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La langue d’Emma, la langue française évincée de chez elle !

Hommage à la langue de ma défunte mère, à la langue de cette race de paysans qui avaient toujours porté très haut ces belles valeurs morales balayées aujourd’hui par la vague d’un « numérique » dévastateur.

par Philippe Carron

Je revois encore les lettres qu’elle écrivait dans son jeune temps, dans un style d’une sobriété et d’une limpidité étonnantes, dans cette langue française désormais rejetée de partout comme une « lingua non grata » par l’anglomanie délirante de ses propres locuteurs … et qui est sur le point de la rejoindre six pieds sous terre. 

La Langue d’Emma,

c’est cette immense langue française refusée au locuteur lambda et qui s’effiloche au fil des jours, assassinée en pleine course à cause justement de sa grâce et de la pensée universelle qu’elle laissait apparaître en filigrane tout au long de son discours ; c’est cette langue qui savait prendre le contre-pied d’une idéologie anglo-saxonne dévoreuse d’humanité.

Qu’en restera-t-il une fois que le credo du tout-à-l’anglais aura eu raison d’elle ?

- Rien. Si ce n’est que ses locuteurs auront cessé d’exister dans ce qui faisait leur être original, leur vérité… avec au plus profond de leur âme, une plaie indiciblement béante, souvenir d’une perte irrémédiable, qui viendra les tourmenter pendant longtemps encore, comme ont été marqués au fer rouge d’autres peuples à d’autres époques.

Philippe Carron, 

Linguiste de formation, ancien professeur de français et de langues… dont l’anglais.

 

La langue française évincée de chez elle...

Madame, Monsieur,

En ce début de siècle, la langue française, a fortiori la chanson d’expression française, se voit petit à petit évincée comme une malpropre du paysage romand – et de toute la francophonie européenne, d’ailleurs -  par les fers de lance du tout-anglais propulsés sur la ligne de front d’une guerre culturelle planétaire échafaudée depuis belle lurette par les faucons de l’atlantisme pur et dur (Cf. le discours de Churchill à Harvard en 1943).

Leur incessant matraquage, enrobé d’un subtil enfumage, a d’abord carrément déboussolé une grande majorité de Romands qui ont fini tout de même par « avaler » le  fantasme d’une langue unique  censée leur faire décrocher la lune. Une telle rage maladive de faire « table rase » des scories du passé, en l’occurrence de l’idiome de tout un peuple, s’apparente à ce que le sociologue Mathieu Bock-Côté appelle « le totalitarisme, sans le goulag » (Cf. son dernier livre).

Quiconque tente de s’opposer à ce « linguicide » se voit aussitôt marginalisé, qualifié de réactionnaire, ses actions frappées du sceau de l’invisibilité par une gigantesque machinerie médiatico-économico-financière qui ne tue pas physiquement, ni ne porte pas atteinte à vos chairs, mais qui vous broie dans son fallacieux carcan idéologique avant que vous ayez réussi à émettre le moindre son de protestation.

La société romande – de même que l’Europe francophone toute entière - est devenue en peu de temps une zone de « reformatage » et de « recadrage » mental où la chasse au « vernaculaire » par la « clique de la pub et du fric » (dixit Michel Serres)  a fait d’un vecteur d’expression unique au monde un épouvantail à l’instar de celui que l’on jette après les moissons. 

La Suisse et ses quatre langues officielles

Je défie toute personne qui se permettrait de nier des faits aussi visibles que nos plus hautes montagnes… et qui ne souffrent pas le début du premier zeste de contestation (voir plus loin).

La singularité romande est-elle vraiment appelée à disparaître une bonne fois pour toutes dans les méandres de l’Histoire en des temps où les Droits de l’Homme sont paradoxalement érigés - et plus que jamais -  comme autant de remparts pour nous protéger de la barbarie ?

Un pays qui tourne le dos à son passé, qui perd la mémoire de ce qui l’a façonné peut-il encore fanfaronner et se regarder le nombril alors qu’il a vendu son âme au diable ?

Pour bien mettre en lumière cette vaste entreprise de casse et de substitution linguistique ici même, je m’en vais citer quelques exemples édifiants – parmi des milliers d’autres, et des plus cocasses - sans que cela ne fasse réagir pour autant les associations ou organismes romands liées de près ou de loin à la défense des consommateurs, ni même les Chambres de commerce des cantons francophones**, ou d’autres entités pourtant en lien également avec tout le tissu économique local (cités sous A).

