Il faut encore remarquer que l’article du TIME, qui n’est pas apparu dans l’édition étasunienne de ce magazine, a donc été destiné en priorité à un lectorat d’Europe continentale et dont le but est bien évidemment de modeler l’opinion de tous ceux qui se donnent pour obligation la lecture du TIME, la plupart du temps pour maintenir leur niveau en langue anglaise, ou bien pour en parfaire l’acquisition.

Le dénigrement de tout ce qui est français semble être depuis fort longtemps l’un des sports favoris des médias anglo-saxons. Cependant, l’article du TIME mérite qu’on s’y attarde, car il est écrit par un journaliste qui, de toute évidence, a lourdement investi dans l’apprentissage de notre langue qu’il faut bien évidemment maîtriser pour seulement prétendre s’intéresser au sujet qu’il traite. On ne peut réfuter les chiffres qu’il avance : 727 romans publiés à l’automne du paysage littéraire français, 900 prix littéraires sur l’Hexagone, 200 nouveaux films autochtones sortis sur les écrans français dans les derniers 12 mois, un milliard deux cent millions d’euros de recette des ventes de nouvelles musiques et chansons. Ces chiffres sont effectivement impressionnants. Malheureusement, comme le souligne Burton, cette immense activité culturelle, de loin la plus forte par rapport à nos partenaires européens, a un très faible impact à l’extérieur de la France. Des 727 romans publiés à l’automne, seulement trois ou quatre trouveront un éditeur qui se chargera de leur traduction et de leur diffusion à l’étranger, alors que 30% des romans fictions vendus en France sont des traductions d’auteurs anglo-saxons. Force est également de constater que les noms d’Abdellatif Kechiche, Arnaud Depleschin, François Ozon, Olivier Assayas, Olivier Dahan (La môme), Agnès Jaoui, ou même Jean-Pierre Jeunet et son Fabuleux destin d'Amélie Poulain sont à peu près inconnus à l’étranger... Si notre papy rocker Johnny Hallyday demeure sans conteste le vétéran de la chanson “pop” sur la scène française, les groupes “Air” et “Daft Punk” sont, à l’étranger, assimilés à des groupes anglo-saxons et ne viennent en rien renforcer la perception d’une présence culturelle française que la France s’efforce de maintenir ou de développer, comme c’est le cas en Asie du sud-est, par exemple.

 

Une action culturelle inefficace

Sans faire de misérabilisme particulier ni d’auto-flagellation, on est obligé de constater que, dans certaines régions du monde où la France aimerait continuer à avoir une influence culturelle significative, l’action culturelle déployée demeure à peu près inefficace. C’est particulièrement le cas au Vietnam et l’examen de la situation vietnamienne est particulièrement éclairante sous bien des aspects. Les chiffres officiels indiquent une croissance économique annuelle aux alentours de 7% pour ce pays qui a d’immenses besoins dans tous les domaines. Les hommes d’affaires français semblent enfin découvrir que la proximité culturelle crée un terrain éminemment favorable pour écouler leurs produits et faire valoir leurs services. Dans Hanoï, la capitale vietnamienne, la promotion de la culture et de la science françaises est assurée directement ou indirectement par plusieurs organismes. Sans avoir l’ambition d’établir une liste exhaustive, on peut citer, par exemple,  “l’Espace” ou Centre culturel français, qui dépend directement des Affaires étrangères, donc de l’ambassade de France à Hanoï, l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) qui a développé les filières universitaires francophones et son institut d’informatique. Toutefois, au delà de ces organismes financés directement ou indirectement par l’État français, on trouve également le lycée français Alexandre Yersin, le laboratoire MICA de l’université de technologie de de Hanoï (Bach Khoa), l’hôpital français, la Maison du droit ainsi que des structures temporaires correspondantes à des coopérations bilatérales avec des hôpitaux, des laboratoires français et des universités. La présence française s’étend bien entendu à celle des succursales de compagnies françaises, des fournisseurs de matériel télécom tels qu’Alcatel, des spécialistes de la pétrochimie tels que Technip, des grands groupes de l’industrie hôtelière tels qu’Accor, des représentants de l’industrie bancaire tels que Calyon ou des PME œuvrant dans le domaine du génie logiciel, de la pharmacologie ou de l’industrie manufacturière. Toute cette nébuleuse diffuse d’acteurs divers, chacun œuvrant souvent dans le sens étroit de ses intérêts propres et immédiats, compte finalement beaucoup de monde et a un impact économique qui est loin d’être négligeable. En dépit de près d’un siècle d’ancienne présence coloniale et des avantages que cela pourrait lui conférer[1], force est de constater que l’image de la France de 2008 au Vietnam est singulièrement atrophiée par rapport au poids de sa présence et par rapport à son impact économique et que, bien sûr, en retour, il est loisible de penser que cet impact économique est atrophié par rapport à ce qu’il pourrait être, au détriment des intérêts français bien entendu. Les penseurs français contemporains font rarement l’objet d’études. A l’exception notable du domaine médical, le travail des scientifiques français est largement ignoré ainsi que celui des économistes et des spécialistes hexagonaux du développement. Il y a quelques années, la conférence de Jean-Marie Lehn, pourtant prix Nobel de chimie, ne remplit qu’au tiers l’auditorium de “L’Espace”, le centre culturel français qui se trouve en plein centre-ville de Hanoi, au cœur du quartier des affaires. La majorité de ceux qui étaient venus écouter Jean-Marie Lehn était d’ailleurs composée de francophones natifs, Français, Belges, Suisses ainsi que d’autres nationalités.

