Sujet : Ségolène répond à la CFTC
Date : 03/11/2006
De : J.-L. Cuisiniez  (sn2a.cftc(chez)wanadoo.fr)  Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez "chez" par "@"



Voici la réponse de SÉGOLÈNE ROYAL à la question posée par la CFTC afin qu'elle mette à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale la proposition de loi de M. Marini.


De : Ségolène Royal : sroyal@assemblee-nationale.fr

À : Jean-Loup Cuisiniez : sn2a.cftc(chez)wanadoo.fr

 



   Monsieur le délégué,

 

Votre courriel du 30 septembre a retenu mon attention, car je suis moi aussi très sensible aux questions de la diffusion de la langue française, et j’ajouterai des langues de France.

Notre dispositif législatif du 4 août 1994 qui encadre l’emploi du français est solide. Nos concitoyens ont le droit de recevoir une information et de s’exprimer dans leur langue ; les textes  garantissent la santé et la sécurité des consommateurs et des salariés en imposant le français dans un grand nombre de circonstances de la vie courante et dans le travail. Dans un contexte général marqué par une perte de fonctionnalité croissante des langues nationales au profit de l’anglais, la France se caractérise par une relative résistance à la poussée de la langue dite « globale ».

Mais nous devons rester vigilants et c’est la raison pour laquelle les sénateurs à l’unanimité ont adopté le 10 novembre 2005 une proposition de loi complétant celle du 4 août 1994, en tirant les enseignements de dix années de pratique. Cette proposition qui a été votée par la haute assemblée, avec l’enthousiasme des représentants de mon groupe parlementaire, évoque notamment des points sur lesquels, en tant que délégué syndical, vous appelez fort justement mon attention dans votre lettre :

Obligation pour les chefs d’entreprises de plus de 500 salariés de présenter un rapport annuel au comité d’entreprise sur l’usage du français dans l’entreprise,

Obligation que l’ordre du jour et les procès verbaux des réunions et des délibérations des CE soient rédigés en français.

À ce jour, compte tenu de la charge et du rythme de travail, cette excellente proposition de loi n’a toujours pas été inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale, ce que je déplore. Je peux vous assurer que le groupe parlementaire  auquel j’appartiens est convaincu  que la défense et la promotion de notre langue fait partie des grands combats pour la diversité culturelle et la valorisation d’un patrimoine immatériel essentiel pour le vivre ensemble de nos concitoyens. Parler français dans son lieu de travail est aussi un droit social.

La langue française est porteuse d’un patrimoine d’idées, de valeurs, de culture et l’une de ses caractéristiques est d’être un objet de désir ; on ne compte plus les écrivains d'origine étrangère non francophone qui ont choisi le français pour écrire leur œuvre : Samuel Beckett, Andreï Makine, Jorge Semprun, Assia Djebar, Gao Xingiian et tant d’autres.

C’est en s’appuyant sur ces grandes consciences que les salariés français ne doivent plus subir de vexations face à un emploi abusif car unique de l’anglais. Mais la défense de notre langue ne doit pas faire l’économie de l’ouverture aux autres langues, notamment aux langues romanes, ce qui permettrait d’équilibrer une situation aujourd’hui porteuse d’injustices. C’est pourquoi, si je suis en responsabilité, je porterai ce dossier au niveau européen, car  le sujet concerne aussi nos voisins des institutions européennes.

Je vous prie de croire, Monsieur le délégué, en l'assurance de mes sentiments les meilleurs.


Ségolène Royal