Sujet : |
Lettre ouverte sur
la langue française, à Mme Michaëlle Jean, nouvelle Secrétaire
générale de l'OIF ! |
Date : |
03/12/2014 |
Envoi de Jean-Pierre Colinaro (afrav(chez)aliceadsl.fr)
Mesure
anti-pourriels : Si vous
voulez écrire à notre correspondant, remplacez
« chez » par « @ ». |
Quand notre langue calque ses
expressions et sa syntaxe sur l'anglais et que les anglicismes viennent
pourrir le tout !
Les Canadiens
francophones calquent beaucoup de leurs expressions sur l'anglais,
expressions qui, bien que dites avec des mots français, n'en sont pas
moins de l'anglais. Mais les Canadiens francophones, à leur corps
défendant, ont été conquis militairement par les Anglais et annexés
ensuite à la Couronne britannique en 1763. Ils ont été ainsi coupés,
puis
lâchés par les Français pendant près de deux siècles. Ils ont fait ce
qu'ils ont pu pour ne pas se faire assimiler à l'anglais : ils ont
résisté au Québec, ils ont perdu dans l'Ouest Canadien.
Mais qu'en
est-il en France où nous avons été conquis depuis le traité de
Maastricht à l'idéologie du libre échangisme économique de type
anglo-américain qui impose l'anglais partout ? Nous, nous n'aurons pas
résisté deux siècles après ce traité pour légaliser l'enseignement EN
anglais dans nos universités (Loi de la ministre Fioraso, cet été), nous
n'aurons pas résisté deux siècles pour mettre l'anglais obligatoire dans
toutes nos écoles à partir de 6 ans pour nos enfants (Loi du ministre
Peillon, en 2013), pour trouver normal que nos chercheurs publient leur
travaux en anglais, pour n'avoir rien à redire qu'un chanteur se dise
Français, alors qu'il chante en anglais (Guetta, The Do, Revolver,
Rover, Phoenix, Izia, Shaka Ponk, etc.), pour couvrir nos paysages de
publicités en anglais, etc.
Oui, il faut à tout prix éviter de calquer
nos expressions et notre syntaxe sur l'anglais, mais il faut éviter
aussi les anglicismes qui ne sont que des chevaux de Troie faisant
partie de la stratégie générale qui consiste à éliminer notre langue,
partout. Et le combat n'est pas facile, puisque nous en sommes arrivés
en France, pour prendre un exemple, à nous quereller entre nous pour
l'emploi des mots "COURRIEL" et "INFOLETTRE" qui pourtant, en toute
logique, devraient remplacer les mots anglais "e-mail" et "newsletter" !
Lettre
ouverte à la présidente de la Francophonie : parlez-vous le
franco-canadien ?
L'écrivain Christian Combaz s'est fendu d'une lettre pour
féliciter la nouvelle présidente de la Francophonie, la canadienne
Michaëlle Jean. Il l'invite à lutter contre les anglicismes qui
parasitent la langue française.
Madame,
Je ne me mêlerai pas de commenter votre nomination à la tête
de la Francophonie, sauf pour vous en féliciter, et vous
demander de faire en sorte que nous ayons des raisons
toujours plus nombreuses de nous en réjouir. Votre
nationalité canadienne m'incite à vous écrire parce que
comme nombre de ceux qui professent une certaine exigence à
l'égard du français, je reçois une fois par mois l'email
d'un professeur québécois qui me reproche de ne pas avoir
écrit «courrier électronique».
En général, il enchaîne en déplorant l'usage des mots
parking, pressing, casting dans notre vie quotidienne, à
quoi je réponds que la francophonie canadienne commence à
nous «tanner» à propos de ces détails parce qu'elle néglige
l'essentiel . L'essentiel est d'éviter de parler l'anglais
en employant des mots français, habitude que les Canadiens
français ont contractée après la vogue Antonine Maillet et
qui les incite à écrire «interdit en tout temps» au lieu de
«interdit en permanence» sur les panneaux de stationnement.
L'équivalent littéral de «at all times» n'existe pas en
français. Vous trouverez ici le
panneau et la lettre d'un automobiliste québecois au bureau
local du stationnement . Cette réclamation s'achève hélas
par les mots «Laissez-moi savoir ce que vous en pensez», ce
qui est l'équivalent littéral de «let me know what you think
«, mais n'est pas français non plus. Les exemples pullulent,
au Québec, de ces phrases qui semblent tombées de l'anglais
comme d'un traducteur de poche. «Il faut rester en contrôle
de votre vie» (you have to stay in control of you life). En
français, on n'est jamais «en contrôle» de quelque chose.
Voici enfin une citation d'un couple de retraités de
Montréal qui chaque année passent trois mois à circuler chez
nous en camping-car, un mot qu'ils réprouvent parce qu'en
québécois il faut dire VR pour véhicule récréatif - ce qui
ferait pouffer n'importe quel Français.
Si vous pouviez convaincre les moteurs de
recherche mondiaux que dans leurs explications en français à
l'adresse des nouveaux inscrits, ils doivent cesser
définitivement d'employer le mot «photo de profil» pour
désigner une photo d'identité, je vous en serais
reconnaissant.
« Les Market y en a beaucoup, et des warning, et du shopping
etc. C'est notre troisième grand voyage et je peux vous dire
qu'éventuellement, pour apprendre l'anglais nous referons
des voyages en France.
»
L'emploi du mot éventuellement comme traduction directe de «
eventually », qui veut dire « en définitive », est une
absurdité qui illustre mon propos et qui compromet le leur.
Eventuellement est un mot français auquel ce couple attribue
un sens anglais, ce qui est plus fâcheux à mon sens que
d'aller chercher ses vêtements au pressing.
Dans le même esprit, Madame, si vous pouviez convaincre les
moteurs de recherche mondiaux, suivez mon regard, que dans
leurs explications en français à l'adresse des nouveaux
inscrits, ils doivent cesser définitivement d'employer le
mot « photo de profil » pour désigner une photo d'identité,
je vous en serais reconnaissant car leur insistance dans
l'erreur, après deux ou trois ans d'observations
récurrentes, témoigne d'un mépris offensant pour la
Francophonie dont vous avez la charge.
Christian Combaz
|
Source :
lefigaro.fr, le lundi 1er décembre 2014
Possibilité de réagir à cette lettre sur :
http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2014/12/01/31001-20141201ARTFIG00333-lettre-ouverte-a-la-presidente-de-la-francophonie-parlez-vous-le-franco-canadien.php
|