Afin d’attirer davantage d’autochtones, “l’Espace” culturel français assure depuis longtemps l’interprétation simultanée en vietnamien de toutes ses conférences et des films qu’il présente. Chaque exposition se voit dotée de prospectus où la version vietnamienne apparaît souvent en premier avant la version française. “L’Espace” culturel s’efforce également d’attirer des artistes locaux, peu connus, de qualité souvent discutable, pour mettre en valeur leurs œuvres dans l’espoir bien sûr qu’ils deviendront un jour célèbres et que leur réputation retombera alors sur leur mécène de la première heure. Désormais, “l’Espace” remplit sa programmation cinématographique à 50% avec des films que l’on pourrait qualifier “d’art et d’essai” tournés en vietnamien avec des petits moyens par des cinéastes locaux. Depuis fort longtemps, l’accès aux diverses manifestations de l’Espace est gratuit. Le ministère des Affaires étrangères, par le biais de l’Agence universitaire ou de l’ambassade, se montre souvent fort généreux en distribuant des tickets d’entrée gratuits aux cinémas de la ville qu’il subventionne pour constituer les hôtes d’un festival local du film francophone. Mieux encore, afin d’attirer du monde, le dernier cycle de conférences offert par “L’Espace” dans le cadre de “l’Université de tous les savoirs” fut agrémenté les deux premiers jours d’un buffet gratuit. Pour cette dernière manifestation, la publicité fut entreprise plusieurs semaines à l’avance. Des prospectus furent distribués dans plusieurs universités de la ville ainsi que de nombreux lycées. On battit le rappel et on mit à contribution tous les réseaux, plus vietnamiens que francophones, dans l’espoir d’attirer du monde. La semaine de l’université de tous les savoirs fit effectivement salle pleine tout en attirant également quelques éléments indésirables qui se faufilèrent à la fin de chaque conférence, afin de profiter du buffet et du bar. Le directeur du centre fit prendre des photos qui figureront sans doute en bonne place dans le prochain rapport d’activité destiné à ses supérieurs…

 

Le français est-il boudé par les Vietnamiens ?

En incluant dans sa programmation un fort pourcentage de films vietnamiens, en faisant la promotion d’artistes locaux, il n’est pas exagéré d’affirmer que le centre culturel français est désormais AUSSI un centre culturel vietnamien. Cette substitution de la promotion de la culture française par celle de la culture vietnamienne est très sensible et remet en question la raison d’être même de “l’Espace” aux yeux des observateurs extérieurs, même si l’objectif demeure bien sûr d’attirer du monde. Le français rebute-t-il les Vietnamiens ? On peut effectivement le soupçonner quand on se rend compte que les appels à proposition rédigés en français dans le cadre de la recherche scientifique ou du développement de nouvelles techniques qui sont émis par des organismes de financement français tels que le CNRS ou l’Agence universitaire ainsi que les propositions de coopération ne reçoivent pas forcément de réponse de la part des laboratoires ou des universités vietnamiennes, même quand ils sont assortis de financements substantiels. Cependant, dire que le français est boudé par les Vietnamiens serait aller un peu vite dans la détermination d’un diagnostic de la situation. En effet, il s’agit de ne pas confondre causes et conséquences. Dans un but de faciliter la prise de contact ainsi que pour élargir l’éventail de recherche de futures élites, on a créé au Vietnam, principalement sur Hanoï et HCMV (Saïgon), un pôle universitaire français qui fonctionne essentiellement en … anglais. Son financement est désormais assuré par le ministère des Affaires étrangères français qui défraye les coûts d’un enseignement qui, dans certaines disciplines, est assuré exclusivement par des professeurs français expédiés à grands frais au Vietnam dans le cadre de missions temporaires d’enseignement.

L’objectif affiché est la formation des élites, c’est dire que l’on cherche à acheter de l’influence auprès des futurs décideurs vietnamiens et d’établir une proximité culturelle dont le véhicule n’est ni le vietnamien ni le français mais l’anglais. C’est ainsi que les étudiants du pôle universitaire français sont invités, en autres, à la projection de films français sous-titrés à la cinémathèque, et à discuter de leur contenu, toujours en anglais, avec des Français résidents à Hanoï ou Saïgon !