La SMART SURFACE PROTECTION, formule d’un produit qui fait briller vos parquets

L’HANDYMATIC CLASSIC POWDER, MADE IN SWITZERLAND est censée dégraisser votre vaisselle

Le CLASSIC RINSE AID de HANDY MATIC  - SHINE et GLASS PROTECTION, pour faire briller vos verres

Le MIGROS PLUS OECO POWER, vinaigre de pommes censé dissoudre le calcaire en sels solubles

Le POTZ POWER PROTECT, le détartrant incontournable pour vos sanitaires

En passant au SELF CHECK-OUT de la MIGROS, heureux mais inconscient, vous évitez les files d’attente en caisse

Hilarant ! Le TOURING CLUB SUISSE vient de me proposer sa nouvelle carte de crédit : Il s’agit du TCS MEMBER MASTERCARD pour ses membres, ou alors le TCS TRAVEL MASTERCARD GOLD pour les trotte-globe. Il va sans dire que ces deux cartes offrent des avantages, entre autres le TCS PARK+PAY, et un paiement sécurisé sur Internet grâce à la MASTERCARD IDENTITY CHECK.

LA BALOISE SERVICE IMMOBILIER PASSE À l'ANGLAIS.Fascinant !. Ma gérance immobilière qui s’intitulait il y a trois ans à peine LA BÂLOISE SERVICE IMMOBILIER est devenu en très peu de temps LA BÂLOISE ASSET MANAGEMENT, puis BÂLOISE ASSET MANAGEMENT, sans article, et enfin tout simplement BALOISE ASSET MANAGEMENT (sans accent). Comme pour LE CREDIT SUISSE, le procédé est simple : on commence par enlever l’article (trop français), puis on supprime l’accent comme pour bien éliminer toute ressemblance avec une langue qui doit sentir le soufre.

Désopilant ! À la Migros, un jour de promotion, au  rayon de vêtements  >  MIGROS ESSENTIALS  MEN PYJAMA COTTON  HIT,  en gros caractères sur l’emballage avec, au dos et en caractères à peine visibles, les traductions dans les langue nationales, histoire de faire passer la pilule.

N’oublions pas la MIGROLCARD pour l’essence, ni la SUPERCARD de la COOP, la CORNERCARD, de la CORNER BANK, pour vos liquidités, la CUSTOMER CARD de l’UBS, pour tout type d’achat, de même que toutes les trouvailles en …CARD qui n’arrêtent pas de venir gonfler nos portefeuilles jour après jour…

Les nombreuses associations francophones de défense du français, en copie sous cc, auraient le droit – je le leur suggère même, ils ont les adresses-courriel - de demander aux responsables politiques d’une démocratie qui se veut exemplaire en matière de protection de sa diversité linguistique pour quelle raison ils ont laissé « s’évaporer » dans les marges une langue qui avait imprimé son « aura » sur la mosaïque culturelle du pays. Ils seraient en droit de fustiger l’attitude irresponsable de ces mêmes politiques pour avoir laissé le pays d’Henry Dunand, le fondateur de la Croix-Rouge, sombrer dans l’anarchie linguistique la plus anticonstitutionnelle… au seul profit d’une langue étrangère, dominatrice de surcroît, procédé digne des républiques bananières.

J’invite les organismes suisses romands susmentionnés non seulement à prendre toute la mesure du basculement langagier en cours entre la chaîne du Jura et la Sarine, mais aussi et surtout d’appréhender le danger mortel que constitue, pour la diversité des langues et des cultures planétaires, le recours unilatéral au parler de la pensée unique anglo-saxonne qui ne supporte rien de ce qui dépasse de son glacial moule hégémonique.

Salutations francophones

Philippe Carron  Linguiste de formation ; ancien professeur de français et de langues… dont l’anglais

 

Copie à la classe politique romande et frontalière, aux journaux romands et francophones, aux agences de presse, etc.

Annexes :

Il était une fois… la langue d’Emma (Philippe Carron)

- Quand l’écriture inclusive et l’anglolâtrie achèvent une langue unique au monde (Philippe Carron)

* « Le Suisse aux bras noueux ne trait plus sa vache, mais vit dangereusement… contrairement à ce que disait Victor Hugo en son temps.

** Un idiome ne constitue-t-il pas un levier économique de première importance ?

 

 

 




Publié par Régis RAVAT le 05 mars 2024

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Orthographe, corrections : contact.sy@aliceadsl.fr

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