Sujet : |
La chasse à l'anglais est ouverte au CSA |
Date : |
13/02/2014 |
Envoi
de Norbert Terral
(courriel : norberterral(chez)free.fr)
Mesure
anti-pourriels : Si vous
voulez écrire à notre correspondant, remplacez
« chez » par « @ ». |
Action contre l'anglicisation à la télévision
Peut-être qu'à force d'envoyer des messages de protestations au CSA (3
ou 4 partent chaque semaine du bureau de l'Afrav) avec copie à M.
Jacobs, médiateur de France 2 et à M. Gélinet, le Monsieur langue
française du CSA, peut-être qu'à force
d'envoyer des messages de protestations, ces messieurs et dames
vont enfin se décider à travailler pour notre langue et tenter
d'arrêter, ce faisant, l'anglicisation qui a cours sur nos ondes.
Mais, cela n'est pas gagné, à l'exemple de
M. Marc El Nouchi, le directeur général du CSA, qui n'a toujours
pas répondu à notre question, à savoir pourquoi le CSA semble ignorer
l'existence de l'article 39 de la Charte de France Télévisions, un
article qui précise, noir sur blanc, que les termes étrangers sont à
proscrire lorsqu'un équivalent français existe.
Conclusion : continuons à envoyer des mots de protestations chaque fois
qu'apparaît un anglicisme à la télévision, en nous inspirant, s'il le
faut, ou en les copiant, de ceux de notre rubrique «
Exigeons
du CSA le
respect de notre langue à la télévision !a»
NT
***************************
La chasse à
l'anglais est ouverte au CSA
Dérive. le
CSA a décidé de s'attaquer à l'omniprésence de la
langue anglo-saxonne dans les médias audiovisuels.
Allumer sa télé sur le
best of du
Before du Grand Journal de Canal +
en
access,
enchaîner sur TF1 avec The
Voice en prime time,
écouter les candidats reprendre d'anciens
hits en
live en espérant une
standing ovation,
zapper sur une chaîne d'info pour découvrir que le
clash entre les
producteurs de smartphones
lovv-cost fait le
buzz, puis revenir sur
la Une pour suivre l'after
qui débriefe le
talent-show musical :
tel est le pitch d'une
soirée télé en 2014 ! À force de se retourner dans
son cercueil, Molière fait la toupie : le nombre
d'anglicismes employés à la télévision est tel que
le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a décidé
de se pencher sur la question.
En décembre,
l'institution organisait le premier colloque
consacré à l'avenir de la langue
française dans les
médias. Première constatation : le phénomène n'est
pas nouveau. Les happyfew
de Stendhal ou le spleen
de Baudelaire l'attestent. Recteur de l'Agence
universitaire de la francophonie, Bernard
Cerquiglini rappelle que la volonté de protéger la
langue remonte au XVIIe siècle : « À l'époque, on
disait que le français était dénaturé par les mots
italiens ! Quand on étudie les JT d'il y a dix, vingt
et trente ans, on constate que le taux d'anglicismes
était le même qu'aujourd'hui. Seulement, ce ne sont
pas les mêmes mots. C'est le propre des mots à la
mode de se démoder et d'être remplacés. Il y a un
turnover des
anglicismes ! » Votée en août 1994, la loi Toubon
oblige pourtant les médias à utiliser l'équivalent
français d'un mot étranger, quand il existe.
Pourquoi n'est-elle pas respectée ?
« Pour certains,
utiliser le français fait démodé, analyse l'écrivain
Érik Orsenna. Les médias sont un milieu
hyperconcurrentiel où il faut être plus dans le coup
que son rival. » « On sent aujourd'hui un véritable
rejet devant cette tendance. Chaque fois qu'un mot
anglais est utilisé à l'antenne, je reçois du
courrier ! », témoigne pourtant Nicolas Jacobs,
médiateur de l'information de France 2. Le phénomène
s'est accentué avec la révolution numérique, arrivée
des États-Unis avec son propre vocabulaire. À chaque
nouveau mot, une course contre la montre démarre.
«Il faut
rapidement trouver un équivalent français avant
qu'il n'entre dans le langage courant, sinon il est
trop tard », explique l'académicien Marc Fumaroli,
président de la commission générale de terminologie
et de néologie. Jérôme Bouvier, médiateur de
Radio France, confirme : « Le mot "courriel"
a réussi à se faire une place de justesse, mais
beaucoup de personnes avaient déjà pris l'habitude
d'employer "e-mail". En revanche, aucun amateur de
Twitter n'utilisera
"mot-dièse", arrivé deux ans après l'anglais
hash-tag. » Trop tard
aussi pour "ordiphone", le terme officiel pour
désigner un smartphone.
La chasse aux anglicismes ne doit pourtant pas être
systématique, comme en témoigne Patrice Gélinet, du
CSA : « Une multitude de ces mots sont entrés dans
l'usage et il serait stupide de tenter de les en
faire sortir. Qui dirait "balle-au-pied" au lieu de
football ? » Le rôle de
la télévision est donc crucial. « Les médias sont le
reflet de la société, mais le problème, c'est qu'ils
sont prescripteurs et que leur mauvais usage devient
la norme », appuie Xavier North, délégué général à
la langue française. Faut-il punir les mauvais
élèves ?
Le CSA préfère miser
sur la pédagogie. La création d'une charte du bon
usage de la langue
ou d'une Victoire du français, remise chaque année à
un média exemplaire, a été évoquée. « Je ne pense
pas qu'il faille sanctionner, mais mieux défendre,
conclut Patrice Gélinet. Par exemple, nous avons
passé un accord avec Gulli, dont beaucoup
d'émissions ont un titre à consonance anglo-saxonne.
Elle a promis d'y remédier et, dans le cas où le
titre originel est imposé par les producteurs, Gulli
s'est engagée à refuser le programme. Et pourquoi ne
pas renommer
The Voice, "La Voix",
comme au Québec ? Si les Québécois y sont arrivés,
pourquoi pas nous ? » Why not,
effectivement ?
RAPHAËL PORIER
Source : Télé deux
Semaines, semaine du 8 au 21 février No
264,
magazine du groupe
PRISMA MÉDIA
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