 

Incohérences et contradictions

Non seulement on n’a pas étudié les conditions qui firent, à une époque encore peu lointaine, la réputation internationale des grands auteurs français auprès des élites, mais on envoie constamment des signaux contradictoires à tous les étudiants vietnamiens qui peuvent s’intéresser à ce que la France peut leur offrir dans le cadre de leur formation. C’est ainsi que le consulat a institué le TCF ou “test de connaissance du français”, que tout étudiant vietnamien doit réussir pour prétendre obtenir un visa afin de partir en France pour y continuer ses études. Cependant, de plus en plus d’écoles de l’Hexagone espèrent attirer ces mêmes étudiants en offrant des formations complètes en anglais et qui dispensent a priori leurs candidats de toute connaissance du français. Tandis que les épreuves du TCF, institué par les consulats, sont considérées comme difficiles, l’organisme de tutelle, c’est-à-dire le ministère des Affaires étrangères, a institué des programmes d’ingénieurs d’excellence pour les étudiants vietnamiens où tout peut se faire en anglais ainsi que le pôle universitaire qui est censé fonctionner à la fois en français et en anglais mais qui, dans la pratique, utilise essentiellement l’anglais ! Désormais, il n’est pas rare de voir partir en France, dans le but d’y faire des études, des étudiants vietnamiens ne connaissant pas un mot de français et qui sont bien entendu dispensés du fameux TCF. Dans certains cas, il même possible que ces mêmes étudiants bénéficient de bourses du gouvernement français, comme cela est quelquefois le cas avec les “bourses Évariste Gallois”, par exemple, tel qu’expliqué dans les brochures d’information rédigées en vietnamien. Dans la même ligne, un ancien directeur de l’Institut de la Francophonie pour l’informatique de Hanoï (IFI), Gilles Richard, voulait transformer cette école en établissement anglophone. Créée sous les auspices de l’AUF et de l’IFI, la conférence annuelle RIVF (Rencontres en informatique Vietnam-France) fonctionne désormais en anglais à l’exclusion de toute autre langue, et ce avec la participation active d’un des anciens directeurs de l’IFI, Lorne Bouchard[2], celle d’un de ses anciens directeurs des études, Patrick Bellot[3] et celles de nombreuses autres personnalités vietnamiennes grassement entretenues pour promouvoir la francophonie au Vietnam…

En raison de ces incohérences, ceux qui font la promotion active de notre langue auprès des étudiants étrangers se heurtent de plus en plus à un mur d’incompréhension et d’incrédulité. Comment les Français peuvent-ils encore faire la promotion de leur langue alors que des pans entiers de la société française[4] y renoncent ? Comment convaincre un étudiant vietnamien d’étudier encore le français quand les employeurs des succursales des principales sociétés françaises installées au Vietnam demandent l’anglais en priorité ? Quelle pourrait être encore la motivation d’étudier le français alors que l’hôtel Métropole de Hanoï, propriété du groupe français Accor, ne requiert nullement la connaissance du français de la part des membres de son personnel bien qu’une forte proportion de sa clientèle soit francophone, comme l’on peut facilement s’en rendre compte lorsqu’on dîne dans l’un de ses restaurants ? Les employeurs français rétorquent que la connaissance du français n’est pas suffisamment répandue dans la société vietnamienne pour offrir un choix suffisant de candidats francophones. C’est vrai. Pourtant, les centaines d’étudiants des filières universitaires francophones en produisent plus que suffisamment. Il suffirait de recruter préférentiellement à l’intérieur de ce groupe pour susciter immédiatement un vif regain d’intérêt à l'égard du français.

 

Quelles conditions créer ?

Le vendredi 14 décembre 2007, à l’issue du cycle de conférence qui s’y est tenu dans le cadre de la semaine de “l’Université de tous les savoirs”, le directeur de “L’Espace”, le centre culturel français de la rue Trang Tien, concluait : « La France a été un des pôles incontestés de la réflexion et de la recherche contemporaine et, comme vous avez pu le constater par la qualité des intervenants invités à ce cycle de conférences, elle entend le rester pour très longtemps encore ! ». Malheureusement, un tel statut ne se décrète pas et, même si cela est effectivement le cas, la reconnaissance internationale n’est pas forcément au rendez-vous.

Avant de mettre au point une stratégie visant à augmenter l’efficacité du dispositif culturel français au Vietnam et, d’une manière générale, dans les pays non francophones[5], sans doute faudrait-il se poser un certain nombre de questions sur la qualité de ceux que l’on a choisi comme étant les plus représentatifs de la production intellectuelle française. En effet, c’est bien les auteurs qui sont publiés et ceux dont les œuvres sont largement distribuées qui seront les ambassadeurs de notre culture. C’est à travers les films ayant décroché des prix prétendument prestigieux que notre septième art sera évalué et perçu. C’est bien ceux dont la pensée sera largement diffusée à travers nos magazines, nos journaux, nos livres et nos émissions de télévision qui pourront éventuellement susciter la curiosité et l’intérêt d’observateurs étrangers à l’intérieur et à l’extérieur de notre pays.

