Sujet : Au Conseiller de l'Élysée
Date : 03/11/2007
De : Marceau Déchamps   (courriel : dlf78(chez)club-internet.fr)     Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez "chez" par "@"

 

 

COMMUNIQUÉ

 

M. Albert Salon, ancien ambassadeur, président de FFI-France et d'ALF, membre de DLF, anime une émission hebdomadaire sur Radio-Courtoisie.

Lors de sa dernière émission il a pu interroger M. Christian Philip, conseiller à la Présidence.

Je vous livre, ci-dessous, le résumé de cet entretien, établi par M. Albert Salon lui-même.

Les réponses de M.Philip sont particulièrement encourageantes et nous espérons qu'elles seront suivies d'effet à tous les niveaux du gouvernement actuel.

Marceau Déchamps
vice-président
Défense de la langue française
http://www.langue-francaise.org

 

 

 

Texte de M. Albert Salon

 

M. Christian Philip, Conseiller à l’Élysée, représentant personnel du Président de la République pour la Francophonie (« sherpa des Sommets francophones ») et moi avons enregistré hier notre émission « Le français en partage » dans le studio de Radio Courtoisie. Vous pourrez écouter cette émission sur 95,6 Mhz lundi 12 novembre de 10 h 45 à 11 h 45, répétée le même jour de 14 h à 15 h, puis mardi 13 de 6 à 7 h du matin, puis encore le samedi 17 de 10 h 45 à 11 h 45.

Le titre : « La francophonie vue de l’Élysée ».

Mes questions ont bien porté sur le fond et les problèmes difficiles, en matière tant de langue française (francophonie) que de Francophonie organisée (avec un F majuscule).

 Les réponses ont été plutôt officielles et rassurantes, comme on pouvait s’y attendre. J’avais invité M. Philip précisément pour qu’il pût apporter les réponses de l’Élysée aux interrogations, aux vives critiques, aux reproches d’aboulie et de forfaiture qui sont –à juste titre, nous semble-t-il – fréquents sur les ondes de Radio Courtoisie et ailleurs, y compris dans ma bouche.

 Mais il y a eu aussi des ouvertures et des annonces intéressantes de la part de notre invité :

 Ainsi, M. Christian Philip a confirmé :

- qu’il allait soumettre au Président de la République un plan d’action substantiel, une « feuille de route » pour le français et la Francophonie, notamment dans la perspective du Sommet de 2008 à Québec ;

- qu’il y aurait bien une politique ambitieuse, plus volontariste, de la langue et de la Francophonie ;

- que cette politique s’inspirera sans guère de doutes des propositions récemment présentées notamment dans nos livres parus ces dernières années sur ces sujets ;

- et que cette politique sera exposée à la Nation le 20 mars prochain par le Président lui-même, à l’occasion de la journée internationale de la Francophonie.

 Il a indiqué que la France allait soutenir la proposition québécoise (de notre amie, ancienne Vice-Première Ministre du Québec, Louise Beaudoin) de mettre en chantier, après la convention sur la diversité culturelle entrée en vigueur l’an dernier, une nouvelle convention UNESCO sur la diversité linguistique.

Il a insisté sur le sérieux des déclarations, et des engagements pris, par M. Nicolas Sarkozy dans nos domaines lors de la campagne de l’élection présidentielle, que je lui ai relus dans le cours de l’émission.

Ainsi, plus précisément :

En ce qui concerne la langue française, en France et dans le monde :

 Le Président ne manquera pas de rappeler que, malgré le communiqué de presse de M. Xavier Darcos, Ministre de l’Éducation nationale, mal compris selon M. Philip, sur la nécessaire bilinguisation de la France dès le plus jeune âge de nos chères têtes blondes et brunes, qui cause tant d’inquiétude dans nos associations et chez nos auditeurs, la politique du gouvernement reste bien celle du plurilinguisme, et de l’apprentissage de deux langues étrangères vivantes.

Le Protocole de Londres sur les brevets européens n’est pas aussi pervers « que nos associations le prétendent ; il faudra voir à l’usage… et un Protocole peut toujours être modifié si le besoin s’en fait sentir ».

M. Philippe note bien, et partage, nos préoccupations de traduction des logiciels imposés uniquement en anglais dans nos grandes entreprises dites mondialisées et jusque dans nos hôpitaux (je lui ai rappelé que le tout-à-l’anglais tue, à propos des irradiés d’Épinal). Notre proposition insistante de susciter à ce sujet des prises de position fortes à la fois de la Francophonie organisée (OIF) et de l’Union européenne seront étudiées. Le gouvernement est sensible au fait que les syndicats et nos associations se mobilisent ensemble pour « le droit de travailler en français en France ».

Le gouvernement se préoccupe comme nous de la place du français langue de l’olympisme dans les Jeux de 2008 à Pékin.

