Sujet :

Martine Aubry, Carpette anglaise 2010 !

Date :

29/12/2010

De Jean-Pierre Busnel   (courriel : contact(chez)iab.com.fr)    

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Martine Aubry, Carpette anglaise 2010 !

 

Le Prix 2010 de la Carpette anglaise a donc été décerné à Mme Martine Aubry (d'une recherche sur Google, il résulte que le seul grand organe de presse à avoir évoqué ce Prix, décerné le 15 décembre dernier, est le quotidien Ouest-France, ce qui n'est certes pas pour nous surprendre)Notamment, a déclaré le jury, parce que cette dame n'a rien trouvé de mieux pour dénommer la société française à laquelle elle aspire que cette formule pour le moins singulière (et largement incompréhensible) de « société du care" (en anglais care veut dire soin). Et pourquoi pas la « société du welfare" (bien-être en français) ?

On veut bien que les fondateurs de notre Sécurité sociale à la Libération, issus des milieux de la Résistance intérieure et de la France Libre (tels les grands commis de l'État - tous les deux membres du Conseil d'État - qu'étaient Alexandre Parodi et Pierre Laroque), aient été très largement inspirés par les travaux de l'illustre économiste et homme politique anglais Lord William Henry Beveridge (1879-1963, portrait ci-dessous), consignés dans son fameux rapport au Parlement de 1942 sur l'assurance sociale et les prestations connexes (en anglais Report to the parliament on social Insurance and allied services). On veut bien, aussi, que ce sont les Américains - aussi curieux que cela puisse paraître à beaucoup - qui ont inventé la formule « sécurité sociale » avec le Social Security Act (essentiellement axé sur la lutte contre le chômage) signé le 14 août 1935 par le président Franklin Delano Roosevelt (1882-1945) dans le cadre du New Deal (nouvelle donne, en français), nom donné à la politique interventionniste destinée à lutter contre les effets de la Grande Dépression aux États-Unis. On peut aussi rappeler que le "care" est un principe philosophique anglo-saxon exprimant un idéal de souci de l'autre que l'on retrouve par exemple chez David Hume (1711-1776) et Adam Smith (1723-1790). 

Il n'empêche que l'on ne peut que s'étonner, en 2010, que des dirigeants d'une formation française dite de gauche donnent le sentiment, en utilisant des mots anglais pour définir leur projet politique (comme s'ils étaient incapables de le faire en français), de puiser leur inspiration dans une doctrine néolibérale qui plaide pour le démantèlement progressif du capitalisme encadré, contrôlé par les États et tempéré par la redistribution, pour la liquidation partielle du politique et du social, pour le règne des marchés, pour la marchandisation de la société. D'autant plus que les résultats économiques, sociaux et financiers de la cure néolibérale prescrite depuis le début des années 1980 (déréglementations et privatisations à haute dose) ne sont pas à la hauteur - c'est le moins que l'on puisse dire - des lendemains enchanteurs annoncés. Une doctrine préconisant donc le retrait de l'État mais qui, comme l'a souligné à propos des États-Unis Joseph Eugene Stiglitz, Prix Nobel d'économie, dans son livre Le Triomphe de la Cupidité (2010 pour la traduction française), aura débouché, à la suite de la terrible crise financière que l'on sait, sur « la plus vaste intervention de l'État dans l'histoire américaine ».

Le rapport de William Beveridge fut très vite extrêmement populaire, mais plutôt fraîchement accueilli par le gouvernement de Winston Churchill.

Il sera introduit dans la législation par le gouvernement travailliste de Clement Attlee.

 

Jean-Pierre Busnel
Président de l'Institut André Busnel
contact@iab.com.fr

 

 

 

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