À ce titre, sans doute est-il intéressant de porter notre regard sur quelques exemples de cette production que notre pays veut mettre en valeur. Prenons le lauréat du prix Goncourt 2007 pour commencer. Gilles Leroy s’est vu décerné ce prix pour son dernier livre intitulé “Alabama song”. Comme le titre en anglais l’indique, l’intrigue se déroule aux États-Unis, plus précisément à Montgomery, en Alabama. Quel que puisse être l’intérêt d’un Français pour ce type de roman, il est peu probable que l’américanotropisme qu’évoque son titre puisse susciter la curiosité d’un étranger, fût-il remarquablement écrit, puisqu’un étranger ne fera jamais un détour par la France pour découvrir ce qui peut éventuellement l’attirer aux États-Unis. C’est là une évidence. Bien sûr, le Goncourt ne résume pas la production d’une rentrée littéraire mais il en est quand même l’illustre représentant…

En 2005, la palme d’or du festival de Cannes était attribuée au film des frères Dardenne, “L’enfant”. Le ministère des Affaires étrangères par le biais de l’ambassade de France à Hanoï distribua des tickets d’entrée gratuits à tous les Vietnamiens travaillant de près ou de loin pour les institutions francophones. Le film met en scène un voyou dont la maîtresse vient d’accoucher d’un enfant et que le voyou décide de vendre à l’insu de celle-ci pour une somme rondelette à un réseau mafieux qui se charge de replacer les bébés dans des familles désireuses d’adopter. Suite à la réaction de sa maîtresse qui le menace d’aller le dénoncer à la police, le voyou recontacte le réseau pour récupérer le bébé mais il doit alors restituer l’argent qu’il a reçu et dont il a pourtant besoin pour rembourser des dettes. Tourné avec des moyens dérisoires, avec des acteurs inconnus et médiocres, ce film décrit plusieurs des tentatives sordides d’un voyou de basse envergure pour survivre et se débarrasser de ses obligations. Bien que le jury du festival de Cannes soit international, il n’en demeure pas moins que la palme d’or est identifiée à un prix français qui récompense les producteurs du meilleur film de l’année. Or, le spectateur de “L’enfant” baille désespérément d’ennui et finit par quitter la salle. Il n’y rien de pire qu’un prix qui tente de promouvoir ce qu’il y a de plus insignifiant, de plus crapuleux et de médiocre, plus particulièrement pour un étranger qui n’a souvent ni l’occasion ni la volonté de faire un essai supplémentaire à la suite d’un tel premier contact avec la “culture” francophone.

Le troisième exemple est celui de la conférence d’Hervé le Treut, directeur de recherches au CNRS en climatologie et professeur à l’Ecole polytechnique, qui était la première offerte dans le cadre de “l’Université de tous les savoirs”, le 10 décembre 2007, au centre culturel de Hanoï et intitulée: “Les changements climatiques. Que nous apprennent les modèles ?”. On y retrouva toutes les conclusions les plus alarmistes sur les changements climatiques annoncés depuis des années par les grands médias. Aucune nouveauté ! Hervé le Treut désigne l’homme comme le grand responsable de ce phénomène. Là encore, quel est l’intérêt d’inviter un membre éminent de la communauté scientifique française pour répéter une fois de plus les poncifs dont nous abreuvent les médias depuis des années, ou pour appuyer les propos d’un Al Gore qui, contrairement à Hervé le Treut, sait faire diffuser ses messages partout sur la planète ? Quel est l’intérêt pour un intellectuel vietnamien d’assister à une telle conférence qui ne fait que confirmer ce que l’on peut lire dans le dernier numéro du TIME ou de “Newsweek” ? Certes, le sujet est intéressant et ce n’est certainement pas aux services de coopération et d’action culturelle français (SCAC) de contredire les conclusions des chercheurs, mais il est certain que les Vietnamiens qui ont assisté à la présentation de Monsieur le Treut auraient certainement trouvé un peu plus captivant de découvrir que la théorie actuelle concernant les causes du réchauffement climatique EST LOIN DE RÉUNIR UN CONSENSUS, ce que la presse à grand tirage et la télévision ne disent pas. Pourquoi ne pas inviter au contraire le climatologue Yves Lenoir, l’auteur de “Climat de panique”, un livre de 233 pages qui expose les faiblesses des modèles mathématiques utilisés pour établir les prédictions climatiques rapportées par les grands médias ? Ne serait-ce que par honnêteté et impartialité scientifique, pourquoi ne pas présenter les travaux de Khabiboullo Abdoussamatov, collaborateur de l'Observatoire astronomique principal (Poulkovo) de l'Académie des sciences de Russie et qui base ses prévisions climatiques sur les variations de l’activité solaire ? Il eut été facile de faire dans l’original et les Vietnamiens auraient pu réllement aller au-delà de ce qu’ils lisent et entendent depuis des années…

D’un autre côté, peut-on réellement faire confiance à ceux qui sont censés promouvoir notre science et notre culture quand ils ignorent que le célèbre économiste anglais Adam Smith a été largement inspiré par son prédécesseur français François Quesnay (1694-1774) ? Qu’il en fut de même avec le naturaliste Darwin qui a eu le crédit d’une théorie élaborée déjà en grande partie par le biologiste français Lamarck[6] (1744-1829) ! Que le premier vol motorisé était celui de Clément Ader, en 1890, qui devançait de 13 ans celui des frères Wrights ! Que la compression efficace d’images et de vidéos numériques n’est possible que grâce à des techniques mathématiques développées par les Français Morlet et Grossman !