 Dans une conversation hors micro, M. Christian Philip a noté notre souci de voir rapporter la directive de Bruxelles mettant fin en mars 2008 à la possibilité pour les pilotes français d’Air France de continuer à communiquer en français avec les contrôleurs aériens français dans l’espace aérien français. Humiliation intolérable et inutile pour notre pays pionnier de l’aviation, à la puissante industrie aéronautique et spatiale.

Il a aussi ajouté, à la suite de ma question sur l’apparent enterrement à l’Assemblée Nationale de la proposition de loi du Sénateur Philippe Marini, pourtant votée au Sénat en 2005, qu’il soutient activement les efforts de députés tel M. Jacques Myard qui demandent son inscription à l’ordre du jour, la loi Toubon devant en effet être nécessairement complétée par la proposition sénatoriale.

En ce qui concerne la Francophonie (OIF) :

 Notre critique à l’égard de l’élargissement à tout va (aujourd’hui 68 membres à part entière, associés et observateurs), au détriment de l’approfondissement de la coopération à l’intérieur de l’OIF, alors même que les crédits du multilatéral francophone restent ridiculement bas (350 millions d’euros par an, la chaîne TV5 incluse, tous bailleurs de fonds confondus) a été notée depuis longtemps. Selon M. Christian Philip, il est difficile de refuser les candidatures de pays qui veulent adhérer, qui sont en elles-mêmes encourageantes. Il est aussi raisonnable de penser que le plein est fait désormais.

Il a cependant précisé, à la suite de ma question au sujet d’Israël, que ce pays, qui a une proportion non négligeable de citoyens de langue maternelle française, aura –comme nous-mêmes le pensons -  toute sa place dans notre Communauté francophone, lorsque les pays arabes auront admis sa présence à leurs côtés comme ils l’admettent dans d’autres instances internationales.

Sur le rôle international de la Francophonie, notamment de laboratoire de dialogue des cultures et de contre-modèle humaniste de civilisation, le gouvernement partage nos analyses.

Sur le terrain de la Francophonie économique, notamment dans l’énorme secteur des industries culturelles, vitales pour les ensembles géolinguistiques et géoculturels telles la Francophonie, la Lusophonie, l’Arabophonie, l’Hispanophonie… qui doivent travailler ensemble comme elles l’ont fait dans la lutte corrélative pour la convention UNESCO sur la diversité culturelle, M. Christian Philip s’est montré compréhensif, mais très prudent.

 À ma question sur l’installation de la Maison de la Francophonie à Paris, « serpent de mer », promise par M. Chirac en 2002 au Sommet de Beyrouth, en 2004 à Ouagadougou, en 2006 à Bucarest, M. Philip a annoncé que le Président a promis à M. Abdou Diouf que le choix du bâtiment sera fait avant Noël 2007.

Je n’ai pas eu le temps de l’interroger sur l’annexe demandée au château de Villers-Cotterêts. Je le lui rappellerai.

Il en va de même du drapeau de la Francophonie à placer à côté du drapeau européen à chaque fois que celui-ci flanque le drapeau français, pour bien montrer que la politique étrangère de la France continue à « marcher sur les deux jambes ».

Il en va de même, enfin, de l’inscription dans notre Constitution, de la Francophonie, c’est-à-dire de la phrase que nos associations proposent depuis 15 ans et que le Sénat avait approuvée en 1998 : « La République participe à la construction d’un espace francophone de solidarité et de coopération ». Ce point fera l’objet de nouvelles démarches de notre part dans la perspective de la prochaine révision constitutionnelle portant sur l’éventuelle ratification du « traité de Lisbonne ». L’opportunité nous en paraît évidente, voire aveuglante, puisqu’il s’agit, là encore, d’affirmer que la France a certes l’Europe, mais aussi un « grand large » qu’elle ne saurait abandonner ou minorer dans sa politique étrangère.

(complément communiqué ultérieurement ) M. Christian Philip a de lui-même estimé que des pays qui ont voulu (tous, selon lui) adhérer à la Francophonie, doivent normalement donner chez eux une place beaucoup plus grande au français. J’ai renchéri en rappelant notre proposition déjà ancienne de faire décider en OIF (pourquoi pas au Sommet de Québec ?...) que les membres à part entière doivent accorder au français, dans leur enseignement public, leurs media publics, leur représentation dans les organismes internationaux et leur correspondance diplomatique, la « clause de la langue étrangère la plus favorisée », c’est-à-dire une place au moins égale à celle qu’ils accordent à toute autre langue non nationale et étrangère

 Ma conclusion de l’émission a porté sur le fait que nos associations et mouvements, et tout notre « vieux peuple recru d’épreuves » et revenu de beaucoup d’enchantements, alléchés par les affichages d’intentions, les discours, et les promesses, attendent des actes forts.

 

Albert Salon, ancien Ambassadeur,

président du FFI-France et d’ « Avenir de la langue française ».

 

 

 

 

Le français qui gagne (année 2007)