 

Un détour par le passé pour comprendre le présent

Pour tenter de cerner les facteurs qui ont permis, à une époque, de donner à nos penseurs une réputation mondiale, il est intéressant de s’attarder sur le profil totalement atypique de Gustave le Bon (1841-1931). Médecin de formation (doctorat obtenu en 1866), il se passionna néanmoins pour les civilisations disparues. Il parcoura l’Europe, l’Asie, l’Afrique du nord entre les années 1860 et 1880 et rédigea plusieurs ouvrages en anthropologie et en archéologie. Toutefois, ses connaissances nouvellement acquises lui servirent surtout de support pour établir “Les lois psychologiques de l’évolution des peuples”, qui fut publié en 1894. L’année suivante, il écrivit “La psychologie des foules”. Il fut découvert par l’élite internationale qui fréquentait ou qui étudiait à Paris à cette époque, en français bien évidemment, puisque Le Bon n’a jamais rédigé un quelconque ouvrage destiné à publication dans une langue autre que le français. Rapidement, ses ouvrages furent traduits dans une vingtaine de langues et distribués partout sur la planète où existaient des foyers intellectuels conséquents. Le Bon fréquentait les plus brillants esprits de son temps: des mathématiciens tels qu’Henri Poincaré, des écrivains tels que Paul Valéry et des philosophes tels qu’Henri Bergson. Sa réputation internationale lui valut d’être étudié par les bolchéviques et les fascistes qui virent en ses ouvrages un décodage de la psychologie des foules, leur permettant ainsi de manipuler les comportements des masses.

Les idées contenues dans “La Psychologie des foules” furent reprises au début du XXe siècle par Sigmund Freud dans sa “Psychologie collective et analyse du moi”, paru en 1921 et qui est clairement fondé sur une critique de l'œuvre de Le Bon. Elles furent également utilisées par des chercheurs en sociologie des médias tels que Hadly Cantril et Herbert Blumer pour décrire les réactions des groupes face aux médias. Du fait de l’influence qu’il a eu auprès des gouvernements totalitaires, Le Bon semble aujourd’hui sentir le soufre alors que, en fait, il n'a fait qu'analyser des phénomènes sociaux, dont la compréhension peut effectivement servir tout aussi bien à la manipulation idéologique des foules qu'à la prise de conscience des risques de manipulation.

Pourquoi s’attarder sur l’œuvre de Le Bon plutôt que sur celle d’autres penseurs de l’époque ou plus récents ? Premièrement, parce que Le Bon s’est construit d’abord une solide réputation nationale qui, grâce à l’intelligentsia internationale de l’époque qui comprenait et lisait le français, s’est transformée rapidement en réputation mondiale. De plus, les ouvrages de Le Bon sont toujours remarquablement actuels, la plupart de ses prévisions concernant notre époque s’étant révélées étonnamment exactes. Occulté plus qu’oublié aujourd’hui, je l’ai redécouvert en faisant des recherches sur le mouvement politique atypique de Lyndon Larouche, aux États-Unis[7] qui, lui, fait explicitement référence aux livres de Le Bon, dans sa production écrite ! Il faut noter qu’aujourd’hui, Le Bon resterait probablement dans l’ombre. En effet, à l’époque où Le Bon est internationalement connu, il n’existe en France aucun bureau national de relations publiques, de subventions particulières à la culture et aucun organisme étatique ou paraétatique chargé de relayer et de diffuser la pensée française à l’extérieur du pays, comme c’est le cas à l’heure actuelle, pour un résultat à peu près nul. Le public auquel s’adressent les penseurs contemporains de Le Bon se charge de faire le tri et de relayer, d’amplifier, de traduire et de diffuser ses pensées les plus originales intégrées dans ses ouvrages les plus brillants. A ce titre, certaines des remarques de Jonathan Burton dans son article “The death of French culture” sont pleinement justifiées. Les subventions à la production intellectuelle et culturelle sont nuisibles car elles créent et entretiennent un corps de fonctionnaires qui se font les juges en amont d’une production intellectuelle dont l’évaluation devrait être uniquement à la charge du public auquel elle est destinée. Ce corps de fonctionnaires, associé à un appareil médiatique qui n’est plus indépendant depuis de nombreuses années, constitue le passage obligé de la quasi-totalité de la production intellectuelle de notre pays. Il n’est pas sanctionné pour les erreurs qu’il commet et il entretient autour de lui des structures parasitiques, comme c’est le cas au Vietnam. Ces structures parasitiques sont constituées d’intermédiaires vietnamiens francophones qui sont censés “aider” les organismes français à diffuser la langue, la pensée et la culture françaises, et qui se trouvent de facto devant une rente de situation créée par la position à la fois timide et défensive d’un dispositif français qui ressent son influence en déclin et qui recherche désespérément à améliorer sa visibilité pour lui-même et ceux qu’il est censé représenter. Les Vietnamiens francophones sont très habiles pour entretenir l’impression que l’action culturelle française est fondée et bien accueillie par la population. Des intellectuels vietnamiens sont là pour le confirmer, si nécessaire. Le professeur Huu Ngoc[8], par exemple, est mis à contribution pour affirmer que « la culture française fait partie de la chair et du sang des Vietnamiens » (sic). On oublie ainsi un peu vite que les Vietnamiens ne sont ni francophones, ni russophones ni anglophones de cœur et qu’ils ne sont intéressés que par ce que peut leur rapporter, en termes matériels, un semblant d’allégeance aux cultures sous-tendues par ces langues, ou en termes de valorisation personnelle[9].

Des structures parasitiques analogues existent également sur la scène intérieure française. Des structures émanant de divers ministères et des organismes de presse, qui sont sous la houlette d’une poignée de patrons, sont censées apporter leur approbation et leur caution à une production culturelle française de qualité variable mais qui, surtout, pour être agréée, doit être dans la ligne des goûts officiellement proclamés par les instances supérieures qui, elles, ne vivent jamais de la diffusion et de la vente de leurs œuvres. Il n’est donc pas étonnant qu’avec le temps, il y ait eu un décalage progressif entre les goûts du public et les goûts de cette caste payée à vie pour décider ce qui est de l’art et ce qui ne l’est pas, ce qui a une valeur intellectuelle et ce qui n’en a pas, étant entendu qu’il n’est approuvé que ce qui est conforme à l’orthodoxie du moment. C’est bien ce qu’affirme et dénonce Burton, dans son article du TIME. C’est ainsi que les centres culturels français, qu’ils soient en France ou à l’étranger, se font souvent les pourvoyeurs d’œuvres d’art que le commun des mortels ne voudrait pas dans son salon même si on les lui offrait ! En ayant créé des structures qui interdisent l’émergence d’une véritable originalité, on a censuré la créativité et on a répandu une médiocrité généralisée dans le domaine de la culture et de la production intellectuelle qui, à court terme, ruine toute perspective de susciter un regain d’intérêt significatif dans les pays non francophones. Les pontes officiels de la culture décident de ce qui est correct et de ce qui ne l’est pas. C’est le problème d’une culture subventionnée car elle crée automatiquement une structure d’évaluation qui se substitue au public, qui devrait demeurer le seul et unique juge. Le résultat ? Films abscons qui se veulent “d’art et d’essai” ou qui sont censés être très “intellectuels”, expositions prétendument artistiques d’objets loufoques quand ils ne sont pas franchement laids, romans alambiqués insignifiants, pensée sociale sagement cantonnée au politiquement correct, réflexion politique d’une naïveté souvent déconcertante et alignée sur les médias atlantistes. La culture française contemporaine actuelle, TELLE QU’ELLE EST PERÇUE DE L’ÉTRANGER, À PARTIR DE L’ÉCHANTILLONAGE QUI EN EST FAIT, EST UN ROBINET D’EAU TIÈDE, lorsqu’elle n’est pas franchement médiocre. Elle est également dans le sillage des oublis ou occultations souvent inconscients d’un passé intellectuel, culturel et scientifique prestigieux... Quant à la période présente, si les créateurs de talent ne manquent pourtant pas, il n’en demeure pas moins qu’ils restent nécessairement dans l’ombre s’ils n’ont pas accès aux réseaux de distribution et aux médias qui permettraient au grand public de les découvrir.

Les analyses officielles n’ont jamais abouti à de telles conclusions. On a pensé que, pour être lus, désormais, les intellectuels français devaient systématiquement avoir recours à l’anglais. Bernard Kouchner n’écrivait-il pas, dans un de ses livres, que l’anglais était une chance pour la francophonie, en permettant une diffusion maximale des œuvres françaises ? Les divers pays du monde “qui comptent” auraient systématiquement basculé vers une langue seconde, le “globish”, une sorte d’espéranto des temps modernes, par souci d’efficacité, et le modèle universel de référence pour la production intellectuelle et culturelle serait étasunien. C’est ainsi que, jusqu’à une date récente, l’Alliance française utilisait l’anglais pour ses pages d’accueil sur Internet. Il fallu qu’un mycologue français installé en Islande signale cette incongruité et l’explique aux responsables de l’Alliance pour que l’on repasse à des pages d’accueil en français et, quelquefois, dans la langue des pays où l’Alliance française est active[10] ! Quant aux publications en anglais, loin de faire connaître les intellectuels français, elle les dilue dans l’univers des publications anglo-saxonnes et les rend encore plus insignifiants. A ce titre, les cas de Morlet et Grossman sont très révélateurs puisque ces chercheurs français avaient effectivement choisi de publier en anglais leur travail sur les ondelettes et qui a, par la suite, permis la mise au point d’algorithmes de compression d’images sans lesquels la photo et la vidéo numérique modernes ne pourraient pas exister dans leurs formes actuelles. Pourtant, les noms de Morlet et Grossman demeurent inconnus pour la plupart des informaticiens, même français ! Loin de renforcer la présence des scientifiques et autres intellectuels français sur la scène internationale, les publications en anglais viennent en fait renforcer globalement la visibilité des publications anglo-saxonnes au dépens des autres tout en changeant le statut des chercheurs du monde non anglophone en sous-traitants de la recherche étasunienne, dans la plupart des cas.

 

Un passage spontané à l’anglais ?

Tout aussi illusoire est la croyance que le passage massif à l’anglais qui semble avoir été accompli par certains pays fut le résultat d’un processus endogène, correspondant à la volonté des décideurs locaux. A ce titre, l’exemple du Vietnam est particulièrement éclairant. Au début de la décennie 1990-2000, Le ministère de l’Education vietnamien remplaça effectivement l’enseignement du russe (et plus minoritairement du chinois) par celui de l’anglais. Or, l’économie vietnamienne n’a pu décoller que vers 1995 car ce n’est qu’à cette époque que le gouvernement américain a finalement levé son veto interdisant à la Banque mondiale et du FMI de prêter au Vietnam. Un seul pays, les États-Unis, dispose effectivement du droit de veto au sein de ces deux organismes. On sait aujourd’hui que la levée de ce veto a été subordonnée à plusieurs conditions que le Vietnam devait remplir, notamment de substituer à l’enseignement massif du russe dans toutes les écoles vietnamiennes celui de l’anglais. Il s’agissait bien sûr d’éradiquer le plus rapidement possible l’influence russe et la remplacer par une influence anglo-saxonne et américaine prépondérante dans tous les secteurs de la vie intellectuelle du pays et, surtout, d’aligner l’économie vietnamienne sur les intérêts des pays développés, principalement les États-Unis. L’infusion massive des capitaux de la banque mondiale a permis, dans son sillage, à toutes les banques occidentales et autres acteurs économiques privés d’entrer au Vietnam pour y faire des investissements et des affaires. En dépit de l’apparence qu’elle veut se donner – celle d’un organisme consacré au développement et à l’éradication de la misère - la banque mondiale poursuit en fait un programme capitaliste qui est effectivement de développer des économies émergentes, non par bonté d’âme[11] mais pour créer de nouvelles bases de clientèle qui n’existent plus dans les pays développés, où la saturation matérielle est notable, où l’innovation s’essouffle et où la croissance n’affiche guère plus de 2% à 3% par an, alors que, étant partis de presque rien, la croissance des pays émergents atteint souvent 7%, voire 11% dans les cas les plus favorables. En étant le seul pays a posséder le droit de veto au sein de la Banque mondiale et du FMI, les États-Unis ont pu, en plus, utiliser ces institutions afin de faire avancer leurs intérêts spécifiques, tel que ce fut le cas au Vietnam et dans une kyrielle d’autres pays. A ce titre, la naïveté des services culturels de l’État français qui opèrent au Vietnam est désopilante. Est-on ignorant à ce point des dessous de l’action américaine ou fait-on semblant de l’être ? Un pays, un seul, les États-Unis, utilise tous ses atouts pour faire avancer ses intérêts et les SCAC français en sont encore à se demander pourquoi le sort semble s’acharner et contrer leurs actions en Asie du sud-est alors que les dés ont toujours éte pipés et jetés depuis longtemps par un concurrent direct qui ne sera satisfait que quand les autres auront été totalement et définitivement éliminés !

De plus, comment peut-on encore faire semblant d’ignorer des données économiques telles que celles contenues dans le rapport de François Grin, professeur en économie des langues à l’université de Genève, rapport commandité par le gouvernement français lui-même, et qui quantifie pour la France, et plus généralement pour les pays d’Europe continentale, les coûts additionnels colossaux, directs et indirects que la politique de l’espéranglais implique et entraîne ?

 

Ne pas exagérer les choses

Il ne faut cependant pas non plus exagérer les choses. Même à travers son important dispositif de diffusion entouré des conditions les plus favorables, vue d’Asie du sud-est, la culture étasunienne d’exportation est réduite à une caricature et n’a aucun impact profond et durable sur la société. Par exemple, il est quasiment impossible ici de voir un film étasunien qui ne comprenne pas une tuerie à grande échelle ou des petits bonhommes verts synthétisés par ordinateur. Une intrigue réduite au minimum doublée d’une action spectaculaire à la mitrailleuse lourde ou au kung-fu n’est pourtant guère représentative de la culture étasunienne. En effet, même si l’on étudie l’anglais dans les écoles du pays, sa connaissance demeure encore bien trop superficielle pour créer une proximité culturelle suffisante pour que l’on puisse apprécier mieux que du divertissement à caractère spectaculaire, comme c’est le cas avec le cinéma étasunien que Jonathan Burton englobe de manière erronée dans sa notion de “culture”. Même si les Vietnamiens portent des “djines”, boivent occasionnellement du Coca et saluent les touristes occidentaux par “hello”, l’emprise étasunienne sur les cultures d’Asie du Sud-Est est quasiment nulle et susceptible d’être effacée du jour au lendemain suivant les évolutions géopolitiques. De plus, une culture ne peut pas être jugée par son impact commercial. En effet, l’impact commercial de la culture dépend de facteurs qui n’ont souvent que peu de relation avec sa valeur puisqu’il dépend avant tout de la publicité et de l’étendue d’un réseau de distribution.

 

Une culture sous perfusion

J’écris de Hanoï où la culture française est vraiment sous perfusion depuis de longues années et rien ne permet d’envisager que les choses changeront dans un avenir proche. Toute tentative privée de changer le système est vouée à l’échec. En 1996, l’ex-président de la république libanaise Charles Hélou finança un concours international dans le but de recueillir les suggestions les plus pertinentes en vue d’une réforme des institutions de la francophonie institutionnelle. Des discours furent prononcés et des prix furent distribués mais rien ne fut entreprit et on continua à se fier à une caste qui n’est sérieusement préoccupée que par le maintien de ses privilèges. Toutefois, la réforme des institutions, qu’il s’agisse d’instances prétendument internationales comme l’OIF, l’AIF, l’AUF ou les autres structures de diffusion de la culture française pilotées par les Affaires étrangères, telles que les SCAC, n’ont guère d’importance tant que tous les acteurs publics ou privés, qu’il s’agisse de science, de culture, d’économie, de finance ou de simplement faire des affaires, ne gardent pas à l’esprit que, parallèlement aux objectifs qu’ils essaient d’atteindre, celui de défendre et de faire globalement avancer en priorité les intérêts français et francophones ne peut être dissocié de leurs autres préoccupations.

Un examen des conditions passées aboutit à l’irréfragable conclusion qu’UNE ÉLITE INTERNATIONALE CONNAISSANT LE FRANÇAIS PEUT SEULE ASSURER LA DIFFUSION DE LA CULTURE ET DE LA PENSÉE FRANÇAISES À l’ÉTRANGER, fût-elle en faible nombre. La langue française n’a jamais eu autant de locuteurs qu’aujourd’hui, peut-on lire… Peut-être, mais ce n’est pas le nombre absolu qui compte, C’EST QUI COMPTE DANS CE NOMBRE. Quelle que soit la stratégie utilisée dans la diffusion de la culture, de la science et de la pensée française à l’étranger, il est impossible de faire l’impasse sur la connaissance du français. C’est un point incontournable et toute approche qui ignore ce fait est vouée à l’échec.

 

Charles Durand

Hanoi, Vietnam.

Janvier 2008


 

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[1] En Asie du Sud-Est, le meilleur exemple d’une telle situation est sans doute Formose, qui a subi 70 ans de présence coloniale japonaise et où, actuellement, sans évoquer de ressentiments particuliers, l’influence culturelle japonaise demeure très forte ce qui intensifie bien entendu les échanges économiques entre les deux pays.

[2] Ancien professeur de l’Université du Québec à Montréal, aujourd’hui à la retraite.

[3] Aujourd’hui professeur à l’ENST (Ecole supérieure des télécommunications) de Paris.

[4] Comme c’est également le cas en Wallonie, à Bruxelles, au Québec et en Suisse romande.

[5] Même s’il a été anciennement francophone, le Vietnam contemporain ne peut plus être considéré comme francophone, et de très loin. Il est en fait, avec le Laos, la lanterne rouge des pays membres de la Francophonie institutionnelle (OIF) avec seulement 0,3% de francophones. Ce chiffre, qui est publié par l’OIF, est d’ailleurs probablement optimiste.

[6] Voir à ce titre l’excellent ouvrage du généticien français André Langaney intitulé « La philosophie biologique ».

[7] En France, le groupe qui s’est réuni autour de Jacques Cheminade, qui a déjà été candidat à la présidence de la République, est l’excroissance française de cette mouvance politique.

[8] Éminent intellectuel et érudit, il est né en 1918, en pleine période coloniale. Il est reconnu comme la personnalité la plus active œuvrant au rayonnement de la culture vietnamienne dans le monde. Il est l’auteur d’un grand nombre d’ouvrages et d’articles sur les cultures vietnamienne et française. Il a obtenu de nombreuses distinctions de la France, en particulier celle de Chevalier dans l’Ordre des Palmes Académiques, en 1992.

[9] Il est intéressant à ce titre d’observer les changements d’attitude vis-à-vis de la langue et du peuple russes au début des années 90. En dépit des aides massives économiques et militaires qui ont été fournies aux Vietnamiens de 1950 à 1975, l’influence russe au Vietnam est retombée à zéro en l’espace de 3 ou 4 ans à partir de 1990. Admirés, adulés et imités jusqu’en 1990, dès 1995, les Russes, assiégés par leurs problèmes économiques, ne représentaient plus rien pour les Vietnamiens.

[10] Le nom de ce mycologue est Jacques Melot, qui est très actif sur les forums consacrés à la langue française et qui a également organisé des conférences sur les tendances affectant le français moderne.

[11] Le meilleur exemple qui prouve cette affirmation est l’énorme retard observé dans les projets de construction d’usines de traitement des eaux dans tout le tiers monde. Pourtant indispensables à la santé publique, la construction d’usines de production d’eau potable, ainsi que d’usines d’épuration, la construction et la rénovation des réseaux de distribution de l’eau, devraient constituer la priorité absolue. Or, ce n’est pratiquement jamais le cas dans les pays dits “émergents”, car la santé publique ne rapporte rien ou pas grand chose, et il est d’ailleurs beaucoup plus profitable de vendre de l’eau potable en bouteille qu’au robinet ! Globalement, les pauvres du tiers monde payent leur eau potable beaucoup plus chère, quand ils peuvent se la permettre, que dans les pays développés. 


 



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